Ils ne seront finalement que vingt, sur une fournée initiale d'environ 80 prétendants d'un peloton initialement touffu, sur la ligue de départ de la course à la magistrature suprême.
Entre-temps, le tamis du Conseil constitutionnel est passé par là. Il faut reconnaître que pour dresser la liste des heureux élus à cette présidentielle du 25 février prochain au Sénégal, les mailles ont été particulièrement serrées, les prétendants ayant étant réduits au quart de leur effectif initial. Un essorage particulièrement drastique donc même si, comparé à la dernière présidentielle où ils n'étaient que cinq sur la ligne de départ, ce chiffre est particulièrement élevé et même historique, puisque c'est la première fois qu'autant d'hommes et de femmes se bousculent au célèbre portillon.
Les recalés n'ont pas pu franchir l'entrée, notamment faute de parrains ou de disponibilité de la caution ou en raison d'autres éléments manquants qui les rendent inéligibles. Selon la loi électorale sénégalaise en effet, chaque candidat doit payer la caution de 30 millions de francs CFA et recueillir les parrainages d'un minimum de 0,6 % et d'un maximum de 0,8 % du fichier électoral, soit entre 44 231 et 58 975 signatures, de treize députés ou de 120 maires et présidents de conseils départementaux.
Au nombre de ces exclus figure en bonne place Ousmane Sonko. Sans surprise, il faut le dire, tant son parcours aura été parsemé d'embûches judiciaires à cause de ses deux condamnations. En juin 2023, il avait été condamné à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse » et la Cour suprême du Sénégal avait aussi confirmé sa condamnation à six mois de prison avec sursis pour diffamation du ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang.
Fort heureusement pour le leader du regroupement politique Pastef, du reste dissous, ses partisans avaient justement prévu un plan B en trouvant un candidat de substitution en la personne de Bassirou Diomaye Diakhar Faye, dont on se demande cependant ce qu'il pourrait bien faire dans la mesure où il n'a ni l'aura ni le charisme de son mentor. Et pour ne rien arranger, lui aussi est derrière les barreaux, même s'il n'a pas été encore jugé, poursuivi et placé en détention pour outrage à magistrat.
L'autre grand absent à ce scrutin présidentiel n'est autre que Karim Wade. Fils de l'ancien président Abdoulaye Wade et surnommé ministre du Ciel et de la Terre, par dérision et en référence au gros portefeuille de ministre d'Etat, de la Coopération internationale, de l'Aménagement du territoire, des Transports aériens et des Infrastructures qui lui avait été offert en 2009 quand son pater était aux affaires. Après le départ de ce dernier, Karim avait été emprisonné, poursuivi et condamné pour six ans de prison avant de bénéficier de petits arrangements. Il a notamment bénéficié d'une grâce présidentielle pour s'exiler au Qatar. Il rêvait donc d'un retour triomphal, mais il va devoir encore attendre.
En cause, sa double nationalité franco-sénégalaise. Certes, Karim Wade avait déclaré sur l'honneur, le 21 décembre 2023, avoir renoncé à sa nationalité française, sauf que le document l'attestant a été établi le 16 janvier dernier et ne saurait être rétroactif. Le « débouté » a beau crier à l'injustice et déclarer qu'il va introduire un recours auprès des juridictions internationales, on ne voit pas comment en l'espace d'un mois il pourrait par extraordinaire être repêché. Le voilà donc subissant une double peine avec une ambition présidentielle contrariée et la perte de sa nationalité française.
Le 25 février prochain, l'affaire se jouera donc entre le porte-drapeau de la coalition présidentielle, Amadou Bâ, ancien Premier ministre de Macky Sall, et les vieux lions de la faune politique au pays de la Teranga, à l'image de l'ancien Premier ministre Idrissa Seck et de celui qui fut maire de Dakar, Khalifa Sall. Et ce sera sans le président sortant, Macky Sall, qui a renoncé à un troisième mandat auquel il disait avoir le droit de prétendre.