Quelque 260 millionnaires et milliardaires appellent à davantage taxer les super riches dans une pétition en marge du Forum économique mondial de Davos.
Elles s'appellent Valerie Rockefeller, Abigail Disney ou Marlene Engelhorn. Leur point commun est d'avoir hérité d'une grande partie de leur fortune.
Et aujourd'hui, elles s'indignent aux côtés de quelque 260 milliardaires et millionnaires, dans une pétition remise aux chefs d'Etat et de gouvernement présents au Forum économique mondial de Davos. La campagne s'appelle "Proud to pay more", fiers de payer plus, et appelle à augmenter les taxes pour les super riches. L'an dernier, ils étaient 200 à avoir paraphé le texte.
Selon les signataires, "la richesse extrême et improductive" pourrait ainsi être transformée en "investissement dans notre avenir démocratique".
Marlène Engelhorn, dont la famille a autrefois fondé le groupe chimique allemand BASF, critique depuis longtemps l'absence d'impôts sur les successions dans son pays, l'Autriche. Elle cherche actuellement à "redistribuer" 25 millions d'euros de son héritage à la société. Un "conseil citoyen" est en train d'être mis en place pour décider de l'utilisation de cet argent "dans l'intérêt général".
Des riches toujours plus riches
Penser à l'intérêt général, dans un monde où les riches deviennent de plus en plus riches : selon le World Inequality Report 2022, plus d'un tiers de la fortune privée accumulée depuis le milieu des années 1990 est allée aux 1% les plus riches au monde.
Pendant ce temps, la moitié de la population mondiale, soit les quatre milliards de personnes les plus pauvres, n'ont reçu que 2% de cette richesse. Et depuis la pandémie de coronavirus, le nombre de nouveaux milliardaires croit à un rythme effréné.
Mais face à ces inégalités croissantes, les signataires de la pétition de Davos sont des voix plutôt isolées, estime Stefan Bach, expert en fiscalité à l'Institut allemand de recherche économique. "Ce sont surtout des héritiers qui ne dirigent pas activement une entreprise. Leur richesse qu'ils n'ont pas bâtie eux-mêmes les met mal à l'aise", explique-t-il.
Le pouvoir des grandes fortunes
La plupart des grandes fortunes sont liées à des entreprises qui s'organisent pour effectuer un important travail de lobbying dans les hautes sphères politiques et menacent de délocaliser leurs activités en cas d'imposition trop élevée. D'autres héritiers pourraient être tentés de ne pas prendre la succession de l'entreprise familiale.
Au niveau national, il est difficile de taxer les super riches. Les milliardaires peuvent assez facilement transférer leur domicile à l'étranger, où la fiscalité est plus avantageuse.
Pour Stefan Bach, seule une réponse "coordonnée au niveau international" peut produire des effets. En 2021, plus de 130 Etats s'étaient mis d'accord sur un impôt minimum d'au moins 15 % sur les bénéfices des plus grandes entreprises dans leur pays. Selon l'OCDE, ce taux pourrait générer quelque 150 milliards de dollars de recettes fiscales supplémentaires par an au niveau mondial.