Il est une pratique qui facilite le vol de bétail, selon des éleveurs interrogés par l'APS dans le département de Mbour (ouest) : l'abattage clandestin.
À cause de ce moyen rapide de dissimulation du bétail volé, certains bouchers sont souvent considérés comme des complices ou des receleurs.
Dans le département de Mbour, des voix s'élèvent pour proposer la création de comités communaux de vigilance. Le fléau préoccupe de plus en plus les associations d'éleveurs.
« Les chefs de quartier et les chefs de village des 19 communes du département de Mbour doivent s'impliquer dans le recensement du bétail et son identification », propose Dieynaba Sow, la présidente de la Convergence des éleveurs pour l'émergence du Sénégal.
« Les voleurs sont des éleveurs en même temps. Heureusement, tous les éleveurs ne sont pas des voleurs ! Le problème, c'est que les gens se taisent tout en sachant quelquefois qui a volé quoi », s'indigne Mme Sow, avant de proposer : « Il faut créer des comités communaux de lutte contre le vol de bétail, qui vont se charger de faire de la dénonciation anonyme. »
« Les voleurs s'empressent d'abattre le bétail volé », dit-elle, estimant que « c'est tout un circuit qu'il faut démanteler, sans oublier les receleurs parmi les bouchers ».
Gallo Dia, le délégué départemental de la Maison des éleveurs du Sénégal à Mbour, se désole du vol de bétail et de son impact sur l'élevage local. « Chaque éleveur peut perdre des dizaines de millions de francs CFA à cause du vol de bétail. »
Il dénonce les « complicités » qu'entretiennent les voleurs avec certains bouchers et transporteurs. « La Maison des éleveurs du Sénégal veut faire en sorte que chaque éleveur détienne un document attestant de la provenance du bétail qu'il vend sur le marché », promet M. Dia.
La lutte contre le vol de bétail et celle menée contre l'abattage clandestin vont de pair, selon Cheikh Bamba Faye, un habitant de Ndiaganiao, une commune du département de Mbour.
Saloum Dieng, coordonnateur d'une association de bouchers de Mbour, préconise la prudence, concernant les accusations de vol, de complicité de vol ou de recel dont ses pairs sont quelquefois l'objet.
Il reconnaît que les bouchers ont un rôle à jouer dans la lutte contre le vol de bétail. « Des brebis galeuses, il en existe dans tous les métiers. Tous les bouchers de la commune ont intérêt à lutter contre l'abattage clandestin, une pratique qui ne nous honore pas », professe M. Dieng, boucher depuis quatre décennies.
Pour éviter que les voleurs de bétail recourent à l'abattage clandestin, « il doit y avoir une collaboration entre les services chargés de la sécurité (police et gendarmerie), de l'hygiène et de l'élevage », suggère-t-il.
Le contrôle des abattages est d'autant plus efficace que chaque tête de bétail admise dans les abattoirs dûment identifiés comme tels est minutieusement répertorié, le nom et le code professionnel du boucher relevés en même temps.
« Encourager les bouchers à utiliser l'abattoir moderne de Mbour »
Grâce à l'identification et à la traçabilité des animaux abattus, les abattoirs construits par les pouvoirs publics contribuent indirectement à la lutte contre le vol de bétail, selon le service départemental de l'élevage de Mbour.
« Il faut identifier le cheptel à l'aide de la technologie », recommande son chef, Amadou Dia. Il reconnait que le vol de bétail est une pratique très répandue dans la zone.
L'abattage clandestin inquiète Bayati Babou, le deuxième adjoint du maire de Mbour, qui a réuni les acteurs concernés pour lui trouver des solutions.
« Il fallait sensibiliser les acteurs à la nécessité de mettre un terme à l'abattage clandestin. Il faut en même temps encourager les bouchers à utiliser l'abattoir moderne de Mbour, qui peut accueillir une centaine d'animaux par jour », propose M. Babou.