C'est un défi complexe mêlant, en permanence, l'Exécutif, le Législatif et le Judiciaire. En tant qu'« Etat de droit et non Etat de police », le Sénégal souhaite une application de la protection de la vie privée qui va au-delà des textes existants en prenant en compte des considérations d'ordre éthique et moral basées sur les valeurs sénégalaises.
La rentrée solennelle des Cours et Tribunaux ouvre de manière récurrente l'année judiciaire. Dans ce rendez-vous d'écoute et d'échanges entre l'Exécutif, le Judiciaire et le Barreau, la protection de la vie privée a été retenue comme thème principal. C'est une thématique qui nécessite « d'assurer l'équilibre entre le principe de liberté et l'impératif de protéger ce qui relève de la sphère privée, y compris les données personnelles », a précisé le président Macky Sall, lors de la cérémonie d'ouverture, ce jeudi. Après avoir félicité Barou Diop, Conseiller délégué à la Cour suprême qui a rappelé les « aspects juridiques, judiciaires, mais également philosophiques, religieux et technologiques » de la thématique, le président Sall est conscient que « nul n'est épargné » dans un monde marqué « l'explosion des technologies de l'information et de la communication et la frénésie des réseaux sociaux ».
Adaptation
Ainsi, il souscrit à « la nécessité de concilier les avancées technologiques et l'exigence de protéger les droits fondamentaux attachés à la vie privée ». Pour cela, le président Sall souhaite « leur adéquation entre les lois et institutions existantes avec les réalités évolutives de notre temps ». La mise en place de la Commission de Protection des Données Personnelles entre dans ce registre en rendant effectives les dispositions de la loi 2008-12 du 25 janvier 2008 sur la protection des données à caractère personnel. Cependant, pour le chef de l'Etat, « la protection de la vie privée n'incombe pas seulement à l'État ». Elle doit être le cas dans le milieu socio-professionnel privé pour préserver l'équilibre entre le travail et la vie personnelle. Il en est de même pour les procédures judiciaires en partant de l'enquête jusqu'au jugement.
Nécessité fait loi
Toutefois, pour Macky Sall « la protection de la vie privée n'exclut pas la possibilité pour l'Etat d'infléchir certaines règles, à des fins d'intérêt général, notamment pour assurer la sécurité des personnes et des biens, ou réprimer certaines formes de criminalité ». Ces entorses doivent être en lien avec la lutte contre le terrorisme, la cybercriminalité et la criminalité organisée, pour le Président de la République.
Vantant un Sénégal, « démocratique où la liberté est le principe et la restriction, l'exception », le président Sall reste convaincu, en définitive, que « l'exercice de protection de la vie privée ressemble à un mouvement de balancier dont l'équilibre délicat conditionne le bon fonctionnement de l'Etat de droit. »
Pour cela, la bonne marche de la protection de la vie privée réside sur l'application de considérations d'ordre éthique et moral avec un contrat social, pas au sens de Jean-Jacques Rousseau, mais celui basé sur « nos propres valeurs de culture et de civilisation ». Pour étayer ses dires, M. Sall cite les vertus et lois de la vie en société comme « am jom, am jaanu biir, am ngor, am kersa ak teggin, saangg soutoureu. »