Madame la Présidente,
Excellences,
Chers collègues et amis,
Bonjour à tous et bonne année.
L'aube d'une nouvelle année est l'occasion de regarder l'avenir avec espoir et de revenir sur
l'année écoulée. Mes sentiments sont partagés quand je repense à l'année 2023.
Cette année nous a offert l'occasion de nous réjouir, car nous avons fêté notre 75 e anniversaire et
sommes revenus sur les nombreux progrès en santé humaine auxquels nous avons participé. Les
réalisations et les étapes importantes ont été nombreuses, notamment la fin de la maladie à coronavirus
2019 (COVID-19) et de la variole simienne comme urgences sanitaires mondiales.
Mais ce fut aussi une année d'affliction ; une année marquée par des conflits, des catastrophes,
des maladies et des décès évitables. Et ce fut une année de deuil pour la famille de l'OMS, car nous
avons perdu notre chère soeur, la Dre Carissa Etienne, ancienne Directrice régionale pour les Amériques,
et notre collègue Dima Alhaj, qui a été tuée à Gaza avec toute sa famille - son bébé de six mois, son
mari et ses deux frères.
L'année 2023 nous a rappelé pourquoi le travail que nous accomplissons est si important et
pourquoi notre monde a besoin d'une OMS forte, durable, efficace, efficiente, qui a les moyens de
réaliser son potentiel. Et c'est pourquoi nous sommes ici cette semaine.
Comme toujours, l'ordre du jour est bien rempli du fait de la très grande diversité des travaux de
notre Organisation. L'un des points les plus importants à l'ordre du jour de cette semaine est le projet
de quatorzième programme général de travail (PGT) et je remercie les États Membres de leur
collaboration à son élaboration. Notre objectif a été d'assurer la continuité entre le treizième et le
quatorzième programme général de travail, tout en tenant compte des leçons tirées de l'évaluation du
treizième PGT et des réalités de notre monde en constante évolution.
Les trois priorités fondamentales du treizième PGT - des populations en meilleure santé, la
couverture sanitaire universelle et la préparation et la riposte aux situations d'urgence - se retrouvent dans
les trois premières des cinq priorités qui constituent l'objectif global du projet de quatorzième PGT
- promouvoir, garantir et protéger la santé et le bien-être pour toutes et tous, partout. J'attends avec
impatience notre discussion sur le projet de quatorzième PGT aujourd'hui, en vue de sa mise au point
définitive et, espérons-le, de son adoption à la Soixante-Dix-Septième Assemblée mondiale de la Santé.
Comme je le fais chaque année, j'aimerais prendre quelques instants pour vous donner un aperçu
de certaines des grandes réalisations de l'année dernière, en me fondant sur le cadre défini par les cinq
priorités.
Tout d'abord, la promotion de la santé. Il s'agit notamment du travail que nous faisons ensemble
pour lutter contre les causes profondes des maladies, dans un climat en pleine mutation et eu égard aux
conditions dans lesquelles les gens vivent et travaillent et aux produits qu'ils consomment. Le tabagisme
est en baisse dans 150 pays et il y a aujourd'hui dans le monde 19 millions de fumeurs de moins qu'il y
a deux ans. En ce qui concerne les acides gras trans, des interdictions ou des limites ont été mises en
place dans six pays l'année dernière et sont entrées en vigueur dans sept autres. De même, chaque année,
nous aidons de plus en plus de pays à lutter contre l'émaciation et l'obésité de l'enfant ; à encourager
l'allaitement maternel ; à augmenter les taxes sur l'alcool, le tabac ou les boissons sucrées ; à
réglementer la commercialisation de produits destinés aux enfants qui nuisent à leur santé, y compris
les cigarettes électroniques ; à promouvoir l'activité physique ; et à rendre les routes plus sûres.
En ce qui concerne les changements climatiques, la vingt-huitième session de la Conférence des
Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28) a été un
moment décisif, car pour la première fois, une journée a été consacrée à la santé grâce aux Émirats
arabes unis. Au total, 147 pays ont signé la déclaration des Émirats arabes unis sur le climat et la santé
de la COP28, les donateurs se sont engagés à verser plus d'un milliard de dollars des États-Unis (USD)
et ont convenu d'abandonner les combustibles fossiles, pour ne citer que ces quelques exemples. Nous
avons également aidé plus d'une cinquantaine de pays à mettre en place des systèmes de santé résilients
qui ne portent pas atteinte au climat. Par ailleurs, avec nos partenaires de l'Alliance quadripartite sur
l'approche « Une seule santé », nous avons aidé de nombreux pays à élaborer des plans d'action « Une
seule santé », fondés sur le principe selon lequel la santé des êtres humains, celle des animaux et celle
de notre environnement sont étroitement liées.
Passons maintenant à la deuxième des cinq priorités, garantir la santé en soutenant les pays dans
leur cheminement vers la couverture sanitaire universelle, qui repose sur des soins de santé primaires
solides. Il s'agit là de notre travail commun sur le renforcement des systèmes de santé et sur les services
qu'ils fournissent pour la santé de la mère et de l'enfant ou encore dans le domaine des maladies
transmissibles et non transmissibles.
Sur le plan politique, 2023 a été une année charnière pour la couverture sanitaire universelle, avec
la deuxième réunion de haut niveau sur ce thème qui s'est tenue à l'Assemblée générale des Nations
Unies en septembre dernier. À l'approche de la réunion, l'OMS et la Banque mondiale ont publié de
nouvelles données montrant que la moitié de la population mondiale n'est pas entièrement couverte par
les services de santé essentiels et que deux milliards de personnes sont confrontées à des difficultés
financières en raison des dépenses de santé à leur charge. Dans la déclaration politique, les pays ont pris
plus d'une cinquantaine d'engagements pour élargir progressivement l'accès aux services de santé
essentiels et améliorer la protection financière.
C'est d'ailleurs ce que fait l'OMS partout dans le monde. Dans le cadre du Partenariat pour la
couverture sanitaire universelle, nous apportons un soutien à 120 pays sur la voie de la couverture
sanitaire universelle. Pour prêter notre concours aux pays soucieux de renforcer les soins primaires, nous
nous sommes associés à un groupe de banques de développement pour lancer la Plateforme
d'investissement pour l'impact en santé, dotée d'un financement de 1,5 milliard d'euros.
Près de 150 pays ont sollicité l'appui de l'OMS pour renforcer leurs personnels de santé et d'aide
à la personne, dont la grande majorité sont des femmes. Le Bénin a par exemple obtenu de nouveaux
financements et prévoit d'employer 4000 agents de santé supplémentaires, soit une augmentation de
près de 25 %. L'Afrique du Sud s'est engagée à créer 97 000 emplois supplémentaires pour les
soignants, en particulier dans les communautés rurales mal desservies. De même, pour soutenir le
personnel infirmier et obstétrical, nous avons mis au point un ensemble d'outils de soins d'urgence de base dont il a été démontré, dans une étude menée dans des hôpitaux au Népal, en Ouganda et en Zambie, qu'ils pouvaient permettre une baisse de la mortalité pouvant aller jusqu'à 43 %.
L'année 2023 a été une année fructueuse en ce qui concerne les travaux de l'OMS visant à
améliorer l'accès aux médicaments et aux produits de santé. Nous avons préqualifié 136 médicaments,
vaccins, dispositifs de diagnostic et autres produits. Nous avons ajouté de nouveaux médicaments contre
la sclérose en plaques, le cancer et les maladies cardiovasculaires à la Liste des médicaments essentiels.
Enfin, nous avons diffusé huit alertes concernant des produits médicaux de qualité inférieure et falsifiés.
Aux Maldives, la nouvelle approche de l'OMS en matière de test a permis aux autorités sanitaires de
détecter rapidement des médicaments pédiatriques contaminés et de déclencher ainsi, à l'échelle
mondiale, une alerte et un rappel qui ont sauvé des vies dans quatre régions.
Nous continuons également de fournir un appui aux États Membres pour qu'ils renforcent leurs
systèmes réglementaires. Nous avons constaté que les systèmes réglementaires de la Türkiye et de
l'Arabie saoudite avaient atteint des niveaux de maturité élevés. La République de Corée, Singapour et
la Suisse ont été les trois premiers pays dont les autorités de réglementation ont été inscrites sur la liste
de l'OMS, ce qui fait d'eux des « régulateurs de référence » qui répondent à des normes et pratiques
internationalement reconnues. Par ailleurs, l'OMS jouant un rôle de chef de file, nous continuons
d'encourager le transfert de technologie et la fabrication locale.
Nous avons également accueilli le premier sommet mondial sur la médecine traditionnelle en
Inde, afin de soutenir un recours à la médecine traditionnelle, complémentaire et intégrative qui soit
fondé sur des données probantes, sûr, efficace et durable.
Tout ce travail destiné à renforcer les systèmes de santé soutient l'action que nous menons pour
sauver des vies et améliorer la qualité de vie tout au long de l'existence, en particulier pour les femmes
et les enfants. Après des progrès spectaculaires en matière de mortalité de la mère et de l'enfant réalisés
dans le cadre des objectifs du Millénaire pour le développement, la situation n'a guère évolué depuis
2016.
Nous continuons de collaborer avec les États Membres afin de recenser les obstacles et de leur
donner les outils nécessaires pour les surmonter. L'année dernière, nous avons publié de nouvelles
feuilles de route ou lignes directrices sur l'hémorragie du post-partum, la gestion du travail
d'accouchement et la santé des adolescents, et nous avons soutenu les efforts de dizaines de pays
désireux de les mettre en oeuvre. Comme vous le savez, l'hémorragie du post-partum est l'une des
principales causes de mortalité chez les mères lors de l'accouchement. À l'autre bout de la vie, nous
avons aidé 18 pays à renforcer les soins aux personnes âgées, notamment par de nouvelles lignes
directrices sur les douleurs lombaires.
En ce qui concerne la santé sexuelle et reproductive, nous avons apporté notre soutien à 23 pays
prioritaires afin que soit facilité l'accès à des services de qualité et centrés sur les survivantes pour ce
qui est des violences sexuelles. De plus, 11 autres pays ont introduit le vaccin contre le virus du
papillome humain l'année dernière pour combattre le cancer du col de l'utérus.
Dans de nombreux pays, les programmes de vaccination systématique ont été parmi les plus
gravement touchés par les perturbations dues à la pandémie de COVID-19, ce qui a entraîné des
flambées de rougeole, de diphtérie, de poliomyélite et de fièvre jaune.
En avril de l'année dernière, nous avons lancé « Le grand rattrapage » avec l'UNICEF et Gavi,
l'Alliance du vaccin, dans le but d'appuyer les efforts déployés par les pays pour enrayer les épidémies
et rétablir les programmes de vaccination au moins aux niveaux d'avant la pandémie.
Dans le même temps, le Groupe stratégique consultatif d'experts sur la vaccination, le SAGE, a
recommandé l'année dernière de nouveaux vaccins contre la dengue et la méningite, et un deuxième
vaccin contre le paludisme, le vaccin R21/Matrix M. Le fait de disposer de deux vaccins contre le
paludisme contribuera à combler l'énorme écart entre l'offre et la demande et pourrait permettre de
sauver des dizaines de milliers de jeunes vies, en particulier en Afrique. À la suite de la recommandation
du vaccin antipaludique RTS,S/AS01 par l'OMS en 2021 après le succès des projets pilotes menés au
Ghana, au Kenya et au Malawi, le déploiement à grande échelle du vaccin débute actuellement au
Cameroun. Au moins 29 pays ont l'intention d'introduire le vaccin et l'Alliance Gavi a déjà accepté
d'en soutenir 20 autres qui prévoient de le déployer cette année.
L'année dernière, nous avons également formulé de nouvelles recommandations relatives à une
nouvelle génération de moustiquaires imprégnées d'insecticide. Par ailleurs, nous avons certifié
l'Azerbaïdjan, le Belize et le Tadjikistan comme étant exempts de paludisme, et Cabo Verde est venu
s'ajouter à cette liste il y a quelques semaines à peine.
Concernant la tuberculose, plus de 7,5 millions de personnes atteintes de la maladie ont eu accès
à un diagnostic et à un traitement en 2022, soit le nombre le plus élevé depuis que nous avons commencé
à assurer le suivi il y a près de 30 ans. En outre, les participants à la deuxième réunion de haut niveau
de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la lutte contre la tuberculose ont convenu de nouveaux
objectifs pour mettre fin à cette maladie et nous avons établi le Conseil pour accélérer la disponibilité
de vaccins antituberculeux qui sera chargé de faciliter la mise au point, l'homologation et l'utilisation
équitable de nouveaux vaccins antituberculeux.
S'agissant du VIH, plus de 75 % des personnes vivant avec le virus dans le monde reçoivent
désormais un traitement antirétroviral et presque l'intégralité de celles qui suivent un traitement
parviennent à une suppression de la charge virale, ce qui signifie qu'elles ne peuvent pas infecter
d'autres personnes. Nous commençons maintenant à entrevoir une voie vers la réalisation de la cible de
l'objectif de développement durable consistant à mettre fin à l'épidémie de VIH. L'Australie est devenue
le premier pays à annoncer avoir pratiquement éliminé la transmission du VIH dans le centre de Sydney.
De même, au Zimbabwe, l'intégration des services de lutte contre le VIH et de santé sexuelle et
reproductive a permis de multiplier par sept le nombre de femmes bénéficiant d'un dépistage du VIH et
des infections sexuellement transmissibles.
Pendant ce temps, en ce qui concerne l'hépatite, l'Égypte est devenue le premier pays à atteindre
l'étape « or » historique sur la voie menant à l'élimination de l'hépatite C.
Du côté des maladies tropicales négligées, le Bénin, l'Irak et le Mali ont éliminé le trachome ; le
Ghana a éliminé la trypanosomiase humaine africaine ; la République démocratique populaire lao et le
Bangladesh ont éliminé la filariose lymphatique. Le Bangladesh est également devenu le premier pays
au monde à éliminer la leishmaniose viscérale, grâce à une collaboration entre de nombreux partenaires,
dont l'OMS et le Programme spécial de recherche et de formation concernant les maladies tropicales.
Parallèlement à cela, nous continuons à intensifier nos efforts en vue d'éradiquer la poliomyélite.
L'année dernière, six cas de la maladie imputables au poliovirus sauvage ont été signalés au Pakistan et
six en Afghanistan, soit le deuxième nombre le plus faible de cas signalés au cours d'une année civile.
Cette année, notre cible consiste à interrompre la transmission du poliovirus sauvage et j'espère que ce but sera atteint. Par ailleurs, nous déployons également un nouveau vaccin contre le poliovirus de type 2,
afin de réduire le risque de flambées de poliovirus dérivé d'une souche vaccinale.
Nous pouvons également être fiers de notre action dans le domaine des maladies non
transmissibles. L'année dernière, nous avons aidé plus de 80 pays à intégrer des services de lutte contre
les maladies non transmissibles dans leurs systèmes de santé. Par exemple, en Éthiopie, nous avons
appuyé les efforts visant à renforcer le dépistage, le diagnostic et le traitement dans 85 établissements
de santé répartis dans sept régions.
Concernant l'hypertension, 10 nouveaux pays ont mis en oeuvre le programme technique
HEARTS. L'Initiative mondiale de lutte contre le cancer de l'enfant a fourni un soutien technique et
financier dans plus de 70 pays en partenariat avec le St. Jude Children's Research Hospital. Nous avons
également fourni une assistance à neuf pays afin d'élargir l'accès aux services de santé mentale pour
près de 20 millions de personnes supplémentaires. Du reste, au moins 45 pays, de la Bulgarie au
Cambodge en passant par la Jordanie, ont réalisé des progrès pour répondre aux besoins de santé non
satisfaits des migrants et des réfugiés.
Dans le même temps, nous continuons à soutenir les pays dans le cadre de leur riposte à la crise
liée à la résistance aux antimicrobiens. Le nombre de pays notifiant des données sur les infections
bactériennes a plus que triplé en sept ans et, l'année dernière, 11 autres pays ont élaboré un plan d'action
national multisectoriel sur la résistance aux antimicrobiens.
La réunion de haut niveau de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la résistance aux
antimicrobiens organisée cette année offrira une autre occasion importante d'obtenir des engagements
concrets face à cette menace mondiale urgente, qui tue au moins 1,3 million de personnes chaque année.
Venons-en maintenant à la troisième des cinq priorités : protéger la santé. 2023 a été une année
importante pour nos travaux de préparation, de prévention et de riposte face aux urgences sanitaires. En
mai, après presque trois ans et demi, j'ai déclaré la fin de la COVID-19 et de la variole simienne en tant
qu'urgences sanitaires mondiales, bien qu'elles restent toutes deux des menaces à l'échelle de la planète.
Plus des deux tiers de la population mondiale ont bénéficié d'une primovaccination complète contre la
COVID-19. Le Mécanisme COVAX, qui a cessé ses activités à la fin de l'année dernière, a joué un rôle
essentiel en livrant près de deux milliards de doses et en sauvant quelque 2,7 millions de vies dans les
pays à faible revenu. Nous continuons d'exhorter tous les États Membres à maintenir et à renforcer les
capacités qu'ils ont mises en place pendant la pandémie dans le cadre de leur engagement à se préparer
à de futures situations d'urgence.
En 2023, de nombreuses autres crises ont réclamé toute notre attention. Au total, l'OMS est
intervenue dans 65 situations d'urgence classées, allant des tremblements de terre qui ont frappé la
Türkiye et la Syrie aux conflits et situations d'insécurité qui prévalent en Éthiopie, en Haïti, au
Myanmar, en République démocratique du Congo, au Soudan, en Ukraine et, bien sûr, sur le territoire
palestinien occupé, en particulier dans la bande de Gaza.
Nous avons aidé des pays à accéder à des vaccins et traitements pour faire face à des épidémies
de choléra, de diphtérie, de méningite et de fièvre jaune. Par ailleurs, les équipes médicales d'urgence
ont joué un rôle essentiel dans le cadre de l'action menée par l'OMS dans 19 situations d'urgence ayant
touché 18 pays. Je me contente de citer ces chiffres, car si j'essaie d'expliquer ce que l'OMS a fait dans
toutes ces situations d'urgence, nous y passerions la journée, mais vous trouverez toutes ces informations
décrites dans plusieurs rapports. La semaine dernière, l'OMS a lancé son Appel d'urgence pour la santé
mondiale par lequel elle sollicite 1,5 milliard USD à l'appui des activités de riposte à mener face aux
urgences en 2024.
Si nos interventions en cas d'urgence font souvent la une des journaux, notre travail de prévention
des situations d'urgence et de préparation en la matière est moins visible, alors qu'il est tout aussi
important. Le Cadre de l'OMS pour la préparation, la riposte et la résilience face aux urgences sanitaires
contient une feuille de route à suivre concernant la gouvernance, les systèmes, les outils, la main-
d'oeuvre et le financement nécessaires pour renforcer la sécurité sanitaire nationale, régionale et
mondiale.
Comme vous le savez, de nombreuses initiatives sont en cours dans ce domaine. Par exemple, le
Fonds de lutte contre les pandémies est opérationnel et a effectué sa première série de décaissements,
d'un montant de 338 millions USD en faveur de 37 pays. La deuxième série, à hauteur de 500 millions USD, est en cours.
Nous avançons également en ce qui concerne le dispositif intérimaire de contre-mesures médicales,
le Corps mondial pour l'action sanitaire d'urgence, l'examen universel de l'état de santé et de préparation,
le Réseau international de surveillance des agents pathogènes, le Système BioHub de l'OMS, le Centre de
transfert de technologie pour les vaccins à ARNm, le Centre d'information de l'OMS sur les pandémies et
les épidémies et l'initiative Préparation et résilience face aux menaces émergentes. Cela représente en
réalité plus d'une dizaine d'initiatives qui s'appuient sur l'expérience que nous avons acquise pendant la
pandémie de COVID-19. Je ne peux pas rentrer dans le détail de toutes ces initiatives, mais je sais que
lorsque nous les mettrons en oeuvre, le monde sera mieux préparé.
Sur le plan politique, les dirigeants mondiaux rassemblés lors de la réunion de haut niveau de
l'Assemblée générale des Nations Unies sur la prévention, la préparation et la riposte face aux
pandémies ont adopté une déclaration politique forte, qui comprenait notamment un engagement à
conclure les négociations sur l'accord sur les pandémies et sur les amendements à apporter au Règlement
sanitaire international (2005) pour le mois de mai de cette année. Cependant, force m'est d'avouer que
je crains vivement que les États Membres ne respectent pas cet engagement. Il reste très peu de temps
et plusieurs questions restent en suspens.
Je pense que si l'accord sur les pandémies et les amendements au Règlement sanitaire
international (2005) n'aboutissent pas, il s'agirait d'une occasion manquée que les générations futures
pourraient ne pas nous pardonner. Il faudra du courage et il faudra faire des compromis. Vous ne
parviendrez pas à un consensus si chacun campe sur ses positions. Tout le monde devra céder quelque
chose, faute de quoi personne n'obtiendra rien.
J'invite instamment tous les États Membres à oeuvrer dans l'urgence et avec détermination pour
parvenir à un consensus sur un accord solide qui contribuera à protéger nos enfants et nos petits-enfants
contre de futures pandémies. De plus, j'aimerais profiter de cette occasion pour remercier les deux
coprésidents et les membres des bureaux pour leur leadership au sein de l'organe intergouvernemental
de négociation chargé de rédiger et de négocier une convention, un accord ou un autre instrument
international de l'OMS sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies et du Groupe
de travail sur les amendements au Règlement sanitaire international (2005).
Excellences, chers collègues et amis, le but global du quatorzième programme général de travail est
de promouvoir, de garantir et de protéger la santé. Ces trois priorités fondamentales sont soutenues par les
quatrième et cinquième priorités : démultiplier les progrès et être efficace au bénéfice de la santé.
44. Démultiplier les progrès en santé, c'est mettre à profit la puissance de la science, de la recherche,
des technologies numériques, des données et des communications afin d'accompagner les pays au mieux
pour qu'ils avancent plus rapidement vers la réalisation des cibles des objectifs de développement
durable.
En 2023, nous avons apporté notre soutien à 50 pays en adoptant une démarche axée sur les
résultats, c'est-à-dire une approche constante, systématique et fondée sur les données pour la mise en
oeuvre des projets et l'obtention de résultats. Par exemple, Madagascar utilise cette approche pour
prévenir la filariose lymphatique. De même, grâce à la démarche axée sur les résultats, le Viet Nam est
en passe de réduire le tabagisme chez les hommes pour passer de 44 % à l'heure actuelle à 33 % d'ici
à 2025.
Le Centre mondial de données sanitaires héberge désormais les plus grandes bases de données
sur les inégalités et la mortalité, ainsi que des profils sur mesure de données concernant les pays. Plus
de 120 pays ont maintenant mis en oeuvre la Onzième Révision de la Classification internationale des
maladies (CIM-11), qui comprend désormais un deuxième module sur la médecine traditionnelle.
L'année 2023 a également été déterminante pour ce qui est de notre action visant à venir en aide
aux pays afin qu'ils exploitent la puissance des technologies numériques et de l'intelligence artificielle
à l'appui de la santé. Nous avons lancé le Réseau mondial de certification sanitaire numérique et
l'Initiative mondiale sur la santé numérique, et nous avons publié des lignes directrices sur la
réglementation de l'intelligence artificielle dans le domaine de la santé.
Le Conseil sur l'économie de la santé pour tous a présenté son rapport final. En octobre de cette
année, le campus de l'Académie de l'OMS à Lyon ouvrira ses portes, ce qui marquera le début d'une
ère nouvelle - je remercie d'ailleurs la France pour son soutien indéfectible. Cette académie, lorsqu'elle
sera pleinement opérationnelle, changera la donne en matière de renforcement des capacités, tant pour
les États Membres que pour notre personnel.
La cinquième et dernière priorité, « être efficace », signifie que nous devons poursuivre nos
efforts pour construire une OMS plus solide. Nous nous appuierons pour cela sur les sept piliers de la
transformation entamée il y a six ans et demi, dans le but de renforcer notre stratégie, notre modèle
opérationnel, nos processus, nos partenariats, notre financement, nos personnels et notre culture.
Nous ne cessons de faire des progrès dans chacun de ces domaines. BMS, notre nouveau système
de gestion des ressources institutionnelles, appelé à remplacer le système actuel, est en cours de
déploiement. Notre nouvelle stratégie relative à la chaîne d'approvisionnement nous permet de
prépositionner des fournitures pour intervenir plus efficacement en cas de situation d'urgence. Nous
avons réduit le délai de recrutement de 40 % en quatre ans. Nous sommes en train de mettre en place un
nouveau système de recours au personnel contractuel. Nous améliorons l'accès aux soins de santé
mentale pour les employés. Nous avons globalement atteint l'égalité femmes-hommes et amélioré la
parité pour les niveaux hiérarchiques les plus élevés. Nous avons lancé le Conseil des jeunes de l'OMS
et la Commission de la société civile de l'OMS et amélioré la façon dont nous consultons les acteurs
non étatiques.
Enfin, nous continuons d'oeuvrer pour mettre sur pied une nouvelle approche du financement qui
soit plus durable et plus prévisible. Je remercie les États Membres pour les progrès substantiels déjà
réalisés dans la mise en oeuvre des recommandations du Groupe de travail des États Membres sur le
financement durable.
L'une des principales recommandations du Groupe de travail est l'idée d'un cycle
d'investissement, adoptée l'an dernier par l'Assemblée de la Santé et dont vous êtes saisis cette semaine.
L'objectif de ce cycle d'investissement est de financer le quatorzième programme général de travail,
d'améliorer la prévisibilité et la flexibilité des financements, ainsi que d'éliminer les poches de
sous-financement qui ont posé de nombreux problèmes par le passé.
Je remercie tous les États Membres pour leur participation constructive au cycle d'investissement
jusqu'à présent et je me réjouis de la discussion à venir qui débouchera, je l'espère, sur votre
approbation. Je tiens, à cette occasion, à remercier Björn Kümmel d'avoir présidé le Groupe de travail
sur le financement durable. C'est sous sa houlette que les recommandations relatives aux contributions
fixées et au cycle d'investissement ont été formulées. Vielen dank, Björn.
Bien entendu, nous comprenons tout à fait que les États Membres attendent un retour sur
investissement, sous la forme d'une OMS plus efficace et plus efficiente ; une OMS dont l'impact serait
mesurable. Cela peut tout à fait se comprendre. Nous restons déterminés à mettre en place les
changements que vous avez demandés par l'intermédiaire du Groupe de travail des États Membres à
fonctionnement souple sur le renforcement de la gouvernance budgétaire, programmatique et financière
de l'OMS, changements pour lesquels nous avons pris des engagements dans le cadre du Plan de mise
en oeuvre de la réforme établi par le Secrétariat.
Notre engagement à appliquer une tolérance zéro à l'égard de toute forme d'inconduite sexuelle
s'inscrit dans la même logique. En République démocratique du Congo, nous avons mis en place un
accompagnement d'un an pour les victimes conformément à la norme en vigueur au sein du système des
Nations Unies. Nous sommes néanmoins conscients que cela n'est peut-être pas toujours suffisant pour
certaines femmes, c'est pourquoi l'accompagnement peut être prolongé au cas par cas.
L'une de mes grandes priorités cette année est de renforcer nos bureaux de pays comme cela n'a
encore jamais été fait. Il y a un peu plus d'un an, nous avons créé le Groupe d'action pour l'obtention
de résultats, composé de représentants de l'OMS des six Régions, dans le but de mettre sur pied un plan
visant à atteindre cet objectif.
Ses travaux ont été compilés dans un plan d'action en six points, qui est en cours de mise en
oeuvre. Afin d'établir une présence prévisible dans chaque bureau de pays, nous avons donné la priorité
au recrutement visant à pourvoir 400 postes dans ces bureaux. Nous avons engagé 200 millions USD
pour financer ces postes. Cinq Directeurs régionaux et moi-même avons délivré une délégation de
pouvoirs conjointe à l'échelle mondiale aux représentants de l'OMS, afin de leur donner les moyens
d'apporter un soutien plus adapté et plus rapide à nos États Membres. L'objectif est de conférer une
autonomie accrue aux responsables des bureaux de pays.
Pour ce qui est de la politique de mobilité géographique mondiale, elle a été lancée l'an dernier
et se trouve maintenant dans sa phase volontaire, sachant que la première de ces phases volontaires est
achevée.
L'année 2024 sera une année déterminante pour la santé mondiale et pour notre Organisation
mondiale de la Santé. Ce sera une année riche en occasions. En effet, vous avez cette année l'occasion
de définir la stratégie mondiale pour la santé pour les quatre prochaines années, dans le cadre du
quatorzième PGT. Cette année, vous avez l'occasion de définir l'avenir des urgences sanitaires, au
moyen de l'accord sur les pandémies et des amendements au Règlement sanitaire international (2005).
Enfin, cette année, vous avez également l'occasion de façonner l'avenir de cette Organisation, au travers
du cycle d'investissement. Il s'agit de trois grandes tâches. Comme je l'évoquais avec la Présidente, il
s'agit là d'une occasion historique : mettre l'accent sur ces questions très importantes qui définiront
l'Organisation pour de nombreuses années à venir.
Je vous exhorte à saisir ces occasions, qui ne se présentent pas très souvent. Nous sommes toutes
et tous ici, car nous souhaitons changer les choses, car nous avons foi dans la mission et dans l'ambition
de l'Organisation mondiale de la Santé. Cette année est l'occasion pour nous de faire la différence et de
faire en sorte que le monde soit en meilleure santé, plus sûr et plus juste, et surtout, plus pacifique.
Merci à toutes et à tous de votre engagement et de votre soutien continus. Mes collègues et
moi-même demeurons déterminés à oeuvrer avec vous pour promouvoir, garantir et protéger la santé,
démultiplier les progrès et être efficaces pour la santé des populations du monde. Votre soutien au cours
des six dernières années dans le cadre du programme de transformation a été crucial et je tiens à vous
en remercier, en mon nom et au nom de tous mes collègues de l'OMS, et nous sommes convaincus que
vous continuerez à soutenir les efforts en vue de parvenir à un monde meilleur. Je vous remercie.