Afrique: Pandémie ou non, l'oxygène médical demeure essentiel

12 janvier 2024 par Peter Sands, directeur exécutif du Fonds mondial

La pandémie de COVID-19 a comporté son lot d'images choquantes de personnes à bout de souffle, incapables de respirer qui, faute d'une oxygénation sanguine suffisante, ont trouvé la mort dans les ambulances alignées devant les hôpitaux. Dans les pays riches, la panique a provoqué une ruée vers l'augmentation du nombre de respirateurs pour faire face à l'afflux de personnes en détresse respiratoire aiguë. Dans des pays comme l'Inde et le Kenya, la course pour trouver des bouteilles d'oxygène pour ses proches était encore plus désespérée. Dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, neuf hôpitaux sur dix ne disposaient pas de l'équipement de base pour l'oxygénothérapie.

Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, Unitaid, l'Agence des États-Unis pour le développement international et d'autres organisations mondiales ont pris des mesures face à ces personnes mourant par manque d'oxygène. Sous l'égide du Dispositif pour accélérer l'accès aux outils de lutte contre le COVID-19 (Accélérateur ACT), le groupe de travail Urgence oxygène a été établi aux fins de coordonner la riposte d'urgence, d'élargir l'accès et d'assurer l'approvisionnement. Depuis lors, ce groupe de travail a supervisé un investissement de plus d'un milliard de dollars pour répondre aux besoins en oxygène, principalement par le biais du dispositif de riposte au COVID-19 (C19RM) du Fonds mondial. Ces fonds ont servi à l'achat de bouteilles d'oxygène et de cuves de stockage, à l'installation de machines de production d'oxygène (appelées « installations de production d'oxygène par adsorption par inversion de pression ») et à la formation spécialisée des agentes et agents de santé.

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Hélas, cette intervention est arrivée trop tard pour bien des personnes, car la phase aiguë de la pandémie a coïncidé avec une pénurie mondiale de bouteilles d'oxygène. Il faut plusieurs mois pour mettre sur pied un approvisionnement en oxygène pérenne au sein d'un établissement hospitalier, compte tenu de la sophistication de l'équipement et de la tuyauterie à installer. La formation des agentes et agents de santé à l'administration sécuritaire de l'oxygène ne se fait pas du jour au lendemain.

Après la phase aiguë de la pandémie, le groupe de travail Urgence oxygène s'est focalisé sur un accès élargi et durable à l'oxygène médical, afin que les drames du COVID-19 ne se reproduisent jamais. Par ailleurs, même sans la menace d'une pandémie, l'élargissement de l'accès à l'oxygène médical se justifie pleinement. Le manque d'oxygène dans les pays à revenu faible ou intermédiaire conduit chaque année à 800 000 décès évitables. Des nouveau-nés succombent au syndrome de détresse respiratoire. Des mères meurent d'une hypoxémie découlant de complications de l'accouchement. Des victimes de traumatismes aigus (dus notamment à la violence ou aux accidents de la route) meurent également par manque d'oxygène. Des actes chirurgicaux pour tout un éventail de pathologies (dont le cancer) ne peuvent pas être effectués sans apport d'oxygène médical.

Nous aurions du mal à trouver un meilleur exemple d'investissement qui, concomitamment, renforce la préparation aux pandémies et sauve immédiatement des vies. Les recherches menées par la coalition Every Breath Counts montrent que les établissements proposant des soins pédiatriques avec un approvisionnement en oxygène totalement fonctionnel peuvent réduire de près de moitié les décès dus à la pneumonie infantile et de près d'un quart l'ensemble des décès infantiles.

Pour maintenir le rythme des progrès dans l'amélioration de l'accès à l'oxygène médical, le Fonds mondial et Unitaid, aux côtés d'autres partenaires, ont transformé le groupe de travail Urgence oxygène en l'Alliance mondiale pour l'oxygène, connue sous le nom de GO2AL. Ses objectifs sont d'apporter un soutien financier à la production et à la fourniture d'oxygène, ainsi qu'une assistance complète sur les plans technique et de la formation, et de plaider en faveur d'un accès équitable.

Les gouvernements nationaux prennent également les devants. Par exemple, en avril dernier, le président kenyan William Ruto et les gouverneurs de comté ont consacré 41 millions de dollars à un programme de distribution de bouteilles et de cuves de stockage d'oxygène médical dans les centres de soins de santé du pays. Grâce au soutien du Fonds mondial et d'autres partenaires, le Kenya construit également un réseau national d'usines de production d'oxygène, de cuves de stockage et de distribution de bouteilles pour assurer l'approvisionnement des établissements hospitaliers et de soins de santé primaires.

Pendant la pandémie de COVID-19, beaucoup trop de décès ont été imputables au manque d'oxygène et aujourd'hui, beaucoup trop de personnes meurent d'autres affections faute d'oxygène facilement disponible. Voilà pourquoi nous sommes engagés dans l'effort le plus ambitieux jamais déployé pour améliorer l'accès à l'oxygène médical dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

À ce jour et grâce à la générosité des donateurs, avec les États-Unis et l'Allemagne en tête, le Fonds mondial a investi 617 millions de dollars pour aider 98 pays et six projets régionaux à améliorer l'accès à l'oxygène. Ces efforts sauveront des millions de vies et amélioreront considérablement la capacité des pays à revenu faible ou intermédiaire à répondre aux futures menaces de maladies.

Malheureusement, rien ne ramènera les personnes qui ont succombé à une détresse respiratoire. Mais grâce à notre riposte unifiée au COVID-19, des millions d'autres éviteront un tel sort.

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