LIBREVILLE — Sous un grand ciel bleu, les vagues de l'océan Atlantique embrassent les côtes de la ville ivoirienne de San Pedro, accompagnées d'une brise tiède provenant du golfe de Guinée, indiquant à Ribou Adama, distributeur d'intrants agricoles ivoirien, que cette journée est spéciale.
Aujourd'hui, Adama va recevoir une importante cargaison pour son entreprise familiale, qui vend des engrais, des produits phytosanitaires et du matériel agricole. Alors que le vieux et lourd camion se dirige vers son magasin de la ville portuaire du sud-ouest ivoirien, Adama se prépare avec impatience à dévoiler son trésor : des engrais pour les cacaoyers.
La Côte d'Ivoire, premier exportateur mondial de cacao, compte un million de producteurs et contribue à 40 % à l'approvisionnement mondial en chocolat. La majeure partie de la récolte ivoirienne de cacao est expédiée à partir du port de San Pedro, attirant des négociants internationaux tels que la Société africaine de cacao et le géant américain Cargill.
Si le cacao s'avère être une activité lucrative pour les acteurs de l'industrie, les cacaoculteurs de San Pedro ont toujours eu du mal à maximiser leurs profits en raison de l'insuffisance de l'approvisionnement en engrais, ce qui entrave la productivité agricole. Les distributeurs d'engrais comme Adama se sont longtemps débattus avec des ressources limitées ou le soutien des banques pour acquérir des engrais en vrac.
« Nous ne pouvions nous procurer que 200 à 300 tonnes d'engrais par an », explique Adama, ajoutant que ce volume couvrait seulement les besoins de deux ou trois coopératives de producteurs de cacao, alors que la demande d'au moins une douzaine d'autres coopératives était en forte hausse.
Une intervention de la Banque africaine de développement s'est avérée utile. Le Mécanisme africain de financement du développement des engrais, un fonds spécial de la Banque, a mis en place un système de garantie de crédit commercial qui a changé la donne, en partenariat avec l'Office chérifien des phosphates (OCP), l'un des principaux fournisseurs mondiaux d'engrais. Le programme commercial de deux millions de dollars facilite non seulement la conclusion de contrats agro-industriels avec des distributeurs d'intrants agricoles tels qu'Adama, mais leur offre également une formation en gestion d'entreprise.
Le programme renforce la confiance des fournisseurs qui fournissent des engrais à crédit aux distributeurs d'intrants et aux coopératives au profit des agriculteurs, car le Mécanisme africain de financement du développement des engrais partage le risque de crédit transactionnel avec le fournisseur. Les distributeurs d'intrants agricoles participants, comme Adama, peuvent ainsi vendre les engrais à crédit à des détaillants ou à des coopératives qui livrent le produit aux agriculteurs.
Adama se prononce sur l'impact du programme : « Grâce au Mécanisme africain de financement du développement des engrais, nous atteignons aujourd'hui près de 2 000 tonnes [d'engrais] par an. Nous pouvons accéder à des zones où nous ne pouvions pas aller auparavant. Cela a un impact positif sur notre activité », dit-il. Il précise qu'il vend désormais des engrais à douze coopératives, ce qui représente près de 5 000 agriculteurs.
Dans le cadre de ce programme de crédit impliquant Adama et six autres distributeurs d'intrants agricoles de San Pedro, OCP a récemment livré 3 120 tonnes d'engrais à 9 897 agriculteurs locaux, le tout sur une seule saison de plantation.
Alors qu'Adama observait le déchargement du camion d'engrais ce jour-là, des dirigeants de coopératives de producteurs de cacao se sont rassemblés devant son magasin, prêts à faire leurs achats.
« Nos ventes augmentent. Nous sommes prêts à aller encore plus loin avec ce projet parce que nous aidons les producteurs à obtenir des engrais à moindre coût et nous leur permettons de payer en plusieurs fois », explique Adama.
Les programmes du Mécanisme africain de financement du développement des engrais en Côte d'Ivoire ciblent les importateurs, les mélangeurs et les fabricants, dans le but d'aider 180 000 petits exploitants agricoles à accéder aux engrais afin d'accroître leurs rendements.