Ile Maurice: Dilemmes des employés du secteur privé

Y a-t-il deux types de règles pour les travailleurs lorsqu'il s'agit de sécurité ? Les employés du secteur public sont-ils mieux protégés que ceux du secteur privé, qui sont laissés à la «merci» des employeurs face aux conditions météorologiques défavorables ? Des questions se posent à nouveau du côté des salariés qui, entre communiqués et météo imprévisible, se retrouvent souvent stressés et confus.

Que dit la loi ?

Dans le cas d'un cyclone les dispositions de la Workers' Rights Act sont claires en cas d'alerte 3 ou 4 ou de bulletin de sécurité émis sous les Mauritius Meteorological Services (Warnings) Regulations 2023, toutes les entreprises privées sont fermées, sauf les services essentiels. Idem pour le secteur public, comme les hôpitaux, où l'on assure un service minimum. L'employé a droit à une rémunération au taux normal, et les entreprises peuvent rouvrir leurs portes lorsque l'alerte cyclonique de classe 3 ou de 4 est levée, ou qu'un termination bulletin est émis par la station météorologique, L'employeur fournit un moyen de transport au travailleur pour qu'il puisse se rendre sur son lieu de travail ou que des transports publics sont disponibles.

En 2020, la Workers' Rights Act a été amendée par la Covid19 (Miscellaneous Provisions) Act pour inclure l'article 17A, c'est-àdire le travail à domicile, et cette disposition a été renforcée en 2023. En outre, l'article 32 de la loi, qui traite de la rémunération dans d'autres circonstances spécifiques, la partie (1A) stipule que lorsque, lors de conditions météorologiques extrêmes, y compris des pluies abondantes ou torrentielles, le comité national de crise émet une directive demandant à toute personne de rester à l'intérieur, ou qu'une catastrophe est signalée sous la National Disaster Risk Reduction and Management Act, un employeur ne doit pas exiger d'un travailleur qu'il se présente au travail, ou qu'il continue à travailler lorsqu'il est exposé à ces conditions météorologiques.

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La partie (b) de cet article 32 traite de la rémunération dans des conditions météorologiques extrêmes, stipulant qu'un employeur doit payer à l'employé une journée entière de rémunération lorsque le travail ne peut intégralement être effectué en raison des conditions météorologiques ou que le travailleur reprend le travail pour au moins deux heures. L'employeur doit payer son travailleur pour une demi-journée si le travail a été interrompu avant que ce dernier n'ait accompli deux heures de travail ou si le travailleur reprend le travail pour moins de deux heures.

Difficultés dans la pratique des employés

À l'approche de Candice, pour le secteur public, y compris les corps parapublics, les compagnies gouvernementales et les collectivités locales, le ministre de la Fonction publique a accordé un jour de congé, mardi, dans l'intérêt de la sécurité des fonctionnaires. En revanche, Business Mauritius n'a pu que recommander aux employeurs du secteur privé de privilégier le télétravail, d'éviter que les employés ne se rendent dans les zones à risques et de suivre le protocole établi pour les fortes pluies.

Un casse-tête pour des mamans comme Louise, qui ne peut pas travailler à domicile et qui se demande quelle autorité doit être tenue pour responsable au cas où elle serait victime des intempéries. «Mes responsabilités professionnelles impliquent des tâches telles que répondre aux demandes des clients en personne et au téléphone, et assurer le suivi des activités quotidiennes de l'entreprise, ce que je ne peux pas faire à distance. En l'absence d'une directive claire pour les employés du privé, mon époux, qui travaille également dans une entreprise privée, et moi-même avons dû nous présenter au travail. Si nous n'y étions pas allés, nous aurions perdu un jour de congé ou notre salaire aurait été déduit. Nous avons laissé notre fille adolescente seule à la maison.»

Louise affirme que le 15 janvier, «while public employees were ordered to be released ahead of a cyclone warning class 3, at her company, we were told that it didn't apply to us, even if an appeal was made for private sectors to release us, and we had to work until a cyclone class 3 was issued. Finally after deliberation, at 12.45 a.m., I was able to leave». Elle ajoute : «Lorsqu'il s'agit de sécurité, ne devrait-il pas y avoir un seul type de lois pour l'ensemble de la classe ouvrière ? Sommes-nous moins humains ?»

Pour d'autres, comme M.H., qui travaille dans une entreprise privée réputée qui gère des clients étrangers, si le travail à domicile est envisageable, il comporte son lot de complications pour garantir la confidentialité et la sécurité des données. «Notre entreprise gère des clients français et américains, entre autres, et mon travail implique la gestion d'informations sensibles sur les investisseurs, les projets et les contrats.

Pour pouvoir travailler à domicile, je dois exclusivement utiliser un ordinateur fourni par l'entreprise, configuré de manière à ce que je ne puisse pas insérer de câble de connexion externe ou un pen-drive. Je me connecte à l'aide d'une carte de sécurité et je dispose d'une application téléphonique qui me met en relation avec le responsable du projet, qui approuve ensuite mon accès à la connexion et surveille mes activités. Je dois également utiliser un VPN pour accéder aux données du cloud server, ce qui peut réduire la vitesse du réseau wifi. Pour y remédier, l'entreprise nous offre une connexion d'au moins un gigabyte. Tout cela, pour assurer l'efficacité du travail et la protection des données.»

M.H. évoque le fait que toutes les entreprises ne peuvent pas se permettre d'investir dans de tels outils pour les employés. «Travailler à domicile implique des réunions en ligne avec des clients étrangers, alors que ma femme travaille également sur son ordinateur et que mes enfants font du bruit. Alors que dans le secteur public, le ministère peut prendre ses responsabilités et arrêter les services autres qu'essentiels pendant une journée, les entreprises privées sont orientées vers le profit. Vous ne pouvez pas vous permettre d'expliquer à un Américain, par exemple, que vous ne pouvez pas livrer ou traiter une commande à cause du mauvais temps.

La réponse classique est : 'Ce n'est pas notre problème ; nous travaillons même quand il neige; nous vous payons et votre entreprise peut investir pour que vous travailliez en toute sécurité.' Un jour de congé implique une perte de revenus et de clientèle, et les employeurs préféreraient même vous envoyer un moyen de transport, pour s'assurer que vous êtes au bureau, quel que soit le danger météorologique, si vous n'êtes pas en mesure de travailler à domicile.»

M.H. ajoute que «dans le secteur privé, le salaire est plus élevé, mais la charge de travail est accrue et il n'y a pas de sécurité d'emploi. Si l'entreprise perd des revenus, vous perdez votre emploi, alors que dans le secteur public, même pendant le Covid, les employés percevaient un salaire fixe. Après la pandémie, les entreprises ne peuvent surtout pas se permettre de subir des pertes. Chaque côté a ses propres défis».

Même son de cloche d'un fonctionnaire qui explique que «dans de tels cas de décisions soudaines prises le matin pour la sécurité des travailleurs, vu l'évolution des conditions cycloniques, beaucoup ne sont pas équipés d'ordinateurs fournis par leur bureau pour accéder au système et aux serveurs du gouvernement. Lorsque le travail à domicile comporte des risques de violation de la confidentialité ou de fuite de données, il est compréhensible d'interrompre les activités et de ne faire fonctionner que les services essentiels».

Narendranath Gopee: «les employeurs du secteur privé ne doivent pas jouer la carte de l'ignorance»

Face aux multiples communiqués et décisions, les employés peuvent se retrouver stressés et confus. Il y a une nuance fondamentale à faire à ce stade entre l'État et le gouvernement, souligne Narendranath Gopee, président de la National Trade Union Confederation. «Des entités telles que le National Emergency Operations Command (NEOC), le National Crisis Committee (NCC) et le National Disaster Risk Reduction and Management Council sont gouvernementales et leurs décisions s'appliquent aux employés des secteurs public et privé. Lorsque le ministre le préside, il représente le gouvernement et les décisions prises par le NEOC sont nationales et non sectorielles. En revanche, la fonction publique représente l'État, employeur de tous les salariés du secteur public et non du privé. Lorsque le ministère de la Fonction publique décide de libérer ses employés, il ne parle que des fonctionnaires.»

Narendranath Gopee souligne également qu'une grande lacune subsiste : alors que pour le secteur public, l'État contrôle tout, dans le secteur privé, il n'y a pas d'entité commune pour donner des directives. «Business Mauritius n'est qu'une fédération d'employeurs qui peut conseiller, mais ne peut pas donner de directives. Ainsi, si un employeur du secteur privé peut libérer ses travailleurs, un autre ne le fera pas. Cependant, nous avons le NEOC qui peut donner des directives nationales applicables à la sécurité de tous les employés.»

Le syndicaliste appelle les employeurs du secteur privé à ne pas jouer la carte de l'ignorance délibérée. «Dans de tels scénarios, les employeurs disent souvent pa mwa sa, li sa.» Le ministère de la Fonction publique veille à la sécurité de ses employés en l'absence de directives du NEOC ou du NCC, les employeurs du secteur privé disent qu'ils n'ont pas reçu d'instructions. Au centre de tout cela, l'employé s'interroge sur la valeur de sa vie. «En cas de décès, nous nous rejetons la faute les uns sur les autres. Les employeurs devraient eux aussi prendre des décisions et équilibrer l'objectif de profit et le coût de la vie humaine.»

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