Sénégal: La présidentielle reportée au 15 décembre 2024

6 Février 2024

La loi a été adoptée lundi nuit par les députés présents dans l'hémicycle. L'opposition invite le peuple à la désobéissance civile.

Le Parlement sénégalais a entériné dans une grande confusion le projet de loi visant à repousser la présidentielle au 15 décembre 2024, un vote qui plonge le pays dans l'inconnu et fait craindre une ébullition.

La loi a été adoptée dans la nuit de lundi à mardi à la quasi-unanimité, par 105 voix pour et une voix contre, après que les députés de l'opposition qui faisaient obstruction au vote ont été évacués manu militari par la gendarmerie.

Le président Macky Sall restera dans ses fonctions jusqu'à l'installation de son successeur, précise une autre disposition de la loi.

Le débat qui avait commencé lundi dans la matinée s'est poursuivi jusqu'en pleine nuit dans une ambiance électrique, des parlementaires en venant même aux mains dans l'après-midi.

"Cela ne passera pas"

"L'Assemblée nationale, le président de la République, ne peuvent pas reporter une élection présidentielle, seul le Conseil Constitutionnel peut reporter une élection présidentielle, et même ce report-là est très encadré. Donc ce qui nous réunit ici est tout simplement anticonstitutionnel, c'est pourquoi je dis que aujourd'hui nous assistons à une tentative de fomenter un coup d'état constitutionnel, un putsch constitutionnel", dit le député et l'opposant Guy Marius Sagna.

L'opposition entend saisir le Constitutionnel. Elle en appelle aussi à la rue.

"Le peuple sénégalais avait fermé la porte du troisième mandat illégal et illégitime. Le président de la République est en train d'essayer de passer par la fenêtre pour avoir un troisième mandat illégal et illégitime, et cela ne passera pas. Cela ne passera pas, c'est pourquoi on a invité le peuple sénégalais à la désobéissance civile. Car à une loi injuste, à une annulation électorale injuste, à un report électoral injuste, nul n'est tenu d'obéir et nous n'allons pas obéir", ajoute Guy Marius Sagna.

"Une élection présidentielle apaisée"

Le président Macky Sall a justifié le report du scrutin par un différend entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel.

"Nous faisons face à une crise institutionnelle dans la mesure où des juges sont accusés de corruption, dans la mesure où notre candidat est accusé de corrompre des juges et également dans la mesure où des candidats spoliés ont demandé à ce que véritablement la lumière soit faite", explique Adji Mbergane Kanouté, député de la majorité présidentielle.

C'est la première fois depuis 1963 qu'une présidentielle au suffrage universel direct est reportée au Sénégal, un pays qui n'a jamais connu de coup d'Etat.

Pour le correspondant de la DW à Dakar, "la majorité des Sénégalais vivent le vote de cette loi comme une trahison au sommet de l'Etat même s'ils disent ne pas être surpris par cette situation".

L'Allemagne dit observer avec "inquiétude et grande attention les développements au Sénégal. Il est de la responsabilité du gouvernement de faciliter des élections transparentes et inclusives dans le respect des normes de l'État de droit. Nous sommes d'accord avec la Cédéao et l'UA sur ce point", dit un porte-parole du gouvernement allemand.

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