Mobilisation des recettes fiscales dans les pays en développement
Le caractère durable de l'augmentation des recettes reste fragile face aux chocs
«Les pays en développement ont progressé dans la mobilisation des recettes fiscales durant ces dernières décennies, mais il reste beaucoup à faire », estiment les services du Fonds monétaire international (FMI) dans une récente note de réflexion.
«Les recettes fiscales ont progressé dans les pays en développement à faible revenu (PDFR), avec une augmentation des ratios impôts/PIB moyens d'environ 3,5 points de pourcentage depuis les débuts des années 90 pour atteindre 13,8% en 2020 », souligne la note préparée sous la haute autorité de Katherine Baer et Ruud de Mooij.
Selon le document, qui offre des enseignements et des orientations pratiques sur la base de l'expérience acquise par le FMI en matière de renforcement des capacités dans ce domaine, la situation varie selon les pays et le caractère durable de l'augmentation des recettes reste fragile face aux chocs.
Quoi qu'il en soit, de l'avis des auteurs de ce document, Juan Carlos Benitez, Mario Mansour, Miguel Pecho et Charles Vellutini, il est matériellement possible d'augmenter de 9 points de pourcentage le ratio impôts/PIB en réformant le système fiscal et en renforçant les capacités institutionnelles.
Une assurance confortée par les nouvelles données empiriques figurant dans ledit document qui laissent penser qu'une nouvelle augmentation notable est possible.
Améliorer les institutions administrant le système fiscal
Pour atteindre cet objectif, il faudra tout de même s'engager fermement à améliorer les institutions qui administrent le système fiscal et gèrent sa réforme et à perfectionner la conception des impôts de base.
D'après les auteurs, il est nécessaire d'adopter une approche holistique et institutionnelle axée sur l'amélioration de la politique, de l'administration et de la mise en oeuvre juridique des impôts de base.
Des enseignements et orientations pratiques sur la manière d'améliorer la capacité fiscale sont ainsi livrés dans cette note qui assure que les PDFR peuvent augmenter leur ratio impôts/PIB de 6,7 points de pourcentage en moyenne pour réaliser pleinement leur potentiel, compte tenu des institutions et des structures économiques actuelles.
« En amenant ces dernières au niveau des pays émergents (PE), la réforme institutionnelle peut leur faire gagner 2,3 points supplémentaires », expliquent les auteurs indiquant que le total, à savoir 9 points de pourcentage du PIB, permettrait à l'Etat de jouer pleinement son rôle dans le développement durable, inclusif et résilient.
Pour Juan Carlos Benitez, Mario Mansour, Miguel Pecho et Charles Vellutini, cette augmentation des recettes nécessite de renforcer la conception des impôts de base (TVA et accises, impôts sur le revenu des personnes physiques et impôts sur les sociétés).
Réformer les dépenses fiscales inefficaces
D'après ces derniers, l'accent doit être mis sur l'élargissement de l'assiette fiscale par la réforme des dépenses fiscales inefficaces, une imposition plus neutre des revenus du capital et une meilleure utilisation de l'impôt foncier, en tenant compte à la fois de l'efficacité et de l'équité.
Les services du FMI estiment aussi que l'amélioration des institutions qui administrent le système fiscal et gèrent sa réforme est essentielle si l'on veut obtenir des résultats.
Ainsi, ils recommandent la création d'unités de politique fiscale adéquates chargées de prévoir et d'analyser l'incidence des politiques fiscales sur tous les aspects de la politique économique, l'amélioration de la professionnalisation des fonctionnaires responsables de la conception et de la mise en oeuvre des impôts ainsi qu'une meilleure utilisation des technologies numériques pour renforcer les administrations fiscales. Sans oublier la clarté dans la façon dont la politique et l'administration sont transposées dans la législation.
En plus de ces recommandations, la note estime que la capacité fiscale doit continuer à reposer au premier chef sur l'amélioration de la conception et de l'administration des impôts nationaux de base. Et de noter : la coopération internationale dans l'imposition des bénéfices des entreprises multinationales, bien qu'importante, est insuffisante pour répondre aux besoins des PDFR en matière de recettes et ne doit pas détourner l'attention de l'objectif plus général de renforcement de la capacité fiscale au service du développement.
Rappelons que la capacité fiscale, c'est-à-dire les capacités politiques, institutionnelles et techniques à lever des impôts, est un aspect fondamental du rôle de l'Etat dans le développement. Elle fait également partie intégrante de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), de la lutte contre le changement climatique et de la viabilité de la dette, comme cela est indiqué dans la note.
Alain Bouithy