Madagascar: WC en temps de choléra

«Le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l'ingestion d'aliments ou d'eau contaminés par le bacille Vibrio cholerae», peut-on lire sur le site de l'OMS. «Les principaux facteurs favorisant la transmission sont le niveau socio-économique et les conditions de vie des populations. Les fortes concentrations de population associées à une hygiène défectueuse jouent un rôle important dans l'apparition et le développement d'une épidémie de choléra» précise l'Institut Pasteur.

Cette maladie sévit actuellement aux Comores, dont les ressortissants sont interdits d'accoster et de débarquer à Majunga pour quinze jours. Le ministère de la Santé recommande de laver soigneusement les fruits et légumes et d'éviter la défécation à l'air libre. Mais, en guise de cabinet de toilettes, le dessin affiche de désespérantes latrines.

Je me souviens encore que c'est seulement à l'occasion de la «Journée 2010 de l'eau» que l'école primaire publique d'Antanimena, un quartier de la Capitale Antananarivo, avait reçu «lave-mains, latrines et douches». Quatorze ans plus tard, il arrive encore trop souvent que les équipements offerts, parfois sur financement d'organismes extérieurs, se contentent de tinettes du tiers-monde.

Des latrines, c'est déjà mieux que rien du tout m'objecterait-on. Sauf que nous sommes en 2024, cent cinquante quatre ans après les premières vespasiennes. On sait, pour s'en étouffer, l'odeur fétide des antiques latrines et son cortège de mouches bleues vagabondes. D'ailleurs, chaque Salon, chaque foire, chaque concert, chaque bistrot, chaque troquet, chaque snack, chaque «vary mitsangana», devrait être inauguré par ses WC !

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L'affaire des besoins naturels est prise très au sérieux puisqu'une capitale internationale comme Paris répertorie ses 435 sanisettes sur une carte accessible depuis un téléphone portable. On est très loin des vespasiennes que Fernandel reprenait à son compte dans «Topaze», écrit par Marcel Pagnol en 1928. La vespasienne, et sa pollution méphitique, tient son nom de Vespasien, empereur romain de 69 à 79, qui s'avisa de prélever un impôt sur l'urine qu'on donnait à fouler à des esclaves spécialisés dans le tannage des peaux ou le blanchissage du linge : auparavant, les foulons collectaient l'urine en installant de grandes cuves devant leur boutique et que remplissaient les passants dans le besoin. Cette collecte était gratuite jusqu'à ce que Vespasien taxe l'urine, laissant à la postérité cet adage «l'argent n'a pas d'odeur».

«Sanisette» fut d'abord une marque commerciale déposée par la société JCDecaux, plus connue pour ses panneaux et abribus publicitaires, mais pourtant conceptrice de cette cabine de toilette publique dont le nom de marque est devenu le générique. C'est le 10 novembre 1981, à l'époque de Jacques Chirac comme Maire (ce qui lui valut des tags irrévérencieux «Chie...raque») que Paris fut la première ville à les installer. D'abord payantes, au prix d'1 Franc, elles ont été rendues gratuites depuis 2006.

Haut niveau de professionnalisme que l'entretien régulier du mécanisme, le remplacement immédiat des pièces endommagées, le ravitaillement permanent en consommables (papier, savon, désodorisant), la vidange de la poubelle, le nettoyage extérieur. Le nettoyage automatique du siège d'une cuvette des WC et sa désinfection ne sont pas uniquement dédiés au confort de la miction des femmes. Une fois seulement légitimés par ces efforts salutaires, les pouvoirs publics pourront brandir, et appliquer, des amendes dissuasives contre les pipis et cacas sur la voie publique.

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