Burkina Faso: Assurance des risques de la construction - Une obligation légale « en souffrance »

13 Février 2024

Depuis 2006, la loi burkinabè a rendu obligatoire l'assurance des risques de la construction. Deux décennies après, cette obligation peine à être respectée. Pourtant et de plus en plus, des édifices publics et privés s'écroulent avec leur lot de victimes et de dégâts matériels. Les conséquences du phénomène sont nombreuses, les causes et les responsabilités aussi. Toutefois, des leviers ne manquent pas pour inverser la donne.

Nous sommes dans la nuit du 6 au 7 juin 2023. Une nuit triste pour la famille Convolbo résidant sur l'avenue Yennenga dans la Zone d'activités commerciales et administratives (ZACA) de Ouagadougou. Membre de cette famille et élève en classe de 3e

, Sakina Ilboudo était candidate à l'examen du Brevet d'études du premier cycle (BEPC), session 2023. Le mardi 6 juin 2023, après avoir composé la dernière épreuve de l'examen, elle regagne son domicile. Malheureusement, Sakina ne connaitra jamais les résultats de son examen. Entrée se coucher pour une première longue nuit de repos et de récupération, elle ne se réveillera plus jamais.

La cause, un immeuble R+5 en construction, presque au stade de finition, s'écroule sur sa maison aux environs de 21 heures. Après environ trois heures de fouille de l'important amas de gravats, c'est son corps sans vie qui sort des décombres ! Tout comme elle, le mari de sa tante, Ibrahim Convolbo, âgé d'environ 50 ans, père de cinq enfants dont quatre mineurs, est également resté sous les ruines de l'immeuble. Sa tante, Mme Convolbo, a eu la vie sauve, tout comme son bébé d'à peine un an. Mais, elle est touchée à la colonne vertébrale ; ce qui lui a valu une intervention chirurgicale dans un hôpital de la place. Le drame a ébranlé la famille Convolbo. Outre les deux pertes en vie humaine et les deux blessés, les dégâts matériels sont « énormes », confie un membre de la famille. Huit mois après le drame, la famille est encore sous le choc.

Chantiers de « drames »

Le 31 août 2021, c'est Koudougou, chef-lieu de la région du Centre-Ouest, située à une centaine de kilomètres de Ouagadougou, qui a fait l'actualité nationale. La dalle de l'immeuble devant abriter le foyer de la cité de l'université Norbert-Zongo a cédé. Le bilan humain est lourd. Quatre vies fauchées : Baba Ibrahim Compaoré (23 ans), Serge Alexandre Kaboré (23 ans) et Mounira Nana (23 ans). Ils sont tous étudiants en année de Licence à l'Institut universitaire de technologie de ladite université et en stage pratique sur le chantier.

A ces trois s'ajoute Agbo de Ivon, manoeuvre de nationalité béninoise, employé de l'entreprise chargée des travaux de construction. Stéphane Nonkané, lui aussi étudiant-stagiaire sur le chantier, a eu plus de chance que ses camarades. Il est sorti vivant des décombres. Aujourd'hui, les familles des victimes sont encore sous le choc, fait

savoir le père du regretté Baba Ibrahim Compaoré et représentant des parents des victimes, El hadj Issa George Compaoré, retraité depuis 2002. « Jusqu'à présent, ma femme, la mère de Baba

Ibrahim, est instable psychologiquement. Elle est devenue très nerveuse. Pour un rien, elle

s'emporte », confie-t-il, la voix nouée. Le 30 décembre 2022, la région du Plateau central offrait au Burkina, un autre feuilleton de drame lié aux constructions. En effet, aux environs de 15 heures sur le site de construction de l'aéroport international de Donsin, à une trentaine de kilomètres de Ouagadougou, la dalle d'un bâtiment en construction s'est effondrée sur des ouvriers. Cet incident a fait sept morts et dix blessés. La liste

des édifices publics et privés qui se sont effondrés est longue.

Protéger les populations

Le débat sur ces chantiers de « drames » occulte très souvent le respect de l'assurance des

risques de la construction. En effet, le droit positif burkinabè, en l'occurrence la loi n°017-2006/AN du 18 mai 2006 portant Code de l'urbanisme et de la construction au Burkina, a rendu obligatoire la souscription à une police d'assurance à l'effet de couvrir les risques liés aux constructions d'ouvrages (bâtiments, immeubles, routes, ponts, échangeurs, châteaux, etc.). L'article 53 dudit Code dispose que « le constructeur, à l'ouverture de tout chantier, doit souscrire un contrat d'assurance couvrant les risques encourus.

Ce contrat d'assurance est, sauf toute stipulation contraire, réputé comporter une clause assurant le maintien de la garantie pour la durée de la responsabilité pesant sur la personne assujettie à l'obligation d'assurance ». Et l'article 54 de préciser que « celui qui fait réaliser pour le compte d'autrui des travaux de bâtiment doit être couvert par une assurance de responsabilité, garantissant tout dommage résultant de son fait. Il en est de même lorsque les bâtiments sont construits dans le cadre d'une opération de promotion immobilière ».

Sont donc assujettis à cette obligation, les entrepreneurs, les architectes, les ingénieurs ou tout constructeur lié par un contrat de louage d'oeuvre. Six ans plus tard, pour rendre opérationnelles ces dispositions légales, le gouvernement a pris le décret n°2012-1005/PRES/PM/MEF/MHU, du 20 décembre 2012, relatif à l'assurance obligatoire des risques de la construction. Narcisse Dabiré est un cadre d'assurance. Il a fait partie de l'équipe technique de préparation dudit texte. « L'objectif de l'Etat est de permettre aux Burkinabè d'avoir cette possibilité de souscrire à une assurance liée aux risques de construction. Comme toute règlementation, le but ultime est de protéger les populations,

les tiers vis-à-vis des risques liés aux opérations de construction », explique-t-il.

Cette obligation, selon l'article 2 du décret, s'applique à tous les types de construction et de montage, à l'exception des maisons d'habitation dont la valeur est de moins 100 millions F CFA. Pour ce qui est des risques couverts, l'article 3 du décret dispose que cette obligation légale porte sur l'assurance tous risques chantiers, l'assurance tous risques montage-essai, l'assurance de responsabilité civile, l'assurance des dommages subis par l'ouvrage pendant la période de maintenance comprise entre la réception provisoire et définitive.

Enfin, l'obligation porte sur « l'assurance de responsabilité civile décennale couvrant les dommages subis par l'ouvrage résultant même d'un vice de sol, et qui trouvent leur origine dans les gros oeuvres compromettant la stabilité ou la solidité de l'ouvrage ».

Elle est souscrite dans les 30 jours précédant la signature des procès-verbaux de réception

définitive. Toujours dans le but de renforcer le texte règlementaire, deux ans après son adoption, les ministres en charge de l'économie et de l'habitat ont pris un arrêté conjoint portant modalité de contrôle de l'obligation de l'assurance des risques de la construction, le 11 septembre 2014.

« Les contrats d'assurance des risques de la construction sont des documents obligatoires pour l'obtention du permis de construire », indique l'article 2 de l'arrêté. Ces différentes obligations assurancielles sont reprises dans la règlementation des marchés publics, notamment dans le Cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables à tous les marchés et le Cahier des clauses administratives particulières (CCAP).

Une situation criante pour les ouvrages privés

« La règlementation est très explicite. L'article 7 du CCAG précise que les dossiers d'appel d'offres doivent exiger les assurances obligatoires qui doivent être présentées par l'entrepreneur au chef de projet pour approbation puis souscrites par l'entrepreneur avant tout commencement des travaux », détaille le directeur du contentieux et des enquêtes à l'Autorité de régulation de la commande publique (ARCOP), Moïse Bakorba. Et toute autorité contractante, ajoute-t-il, qui monte un dossier de marché public de construction sans ces exigences assurancielles sera tenue pour responsable.

Malgré cet arsenal juridique, l'obligation semble très peu respectée, comme en témoignent lesacteurs. « L'assurance des risques de la construction n'est pas appliquée, sinon très faiblement », confie le secrétaire général du Syndicat national des travailleurs des travaux publics, du bâtiment, de l'hydraulique et assimilés (SYTTBHA), Boureima Maïga. « Certes, il n'y a pas de données statistiques qui permettent d'indiquer clairement que les gens souscrivent ou pas à l'assurance construction, mais à travers nos contrôles habituels, nous n'avons pas encore rencontré un constructeur qui dispose de l'assurance construction », renchérit le directeur général de l'Office national du contrôle des aménagements urbains et des constructions (ONC-AC), Yacouba Siko.

Narcisse Dabiré précise que les quelques cas où cette obligation assurancielle est respectée

viennent le plus souvent des constructions réalisées par l'Etat ou les partenaires techniques et financiers. Là aussi, pour certains marchés publics de l'Etat de moindre envergure, comme la construction des écoles, ces assurances obligatoires sont absentes, confie M. Bakorba. La situation semble plus criante lorsque qu'il s'agit des ouvrages privés. « A ce niveau, l'assurance n'est généralement pas respectée », soutient le gérant d'entreprise de BTP, Harouna Natama. Ce constat peu reluisant contraste avec l'importance de l'assurance, en tant qu'instrument de sécurisation des investissements, de couverture sociale.

Pour le directeur de la règlementation, des marchés et de la statistique du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme, Moctar Sawadogo, la souscription à l'assurance des risques de la construction présente des avantages pour tout le monde. Pour les cas d'édifices qui s'écroulent, affectent les tierces personnes, endommagent leurs biens, engendrent

des pertes en vie humaine, énumère-t-il, il y a des compensations, des dédommagements couverts par l'assurance pour les victimes ou leurs ayants droit. « Lorsque vous mettez des centaines de millions ou des milliards F CFA dans une construction qui s'effondre, c'est une perte totale si l'ouvrage n'est pas assuré », ajoute-t-il.

Pertes de recettes fiscales

La reprise des travaux à ses frais, du fait du défaut d'assurance, poursuit M. Sawadogo, peut conduire l'entreprise en charge des travaux à la faillite, avec toutes les conséquences

socioéconomiques qui vont avec. Pour M. Natama, cette assurance participe au besoin de sécurité de toute entreprise, met toutes les parties prenantes à l'abri du risque. « Lorsque les ouvriers savent que le chantier est couvert par toutes les assurances nécessaires, ils se donnent à fond pour la bonne exécution des travaux », confie-t-il.

« L'Etat est souvent obligé de refinancer la construction ou la réhabilitation des infrastructures publiques, notamment éducatives. Pour un pays en guerre contre le terrorisme comme le Burkina, ces pertes de deniers publics dues à la violation de la règlementation assurancielle ne sont pas tolérables », fulmine le secrétaire général du SYTTBHA. Mieux, estime-t-il, le respect de cette obligation assurancielle aurait permis à l'Etat, dans ce contexte de crise sécuritaire et humanitaire sans précédent, d'engranger d'importantes recettes fiscales, car chaque police d'assurance est frappée d'une taxe de 12%, sans oublier que les sociétés d'assurance payent des frais de contrôle correspondant à 1,5% de leur chiffre d'affaires.

Le faible respect de l'obligation d'assurance entraîne un manque à gagner considérable de primes d'assurance à collecter, avec pour conséquence un affaiblissement de la contribution du secteur des assurances dans le Produit intérieur brut (PIB) national, et partant, un taux de pénétration insensible d'année en année, conclut la directrice des assurances au ministère de l'Economie, Mamou Ouédraogo. Boureima Maïga est de ceux qui soutiennent que la mise en application de cette assurance constitue un moyen d'assurer le respect des règles techniques de construction, et partant, la solidité et la durabilité des ouvrages réalisés par les entreprises.

« La souscription de l'assurance garantit la qualité des infrastructures, car les exigences en termes de compétences techniques, de qualifications requises des ingénieurs, des techniciens que le constructeur doit engager, seront respectées, ainsi que la qualité des matériaux utilisés. Nous avons l'exemple d'une école effondrée où les investigations de l'ASCE-LC ont révélé que le contrôleur était un élève de Tle, alors que les textes exigent un ingénieur.

Je ne vois pas une compagnie d'assurance accepter un tel contrôleur sur un chantier dont elle couvre le risque de sinistre », fait-il remarquer. Pour la directrice des assurances au ministère en charge de l'économie, cette obligation « pourtant

avantageuse » peine à être appliquée convenablement du fait de la faible communication sur cette assurance, de l'insuffisance du contrôle « sur place et sur pièces » et de la faiblesse de la culture d'assurance des populations en général.

« Une culture de maximisation des profits »

Pourtant, pour ce qui est du contrôle, l'arrêté conjoint de 2014 (article 5) précise qu'il est exercé par des agents dûment habilités des ministères en charge des assurances et de la construction. Et selon l'article 3, la présomption qu'il a été satisfait à l'obligation d'assurance, résultera de la présentation, aux agents chargés de constater le respect de la règlementation en matière de construction, de l'un des documents suivants : une attestation d'assurance en cours de validité ou un document signé par le ministre en charge des assurances.

« Un autre aspect très important est que cette assurance obligatoire n'est pas exigée parmi les documents demandés pour la délivrance du permis de construire », souligne le président de l'Association professionnelle des sociétés d'assurances du Burkina (APSAB), Mohamed Compaoré. Il impute également la situation à la non- prise de sanctions pourtant prévues en cas de violation de cette obligation.

Alors que l'article 220 du Code de l'urbanisme et de la construction stipule que quiconque fait entreprendre, implanter, modifier ou fait modifier des constructions ou installations sans permis de construire ou en violation des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, est puni d'une amende de 200 mille F CFA à deux millions F CFA, les constructeurs ou toute autre personne ayant concouru à l'exécution desdites constructions ou installations sont punis des mêmes peines.

Pour M. Maïga, le phénomène s'explique aussi par « une certaine culture de maximisation des profits » chez les entrepreneurs qui perçoivent l'assurance comme une charge supplémentaire qui réduit leurs bénéfices. M. Bakorba, pour sa part, pointe du doigt la responsabilité des autorités contractantes, c'est-à-dire les administrations publiques, dans la violation de la réglementation assurancielle. « Le non-respect de cette obligation est beaucoup plus imputable aux autorités contractantes qu'aux entreprises.

Les entreprises souscrivent aux assurances lorsqu'elles sont prévues dans les CCAG et les CCAP », martèle-t-il. Et tant qu'on n'exigera pas l'assurance dans les marchés publics, le respect de cette obligation posera toujours problème, renchérit le président de l'Association

professionnelle des courtiers d'assurance du Burkina (APCAB), Hassane Lamizana. Et la faible culture de recours au contentieux judiciaire en matière d'assurance construction, selon M. Bakorba, participe également à alimenter la persistance de la violation de la réglementation assurancielle.

Au-delà de l'Etat, chacun doit avoir une culture assurancielle, estime l'enseignant- chercheur en assurance à l'université Thomas-Sankara, Abel Tiemtoré. « Le risque est une notion complexe. On ne le perçoit pas lorsqu'il ne se produit pas, et quand il survient, c'est déjà trop tard », argumente-t- il. Boureima Maïga n'occulte pas la responsabilité des assureurs. « Pour les autres produits, ils font la publicité, vont vers les assurés, en oubliant l'assurance des risques de la construction qui est portant rentable », déplore-t-il.

Impliquer toutes les parties prenantes

Pour que l'assurance joue un rôle de catalyseur du développement au Burkina Faso, il y a des leviers à actionner, conviennent les acteurs. « Il faut intensifier la communication à travers tous les supports et canaux de communication, de sorte à marquer les esprits et que cela entre dans les habitudes de tout le monde », se convainc le secrétaire général du SYTTBHA. Et ce, tout en activant le contrôle et la répression, conformément aux textes malgré leurs limites.

« Les dispositions de la loi sur l'assurance des risques de la construction sont minimes, il n'y a que trois articles y relatifs. Il faudrait aller plus loin de sorte que le défaut d'assurance soit puni à la hauteur de l'infraction », préconise M. Siko.

Le renforcement des sanctions, suggère M. Maïga, pourrait inclure l'arrêt du chantier pour défaut d'assurance. Mais pour susciter un engouement pour l'assurance, M. Natama préconise de revoir à la baisse les coûts des primes, qu'il trouve chers, afin qu'elles soient accessibles à tous. Cela, recommande M. Bakorba, pourrait passer par l"encadrement juridique des taux des primes d'assurance, de sorte à ne pas laisser la liberté totale aux compagnies privées de les fixer.

Pour que toutes ces actions produisent les effets escomptés, il est nécessaire d'avoir une approche participative et inclusive, en impliquant donc toutes les parties prenantes, selon M. Lamizana. Il suggère également l'instauration d'un cadre de concertation entre tous les acteurs, notamment le ministère de l'Habitat, celui de l'Economie, les compagnies d'assurance, les entreprises, les techniciens, pour évaluer l'état de mise en oeuvre du décret et envisager la relecture des textes.« Cette synergie pourrait faciliter la collecte des informations, des renseignements pour un meilleur contrôle, une application optimale de cette obligation. Et aujourd'hui, la digitalisation offre des possibilités », conclut M. Lamizana.

L'explication sociologique de la résistance à l'assurance, selon l'enseignant-chercheur Salfo Ouédraogo

S : Qu'est-ce qui explique, sociologiquement, le non-respect de l'assurance des risques de la construction ?

Salfo Ouédraogo (S.O.) : Le faible engouement pour l'assurance fait appel à plusieurs éléments d'analyse. Les premières sociétés d'assurances, notamment les sociétés mutuelles avaient un fondement sociologique. Elles avaient un mode de gouvernance infra ou extra-étatique, visant à combler le vide laissé par l'affaiblissement de la solidarité mécanique qui s'est substituée à la solidarité organique, dans une société atomisée, s'individualisant de plus en plus. Les populations ont une certaine représentation sociale des sociétés d'assurance, considérées comme un produit du capitalisme financier. Les assureurs sont perçus comme des homo economicus, c'est-à-dire des agents sans attache sociale, préoccupés par la logique de maximisation de leurs profits ; mais aussi comme des homo frauda tors, des gens ayant des logiques mensongères, de manipulation afin de gruger les populations.

Ces constructions sociales, doublées des expériences personnelles, font que les populations ne sont pas réceptives du système d'assurance. Le deuxième facteur de résistance conduit à une analyse sociologique du risque. Chaque organisation sociale a un portefeuille de risques conforme à ses valeurs. Selon ces valeurs sociales, construire sans assurance n'est pas perçu comme un risque. C'est plutôt le fait de prévoir les éventuels sinistres qui constitue une façon, non seulement, de se souhaiter implicitement que le risque advienne, mais aussi de défier le créateur. Dans nos sociétés traditionnelles, pour implanter une maison, il y a des normes à observer ! Des sacrifices sont souvent faits pour garantir la sécurité de la maison.

S : Peut-on continuer à s'adosser à ces logiques traditionnelles ?

S.O. : Le gros défi aujourd'hui est de travailler à asseoir l'assurance moderne comme une norme sociale, un élément culturel. Il faut un travail de marketing social, si l'on veut l'adhésion des populations au système assuranciel actuel. Travailler donc à opérer un déplacement de normes afin que ces produits assuranciels soient intégrés dans nos habitudes culturelles.

S : Que faire pour parvenir à ce changement de paradigme ?

S.O. : Un travail de marketing social qui va se charger d'une sensibilisation constante, d'une communication dynamique, à l'effet d'éliminer les contradictions avec nos us et coutumes. Il y a des gens qui s'engagent dans des projets de construction sans connaitre cette obligation ! Pour que ce marketing social prenne, il faut s'appuyer sur nos ressorts culturels de protection des biens, des personnes. Les compagnies d'assurance devraient aussi travailler à anoblir leur image, à fonctionner comme une communauté mutuelle où les uns et les autres mutualisent leurs moyens pour faire face aux risques. De la manière qu'elles fonctionnent aujourd'hui, la dimension solidarité

n'est pas perçue. Elles fédèrent des gens qui ne se connaissent pas, qui participent à grossir le capital. Mais lorsqu'un problème survient, vous êtes seul face à votre destin. Sur la base du contrat, l'assureur vous versera vos dommages, sans compassion ! Alors que, selon les sociologues, tout n'est pas contractuel dans un contrat. Il faut donc mettre en perspective la dimension compassion, à travers la mise en place des cellules sociales au sein des compagnies ; tout en travaillant à faciliter la couverture du risque lorsqu'il survient. Imaginez la double souffrance d'un sinistré qui trime pour entrer en possession de ses droits !

1 185 permis de construire de plus de 100 millions F CFA délivrés en 2019- 2023

Selon les données de la Maison de l'entreprise du Burkina Faso (MEBF), de 2019

à 2023, 1 185 permis de construire dont la valeur estimative des travaux dépasse

100 millions F CFA, soit une moyenne de 237 permis par an sur la période, ont été délivrés à des particuliers ou des entreprises.

En 2023, le nombre de ce type de permis délivré était de 253 contre 276 en 2022. Selon une source du marché assuranciel burkinabè, le taux minimal de primes appliqué pour l'assurance tous risques chantiers est de 2,5 pour mille de la valeur de l'ouvrage. En application de ce taux minimal, les primes d'assurance tous risques chantiers pour les 1185 permis seraient de plus de 296 millions F CFA. Ce qui donnerait 35,5 millions F CFA de recettes fiscales sur la période.

 

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