Depuis l'annonce du décret abrogeant la convocation du corps électoral pour la tenue de l'élection présidentielle du 25 février prochain, l'économie Sénégalaise vit au ralenti. Une situation qui s'est aggravée à la suite des manifestations ayants entrainés la mort de trois jeunes. Pis, l'activité économique semble perdre sa vitalité, jour après jour, au point que des organisations du secteur privé (Cciad, Cnp, Mdes, Unacois Jappo, Unacois Yessal, Ges, Cdes, Cnes, Cis), réunis avant-hier mardi, autour de la situation politique et sociale tendue, ont invité les acteurs politiques à prendre en compte les implications de cette crise sur l'activité économique.
La crise politique que vit le pays depuis l'annonce d'un décret abrogeant celui portant convocation du corps électoral pour la tenue de l'élection présidentielle du 25 février 2024 impacte négativement l'activité économique. Jour après jour, l'activité économique roule au ralenti. Dakar, concentrant l'essentiel du dynamisme économique du pays, en souffre visiblement. Et le secteur marchand le démontre à suffisance. Pas d'affluence dans les grandes surfaces, ni dans les marchés, encore moins dans la circulation. Au marché de Castor, comme à Tilène, pas d'affluence, témoignent vendeurs et clients.
Modou Guèye, vendeur de légumes à Castor, cherche clients désespérément. «D'habitude, à 7 heures du matin, le marché grouille de monde. Mais, comme vous pouvez le constater, les gens ne sont pas là. Et ça, nous le ressentons jour après jour». En réalité, «tout le monde a peur de tomber au mauvais moment et au mauvais endroit», a-t-il poursuivi. «Les clients viennent au compte goute ; mais, ils nous pressent, surtout les femmes qui ont l'habitude de marchander». C'est dire que tout le monde a la peur au ventre. «Chacun joue à la prudence», explique-t-il. «Cette situation n'a que trop duré. Et si rien n'est fait, ça peut dégénérer à tout moment et l'économie en pâtira d'avantage», alerte-il.
Au marché de Tilène, la situation est identique à celle du marché de Castor. Woury Diallo, tablier de son état, appelle de tout voeu au calme. «Nous avons tous peur de la situation actuelle du pays. Le Sénégal a toujours été un havre de paix. Tout le monde se sent Sénégalais et sans exception. Mais, cette situation semble aller crescendo vers des lendemains incertains. Nous prions que les politiques jouent la carte du dialogue pour sortir le pays du bourbier».
LE TRANSPORT EN COMMUN SE CHERCHE
Avant-hier mardi, sur l'avenue du président Habib Bourguiba, la voie était toute libre. La circulation était fluide. Au rond-point Liberté 5, en passant par celui du Jet d'Eau, le dispositif de la Gendarmerie était impressionnant, comme l'atteste ce chauffeur de taxi clando. «Pourquoi, tout ce dispositif ? Sommes-nous en état de guerre ? J'aimerai bien que ce régime arrête de nous terroriser. Nous avons vraiment marre de ces gendarmes, policiers et tous leurs dispositifs qui décorent la capitale Sénégalaise. Ils sont dans toutes les intersections».
Ce dispositif sécuritaire sur l'axe Front de Terre - Ecole Normale - Université et un peu partout à Dakar, en dit long sur la situation de tension. Sur le même trajet, aux environs de 10 h 30 déjà, les élèves en tenue scolaire rebroussaient chemin. En cause, l'effectivité de l'appel au débrayage, les mardi 13 et mercredi 14 février 2024, lancé par des syndicats d'enseignants, pour la tenue de la présidentielle à date échue.
A Dakar, le transport en commun cherchait désespérément clients. Les habitants de la capitale Sénégalaises étaient restés chez eux, mardi, par mesure de prudence par rapport à la marche pacifique silencieuse annoncée par «Aar Sunu Election», le même jour, à 15 heures, mais interdite par l'autorité administrative de Dakar.
S'agissant du transport public de masse à savoir Dakar Dem Dikk (DDD), souvent cible de manifestants, aucun bus n'était visible dans les rues de Dakar. Ce qui constitue un vrai manque à gagner. Sur l'avenue Bourguiba, notamment à partir du Jet d'Eau jusqu'à l'ex-Ecole normale supérieure (ENS), itinéraire initialement prévu choisi pour la marche silencieuse de «Aar Sunu Election» (interdite par le préfet de Dakar), tout semblait interrompu. La circulation était fluide. Le commerce n'était pas au rendez-vous, les magasins étant fermés par endroits.
L'ÉCONOMIE DIGITALE PÂTIT
En ce qui concerne l'internet mobile, comme cela semble devenir une habitude, le droit du consommateur est bafoué. La connexion a été tout simplement coupée. Seuls ceux qui sont connectés au réseau wifi arrivaient à surfer. Mais, combien sont-ils à se faire un chiffre d'affaire à partir du digital ? Ce qui fait que modus operandi dégoute des consommateurs.
Trouvé assis, les yeux rivés sur son smartphone, Cheikh Fall n'en décolère pas. «Cette façon de couper la connexion est un vrai manque de respect aux consommateurs que nous sommes. Et surtout ceux qui y en font tout leur business», fait-il savoir. En 2024, «l'Etat n'a trouvé mieux que de priver les citoyens de leur droit fondamental et le plus élémentaire», se désole le friand des réseaux sociaux. Pire, ajoutera-t-il, «Cet Etat ne mesure même pas le manque à gagner. Ils n'ont de soucis que leurs propres intérêts...».
Déjà, réunis avant-hier mardi, autour de la situation politique et sociale tendue, les Organisations du secteur privé (Cciad, Cnp, Mdes, Unacois Jappo, Unacois Yessal, Ges, Cdes, Cnes, Cis), après avoir exprimé leurs vives inquiétudes, ont invité les acteurs à prendre en compte les implications politiques sur l'activité économique. Pis, l'Unacois Yessal, dans un communiqué rendu public, la veille lundi, sur cette décision «unilatérale» de report du scrutin, a montré que «L'économie nationale est fortement affectée, particulièrement celle dite informelle regroupant plus de 95% des acteurs et plus de quatre millions de nos concitoyens. L'accès à l'internet réduit fortement les libertés et les transactions financières, numériques et indispensables aux affaires».