Les autorités maliennes de transition ont affirmé, ce mardi 13 février au soir, avoir récupéré, grâce à une équipe d'experts informatiques bénévoles, des données d'état civil de la population qui étaient selon elles « prises en otage » par l'entreprise française Idemia. L'entreprise française Idemia réfute toute intrusion. L'opposant malien Ismaël Sacko dénonce une méthode illégale.
Dans une déclaration officielle transmise ce jeudi à RFI, l'entreprise française réfute toute intrusion et rappelle que « le ministère malien de l'Administration territoriale a toujours joui de l'usage du système et de ses données, et ce, depuis la fin des prestations contractuelles du groupe Idemia ». « Toutes les données sont stockées sur les serveurs dans des locaux administratifs sous la responsabilité des services affiliés au ministère, dont les agents bénéficiaient de tous les accès », répond encore l'entreprise française.
Autre réaction, politique cette fois, celle de l'opposant malien Ismaël Sacko, président du PSDA (Parti social démocrate africain, visé par une procédure de dissolution initiée par les autorités maliennes), et membre de la plateforme d'opposition « Appel du 20 février », qui rassemble les partis politiques et organisations de la société civile réclamant le retour à l'ordre constitutionnel.
Un «montage pour jouer sur la corde patriotique et nationaliste»
Ismaël Sacko vit en exil dans un pays africain depuis deux ans. De passage à Paris, il a tenu une conférence de presse ce 15 février dans l'après-midi : « Ils (les autorités maliennes de transition, ndlr) disent avoir fait un piratage et ils en sont fiers, s'indigne l'opposant malien. C'est un délit, c'est une faute, ils violent la loi sur la cybercriminalité, en donnant un mauvais exemple à la jeunesse. Ils auraient pu tout simplement payer la dette, parce qu'ils reconnaissent une dette ! Une dette de l'État de cinq milliards de Francs CFA à l'entreprise privée française. Donc pour un État sérieux, il était normal d'abord de payer la dette, et ensuite de récupérer les données de façon légale. Maintenant, je sais très bien que ces données étaient disponibles. C'était un montage pour jouer sur la corde patriotique et nationaliste, comme ils savent le faire. »
00:52 Ismaël Sacko: «C'était un montage pour jouer sur la corde patriotique et nationaliste»
David Baché En septembre 2023, le gouvernement malien de transition avait justifié par cette « prise d'otage » des données d'état civil le report sine die de l'élection présidentielle initialement prévue ce mois de février, et qui devait mettre fin à la période de transition - alors qu'un référendum constitutionnel avait pourtant été organisé en juin. La récupération des données, officiellement annoncée, rend donc caduque cet argument.
« Nous avons espoir que très rapidement les autorités maliennes de transition vont proposer une date pour des élections », réagit encore Ismaël Sacko, avant de nuancer immédiatement : « Cette date, ils ne vont pas la respecter comme d'habitude, parce qu'ils n'ont pas l'intention d'aller aux élections, parce qu'ils n'ont pas l'intention de quitter le pouvoir. »