Ile Maurice: Le miroir de la partielle pour piéger l'opposition

17 Février 2024

Tout le tam-tam à coups de déclarations de politiciens et d'analyses supposément savantes de 'politologues' autour de la démission de Vikram Hurdoyal et d'une élection partielle possible dans le n° 10 pourrait finalement s'avérer bénéfique pour Pravind Kumar Jugnauth (PKJ) et son MSM.

Le souhait ardent de PKJ serait que toute l'opposition menée par Navin Ramgoolam se mobilise en force en vue d'une partielle qui pourrait éventuellement se tenir dans plusieurs mois encore. Ainsi, tout le monde ne parlerait que de la partielle et on oublierait tous les scandales qui rongent la société mauricienne. D'ailleurs, à en juger par la part qui revient à Hurdoyal dans l'actualité en ce moment, PKJ ne pourrait ne pas en être satisfait. On croirait que le plus grand problème qui afflige cette grande nation dans le sud de l'océan Indien serait l'absence d'explication de la part de PKJ sur les raisons du limogeage de Hurdoyal. Et non pas la flambée des prix, le chômage chez les jeunes, la drogue, les actes de violence, les morts sur les routes.

Le best-case scenario du MSM serait surtout un engagement énergique et fougueux de Navin Ramgoolam lui-même comme candidat éventuel dans le n° 10. PKJ, dans un moment de franchise, l'a dit d'ailleurs lors de la prestation de serment de la nouvelle ministre. Il souhaite vivement que Navin Ramgoolam se laisse guider par son orgueil de prendre la revanche sur sa défaite dans le n° 10 en 2019 et consacre toute son énergie et toutes ses ressources afin de se faire élire.

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Evidemment, l'élection partielle ne sera jamais tenue. Car en fin de mandat comme après la démission de Vishnu Lutchmeenaraidoo en 2019 et celle de plusieurs autres dont Harish Boodhoo en 1987, aucun leader politique au pouvoir ne prendrait le risque d'élections partielles qui pourraient compromettre ses chances aux élections générales. On sait bien que des partielles, comme celle de Triolet-Pamplemousses en 1970, ont dans le passé causé d'énormes dégâts politiques. PKJ ne serait pas aussi naïf que de donner à l'opposition un bâton pour l'assommer dans le n° 10 en attendant le grand scrutin.

Le MSM pourrait s'estimer heureux aussi longtemps que tous les projecteurs sont braqués sur le n° 10. La stratégie particulière de PKJ pour le n° 10 pourrait amener certains à se demander si Hurdoyal lui-même ne roulerait pas pour le Sun Trust.

En fait, tous les compliments du démissionnaire Hurdoyal adressés aux Jugnauth pourraient être mal interprétés. Une explication serait qu'en raison de ses intérêts financiers, Hurdoyal craindrait d'être écrasé sous le rouleau compresseur du pouvoir si jamais PKJ décide de le corriger vraiment. Un gouvernement est en mesure de mettre en banqueroute tout homme d'affaires placé sur sa liste noire pour des raisons politiques. C'est ainsi que sir Anerood Jugnauth s'était assuré de la faillite totale des Ramjuttun Frères, grands commerçants à PortLouis, après le conflit qui l'opposa à un membre de la famille. De même après 2014, on a assisté au démembrement de l'empire de Dawood Rawat.

Les risques auxquels fait face Hurdoyal sont énormes. Ses exportations agricoles pourraient être tout simplement bloquées en l'absence de certificats phytosanitaires émis par le ministère de l'Agriculture. Il y a d'autres tracasseries encore de la part de différentes unités de la machinerie gouvernementale sans compter la manipulation des banques...

On va voir dans les semaines à venir si l'opposition s'est irrémédiablement engouffrée dans l'engrenage du n° 10 ou si elle s'organise dans l'ensemble du pays en vue des élections générales qui seraient tenues dans un contexte de «labouss dou» après un prochain Budget. En attendant, pour jouer le jeu si ardemment souhaité par PKJ, l'alliance PTr-MMM-PMSD pourrait toujours annoncer la candidature de Donald Duck au n° 10 tout en réalisant que l'île principale de la République compte 19 autres circonscriptions et pas seulement Montagne-Blanche-GRSE.

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