Sénégal: Entretien d'espaces verts à Dakar - Entre écologie, utilité scientifique et rentabilité économique

18 Février 2024

A Dakar, les espaces d'entretien et de vente des plantes se multiplient. Aménagés dans certaines rues de quartiers ou aux abords des grandes routes de la capitale, ces espaces participent à la régénération végétale, donnent un meilleur visage à l'environnement urbain, tout en permettant aux acteurs de gagner un peu d'argent.

Mohamed Sène est propriétaire de l'un des jardins situés dans la zone de captage, à côté de l'autoroute. Il totalise plus de vingt ans d'expérience dans ce domaine. Ce métier, dit-il, est avant tout une passion pour lui. Malgré ces difficultés qui ont pour nom manque d'eau, rareté de la clientèle, etc., il ne compte pas chercher un autre travail. « J'aime ce travail, et je m'y épanouis. Le plus important, pour moi, c'est que ces plantes puissent contribuer à donner une meilleure santé aux populations. Nous participons aussi au reboisement de beaucoup de sites rendant ainsi l'environnement beaucoup plus sain et attractif », souligne le sexagénaire. Plantes fruitières et ornementales (jardin, balcon et terrasse), etc. À Dakar, nombreux sont les espaces de conception, d'entretien et de mise en vente de végétaux. Ils se situent, pour la plupart, au bord des grandes routes. En plus des plantes décoratives et autres, le maraîchage se pratique aussi parfois dans ces espaces.

À la zone de captage, ces périmètres s'étalent sur des dizaines de mètres. Les jardiniers sont à pied d'oeuvre, arrosant les plantes et s'occupant en même temps de la pépinière. L'endroit est quasi humide et laisse admirer la beauté de la nature. Ces plantes enjolivent les lieux. Un puits est foré dans chaque parcelle pour les besoins fréquents en eau.

Ngor Ndour évolue dans ce milieu depuis dix ans. Il connaît parfaitement le nom de chaque plante. Dans son périmètre, lauriers, ficus, citronniers, palmiers, etc., sortent des entrailles des pots de fleurs où ils étaient piqués. « Notre principal problème, c'est le manque d'eau, alors qu'elle reste indispensable à l'évolution des plantes dont certaines ne survivent pas à la mauvaise qualité de l'eau tirée de nos puits » déclare-t-il.

Faible rentabilité économique

Près de la Faculté des sciences et technologies de l'éducation et de la formation (Fastef) ex-Ecole normale, sur l'avenue Bourguiba, des espaces d'entretien et de vente de plantes sont aménagés des deux côtés. L'arrêt de bus est bondé de monde. Vendeurs et passagers se disputent le trottoir. La circulation est fluide. Le jardin de Moussa Ndong longe le mur de l'Ecole normale et jouxte le trottoir. Plusieurs espèces de plantes poussent dans son périmètre. Mais, les cocotiers leur ravissent la vedette.

Son collaborateur Cheikh Diouf s'occupe de l'arrosage. Moussa, quant à lui, se charge du compostage. Des feuilles de filaos mortes mélangées avec de la paille produisent de la matière organique. Il affirme ne pas avoir eu des compétences professionnelles dans ce domaine, mais il a appris le métier sur le tas. « Notre objectif, c'est de participer au reboisement de l'environnement et de rendre le cadre plus beau et plus attractif », soutient-il. Selon lui, il est difficile de gagner beaucoup d'argent dans ce métier, parce que la clientèle est irrégulière. « Malgré cela, nous avons un métier noble qui permet d'embellir et d'enrichir la biodiversité dans ce contexte de menace environnementale. Ces jardins constituent une solution à la déforestation », soutient-il.

La touche des étudiants de l'Ucad

Massamba Diop est étudiant en Master 2 en Gestion durable des agro-écosystèmes horticoles à la Faculté des sciences et techniques (Fst) de l'Ucad. Trouvé dans le jardin botanique, il est venu pour faire des recherches pour améliorer ses compétences dans ce domaine. Après sa licence en Biologie, le jeune étudiant a acquis des connaissances en botanique. « En Master 1, j'ai travaillé sur un projet de création d'entreprise, de production et de vente des plantes ornementales et d'entretien des jardins et espaces verts », explique-t-il. Il soutient que le projet permet de mettre en place un système d'aménagement au niveau des habitats, zones d'activité, voies publiques afin d'embellir les villes, réduire la pollution atmosphérique par la photosynthèse, améliorer le climat urbain par la réhydratation et le refroidissement des masses d'air, etc. À l'en croire, ce jardin participe au reboisement de certains endroits et permet la multiplication des espaces verts. Sur place, les étudiants sont éparpillés, s'attelant à l'entretien des plantes.

Un calme plat y règne. D'autres apprenants, en pleine révision, font des va-et-vient incessants, plongés dans leurs documents. Différentes espèces végétales forment un joli décor, embellissant le cadre. Ces étudiants, en majorité des stagiaires, se livrent à une opération de désherbage. Plantes décoratives, cocotiers, palmiers, lauriers et tant d'autres colonisent l'endroit. Elles sont bien préservées dans un endroit humide. Elles serviront à orner les devantures de maisons, compléter la décoration des espaces verts, des zones touristiques, entre autres. Ici, certaines plantes viennent d'autres régions. Mais, grâce à une technique d'acclimatation adoptée par les étudiants et leurs encadreurs, elles finissent par s'adapter.

Mbeurgou Samb, étudiant en Master 2 Enseignement en Science de la vie et de la terre (Svt) fait savoir qu'en plus de leurs aspects décoratifs, ces plantes ont des vertus médicinales. Selon lui, le corossolier, par exemple, dont le nom scientifique est annona muricata, est un remède contre le diabète. « Pour une multiplication végétative, nous utilisons des méthodes de greffage, de bouturage, de marcottage et d'ébourgeonnage. Ceci permet aussi de renforcer la qualité de la plante afin qu'elle soit plus résistante », apprend-il.

DR GORA NIANG, DIRECTEUR DU CENTRE D'ÉDUCATION ET DE FORMATION ENVIRONNEMENTALE

« Nous devons planter des arbres dans nos rues, dans nos écoles, dans nos places publiques... »

Directeur du Centre d'éducation et de formation environnementale (Cefe), Gora Niang n'en est pas moins un défenseur infatigable de la nature. Dans cet entretien, en marge d'une journée de reboisement et de sensibilisation, organisée à l'école élémentaire de Malika, il dissèque les différentes fonctions de l'arbre. Il invite les citoyens à reboiser les écoles, les rues, les places publiques, etc.

Vous menez beaucoup d'activités de reboisement. Quelles sont vos véritables motivations ?

Aujourd'hui, on n'a pas besoin d'être spécialiste de l'environnement pour comprendre que le combat pour la défense de la nature est devenu un enjeu planétaire. Cela veut dire que la protection de l'environnement est un combat de tous et de tous les jours. Dans cette bataille, il est important qu'il y ait des personnes très engagées pour être à l'avant-garde et travailler à sauver l'humanité. C'est pourquoi, en tant que défenseur de l'environnement, je mène régulièrement des activités de reboisement pour apporter ma modeste contribution à cette lutte.

Quelle est l'importance de l'arbre dans notre environnement ?

Nous ne pouvons pas évoluer dans une atmosphère dénuée d'arbres. C'est pourquoi, il est de notre ressort de planter des arbres dans nos rues, de faire en sorte que nos écoles soient reboisées, que nos places publiques soient aménagées pour le bonheur de tous les citoyens. Rappelons que le Pse vert a été choisi au Sénégal comme thème de la dernière édition de la Journée mondiale de l'arbre. Ce qui constitue, au-delà de l'invite à la préservation des écosystèmes, un appel à des actions d'envergure de sensibilisation, d'éducation, de formation et de communication à l'environnement. Cet aspect constitue un maillon faible au niveau de nos quartiers, nos villes et nos campagnes où se posent des problèmes liés à la prise en charge des déchets, à l'occupation anarchique de la voie publique, au manque d'arbres, etc. J'en profite pour saluer l'initiative de la réalisation du parc forestier urbain de Dakar Yoff.

En invitant les élèves à cette activité de reboisement, quel est l'objectif recherché ?

J'ai jugé utile d'inculquer aux élèves des notions sur l'importance de l'arbre et du reboisement. Ils doivent comprendre que l'arbre produit l'oxygène que nous respirons et absorbe le Co2 qui est responsable du changement climatique. Les élèves du Sénégal dans leur entièreté doivent comprendre que l'arbre soigne, qu'il donne de la nourriture et nous donne de l'ombre. L'arbre fournit également de l'énergie à travers le bois. Il raffermit les relations sociales à travers l'arbre à palabre. L'arbre perpétue les traditions, les us et coutumes à travers les forêts sacrées. L'arbre lutte contre l'érosion éolienne et celle hybride. Il arrête aussi la désertification. Autant d'atouts dont l'humanité jouit du fait de l'arbre. Nous avons tous intérêt à planter des arbres pour la survie des êtres vivants. J'ai planté quelques arbres au Collège d'enseignement moyen (Cem) de Malika et j'en ai profité pour sensibiliser les élèves sur l'obligation de participer à la sauvegarde de l'environnement, à la protection des ressources naturelles et du cadre de vie. Il est important que nous sachions que la terre abrite tout ce qui est vivant, animal comme végétal, c'est pourquoi nous avons l'obligation d'accorder une attention particulière à cette planète Terre.

Pensez-vous que l'école peut être un catalyseur dans la lutte contre le changement climatique ?

Le changement climatique est l'un des défis majeurs auxquels notre planète est confrontée. Il doit apporter des réponses appropriées. À mon avis, l'éducation et la formation environnementale peuvent être des remèdes contre le changement climatique. Si nous réussissons à inculquer ces notions à tous les élèves et qu'ils grandissent avec des habitudes écologiques, nous pourrons espérer, à l'avenir, venir à bout du changement climatique.

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