Madagascar et le Sénégal sont, tous les deux, membres de l'Association des Cours Constitutionnelles ayant en Partage l'Usage du Français (ACCPUF) mais la Haute Cour Constitutionnelle malgache et le Conseil Constitutionnel sénégalais ne partagent pas la même vision des choses, pour être bien ou mal en cour.
L'exception sénégalaise
Lors des événements de 1947, les Sénégalais faisaient figure d'épouvantail aux yeux des combattants pour la lutte de libération nationale, voire pour le peuple malgache. Aujourd'hui, l'opinion a un autre regard sur le Sénégal où le Conseil constitutionnel a invalidé le report au 15 décembre 2024 de la date de l'élection présidentielle initialement prévue le 25 février de cette année. En revanche, dans sa décision en date du 12 octobre 2023, « la Haute Cour Constitutionnelle, en vertu de son pouvoir de régulation, ordonne le report du premier tour de l'élection présidentielle au 16 novembre 2023 (...) ». Une décision prise, non pas pour les beaux... yeux d'Andry Raobelina qui a été justement ou plutôt injustement blessé à l'oeil droit lors d'une réunion publique organisée par le collectif des candidats dont les manifestations se voulaient pacifiques.
En tout cas, c'était sans commune mesure avec les mouvements de contestation contre le report de la présidentielle au Sénégal qui avait plongé le pays, et tout particulièrement la capitale Dakar, dans l'une des plus graves crises politiques de son histoire, selon le Conseil Constitutionnel. A Madagascar, la HCC considérait que « le Préfet de Police d'Antananarivo a réquisitionné l'EMMO REG d'Analamanga dans le cadre de l'opération de police en vue de prendre les dispositions nécessaires pour maintenir l'ordre et la sécurité publics dans le Grand Tana durant une période indéterminée, en vue de la sécurisation de la période pré-électorale ». Quoique les deux juridictions constitutionnelles appartiennent l'une et l'autre à l'ACCPUF, elles ont pris des décisions diamétralement opposées. C'est l'exception sénégalaise dans un espace francophone, marqué le plus souvent par une justice aux ordres. Plus d'un demi-siècle après, les Sénégalais ne font plus peur, sauf peut-être à la nouvelle nomenklatura.