Le gouvernement sénégalais a plongé le pays dans un nouveau cyber black-out, en suspendant l'accès à la connexion internet mobile, moins de deux semaines après son rétablissement.
« En raison de la diffusion sur les réseaux sociaux de plusieurs messages de haine subversifs qui ont déjà provoqué des manifestations violentes, [...] la connexion internet mobile est suspendu ce mardi 13 février », a annoncé le ministère de la Communication, des Télécommunications et de l'Economie numérique dans un communiqué de presse.
Le contenu du communiqué du gouvernement daté du 13 février 2024 n'était certainement pas nouveau pour de nombreux citoyens sénégalais, qui ont connu des fermetures répétées d'Internet au cours des trois dernières années. Cet épisode de suspension d'Internet, le deuxième en l'espace d'un mois, est intervenue avec des échos des excuses avancées pour justifier les suspensions précédentes pour avoir suspendu internet, alors que le motif réel est soupçonné d'être pour freiner à la capacité des organisateurs de protestations à se mobiliser.
Le Sénégal est en proie à des manifestations et à des tensions depuis que le président Macky Sall a reporté les élections prévues pour le 25 février 2024, une décision qui prolonge d'environ un an son séjour au pouvoir au-delà de la limite constitutionnelle.
Outre la perturbation d'Internet, une marche de protestation prévue ce jour-là (13 février) a été interdite. Les organisateurs de la marche ont décidé de la reporter, conformément à l'interdiction des autorités sénégalaises, au motif que la manifestation perturberait la circulation.
Cette nouvelle perturbation de l'Internet au Sénégal intervient alors que deux organisations, Media Defence et Rule of Law Impact Lab of Stanford Law School, ont saisi la Cour de justice de la CEDEAO pour contester les précédentes coupures des mois de juin, juillet et août 2023.
La Fondation des Médias pour l'Afrique de l'Ouest (MFWA) soutient cette initiative audacieuse des deux organisations pour contester l'impunité des violations numériques au Sénégal. Nous condamnons également cette perturbation impulsive de l'Internet par les autorités sénégalaises, qui est inquiétante, compte tenu de l'utilisation omniprésente des médias sociaux dans la vie moderne.
« Dans une période de tension où les citoyens ont besoin de se connecter davantage et de partager des informations pour s'assurer de la sécurité et du bien-être de leurs parents et de leurs proches, le gouvernement a décidé d'aggraver leur sentiment d'anxiété avec cette décision regrettable », a déclaré Muheeb Saeed, responsable de la liberté d'expression à la MFWA.
La MFWA appelle le gouvernement à revenir sur sa décision. Tout en reconnaissant le devoir du gouvernement de maintenir la paix et l'ordre au Sénégal, nous souhaitons souligner que ce devoir doit être exercé d'une manière qui préserve les libertés fondamentales dont l'accès à l'internet est un élément majeur.