Des experts indépendants onusiens se sont inquiétés, mercredi, des allégations de disparitions forcées visant l'ethnie peule au Burkina Faso. Ces inquiétudes ont été relevées lors de l'examen mardi après-midi et mercredi matin du rapport soumis par le Burkina au Comité des disparitions forcées.
Selon Matard Diop, corapporteur pour l'examen du rapport du Burkina Faso, le Comité a reçu des « informations fiables et des allégations » concernant le caractère ethnique de la plupart des disparitions involontaires ou forcées.
« Il est ainsi allégué que la plupart des disparitions visent des personnes de l'ethnie peule », a dit le corapporteur, demandant des informations complètes sur les enquêtes menées concernant ces disparitions et leurs résultats.
L'expert a également souhaité savoir si les disparitions de victimes appartenant à l'ethnie peule sont concentrées dans une région particulière du pays et comment la délégation expliquait cette surreprésentation des Peuls parmi les personnes disparues. M. Diop s'est en outre enquis des mesures prises pour mettre fin aux discriminations et aux violations à l'encontre des Peuls.
La lutte contre le terrorisme n'est pas dirigée contre une communauté particulière
De son côté, son collègue, Juan Pablo Alban Alencastro, a également demandé à la délégation de réagir aux allégations reçues par le Comité selon lesquelles la majorité des disparitions dans le cadre du conflit armé et de la lutte contre le terrorisme seraient imputables à l'État.
Face à ces accusations, le Garde des sceaux a rappelé que lorsque le Gouvernement a connaissance ou est saisi de cas d'allégations de disparitions forcées, les autorités de poursuites compétentes procèdent à l'ouverture systématique d'enquêtes judiciaires administratives et sociales.
La ministre de la Justice et des droits humains, chargée des relations avec les institutions a ensuite rappelé que, depuis 2015, le Burkina Faso fait face à des attaques terroristes à travers tout le pays.
« Ces terroristes procèdent régulièrement à des enlèvements de civils, de membres des forces armées nationales, des forces de sécurité intérieure et des volontaires pour la défense de la patrie et, même, à des assassinats », a fait valoir Edasso Rodrigue Bayala.
La délégation burkinabè a ensuite déclaré que la lutte contre le terrorisme au Burkina Faso n'a pas une dimension ethnique et n'est pas dirigée contre une communauté particulière. Au contraire, a-t-elle souligné, l'ethnie peule est la première victimes des actes terroristes.
Les groupes armés accusés d'enlèvements de civils et de travailleurs humanitaires
Il n'existe par ailleurs pas de mesures spécifiques de protection de ces communautés. Une façon de rappeler que les mesures de protection prises dans le cadre de la lutte contre le terrorisme sur l'ensemble du territoire concernent toutes les communautés.
Par ailleurs, certaines allégations de disparitions forcées sont mises à la charge des forces armées nationales, des forces de sécurité intérieure et des Volontaires pour la défense de la patrie, a relevé la délégation, avant d'indiquer que ces allégations peuvent être essentiellement liées à des opérations de lutte contre le terrorisme et à des questions de sécurité nationale.
Dans les rangs des forces armées nationales et des Volontaires pour la défense de la patrie, Ouagadougou indique avoir enregistré à ce jour 190 cas de disparitions dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Pour ce qui est des disparitions attribuables aux terroristes, la délégation a cité les enlèvements de civils, de touristes, de travailleurs humanitaires, de responsables et leaders locaux, de membres des communautés locales ou d'agents de l'État. Ces enlèvements sont souvent utilisés par les terroristes comme moyen de pression pour imposer leur volonté et semer la terreur, a indiqué la délégation, fustigeant « de nombreux cas de recrutements forcés par les terroristes ».