Madagascar: Castration des violeurs - Le feu vert de la HCC attendu

Selon le communiqué du Conseil des ministres, cent quarante-quatre cas de viols sont répertoriés depuis le début de l'année, dont la plupart sur des enfants. Censée être dissuasive, la loi sur la castration des violeurs d'enfants est toujours en instance de contrôle de constitutionnalité.

Cent quarante-quatre. C'est le nombre des cas de viols répertoriés par le système judiciaire depuis le début de l'année, dont la plupart sur des mineurs et des enfants en bas âge. Deux décès sont recensés. Un chiffre communiqué durant le Conseil des ministres, mercredi.

Selon le rapport du Conseil des ministres, Andry Rajoelina, président de la République, a une nouvelle fois fait part de son indignation face à la prolifération du viol dans le pays. Surtout, sur la hausse des cas de viol sur mineurs et sur les enfants en bas âge. Il a rappelé que c'est justement pour dissuader les violeurs potentiels et sanctionner sévèrement les délits sexuels sur enfant que le code pénal a été amendé pour y ajouter "la castration".

De prime abord, l'Exécutif a hâte que les nouvelles dispositions du code pénal, renforçant les sanctions contre le viol sur enfant soient mises en vigueur. Le texte y afférent est, jusqu'à l'heure, en instance de contrôle de constitutionnalité auprès de la Haute Cour Constitutionnelle (HCC). Ceci, après avoir été adopté par le Parlement, au début du mois. Selon une source avisée, la Cour d'Ambohidahy n'aurait été saisie à cet effet que "la semaine dernière".

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Quoi qu'il en soit, le sujet ne figure pas dans les décisions rendues par la HCC, hier, et publiées sur son site web. Ces amendements prévoient la castration chirurgicale pour les auteurs de viol sur les enfants de moins de 10 ans. La castration chimique ou chirurgicale pour les violeurs d'enfants âgés entre 10 et 13 ans y est également prévue. Ainsi que la castration chimique pour les violeurs de mineurs entre 13 et 18 ans.

Pour les viols sur enfant de moins de 10 ans, la peine est assortie de travaux forcés à perpétuité. La récidive, le viol collectif et l'inceste constituent des circonstances aggravantes qui motiveront les travaux forcés à vie, outre l'un ou l'autre forme de castration. L'identité et le visage des violeurs seront également rendus publics.

Ayant défendu le projet de loi devant le Parlement, et l'ayant expliqué à la presse, Landy Mbolatiana Randriamanantenasoa, ministre de la Justice, soutient qu'outre appliquer des sanctions sévères contre les auteurs de viol, le but est aussi de "dissuader" les violeurs potentiels. L'initiative malgache défraye les chroniques à l'international. Madagascar n'est pourtant pas le premier pays à vouloir inscrire la castration dans son droit positif pour sanctionner le viol.

Souveraineté nationale

Les lois dans certains pays en Europe, prévoient la castration chimique contre les violeurs, mais "sans l'imposer". C'est-à-dire avec le consentement du condamné et, souvent, en l'échange d'une remise de peine. Le point de controverse est que la castration soit "imposée". Pourtant, certains États des États-Unis imposent aussi la castration chimique contre les violeurs. La castration chimique consiste en un procédé médical qui peut être temporaire.

Les nouvelles dispositions du code pénal adoptées au début du mois prévoient aussi la castration chirurgicale. Un procédé irréversible. La Grande île sera un des rares pays à l'appliquer. Le 8 février, au lendemain de l'adoption du projet d'amendement du code pénal par le Sénat, Amnesty international a réagi, qualifiant la castration chimique ou chirurgicale de "cruelle, inhumaine et dégradante".

Amnesty international recommande plutôt "une approche centrée sur les victimes". Qui leur permette de dénoncer et d'avoir des moyens d'action judiciaire sans crainte de représailles ou d'être stigmatisées. Selon les informations, la Commission nationale indépendante des droits de l'homme (CNIDH) a adressé une observation similaire durant les travaux de commission au Parlement.

L'esprit de la loi qui est de défendre les personnes vulnérables contre le viol serait reconnu. Néanmoins, des lignes des nouvelles dispositions seraient considérées comme non conformes à la dynamique contemporaine en termes de droits humains. "Imposer la castration", notamment la castration "sans consentement", serait "une atteinte à l'intégrité physique de la personne", et peut être assimilée "à de la torture", expliquerait cette observation.

La CNIDH aurait aussi suggéré qu'au-delà du renforcement des peines, il faudrait "annihiler le système d'interventionnisme et la corruption", afin que les actions judiciaires aboutissent et que les coupables purgent réellement leur peine. De même pour l'opportunité de réforme des dispositions légales en faveur du droit des victimes face aux séquelles et aux conséquences du crime. Quitte à rouvrir le débat sur l'opportunité de "l'interruption thérapeutique de grossesse" en cas de viol.

En marge d'une cérémonie à la Cour suprême, à Anosy, le 5 février, la ministre de la Justice a défendu que "modifier ses lois relève de la souveraineté nationale de Madagascar". Elle a ajouté que, "certes, il y a les questions de droit de l'homme, mais avant ça, il y a aussi la nécessité de préserver l'ordre public et l'intérêt général", en soutenant que les dispositions légales en vigueur ne suffisent plus à protéger les citoyens, ni à dissuader les criminels, "aussi, il est nécessaire de prendre des mesures légales pour y remédier".

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