Sénégal: Des experts relèvent les obstacles à la conservation des produits agricoles locaux

Dakar — Des experts ont relevé le manque d'infrastructures de conservation de la production agricole au Sénégal et le non-fonctionnement d'une bonne partie de ces ouvrages, dont certains ont été construits par l'État.

"De Dakar à Saint-Louis, nous avons dénombré au moins 22 infrastructures de stockage qui ne fonctionnent plus ou qui n'ont jamais fonctionné", a déclaré Oumar Samba Ndiaye, consultant en mise à niveau des petites et moyennes entreprises, ancien directeur général de l'Agence de régulation des marchés (ARM).

Il intervenait, mercredi à Dakar, à un panel organisé par l'École supérieure de journalisme, des métiers de l'Internet et de la communication (Ejicom), le Conseil pour l'observation des règles d'éthique et de déontologie dans les médias au Sénégal (CORED) et l'ambassade des États-Unis d'Amérique au Sénégal.

Le débat portait sur "la problématique de la conservation des produits agricoles locaux".

"Si vous allez dans la zone de Potou (région de Louga), qui est une zone de production d'oignon, vous trouverez trois magasins d'une capacité de 100 tonnes, construits par l'État, qui n'ont jamais fonctionné", a révélé M. Ndiaye.

"Si vous allez dans la commune de Fass Ngom (région de Saint-Louis), vous trouverez également des infrastructures de stockage qui ne fonctionnent plus. Je peux vous en citer au moins une dizaine", a-t-il ajouté.

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Oumar Samba Ndiaye, consultant et ancien directeur général de l'ARM

L'ancien directeur de l'ARM trouve incompréhensible qu'on réclame des infrastructures de stockage au moment où il y en a une vingtaine qui ne sont pas fonctionnelles".

"Il va falloir faire face à ces paradoxes pour essayer d'améliorer notre agriculture", a recommandé Oumar Samba Ndiaye.

Selon l'ancien directeur l'ARM, le manque d'infrastructures de stockage de la production agricole n'est aussi criant que certains le pensent, car "l'État [...] a mis en place des mécanismes et s'est doté d'outils pour améliorer la conservation et la commercialisation des produits agricoles".

"Pour avoir été promoteur (en sa qualité de directeur de l'ARM) des infrastructures de stockage installées à Ndiayène Pendao, dans la vallée du fleuve Sénégal, je peux vous dire que l'État du Sénégal [...] a déroulé des programmes de développement d'infrastructures de stockage dans les zones de production", a reconnu M. Ndiaye.

Les initiatives publiques dans ce domaine ont donné naissance à une "plateforme" destinée à la conservation des céréales et au marché d'intérêt national de Diamniadio (ouest), a-t-il rappelé.

"On peut même se passer des infrastructures de conservation, s'il existe une bonne politique de transformation des productions locales", a proposé le consultant en mise à niveau des petites et moyennes entreprises.

"Le parent pauvre de l'agriculture sénégalaise, c'est la transformation. Elle n'est pas suffisamment explorée", a-t-il relevé.

Ndèye Ngoné Samb, ingénieure des eaux et forêts

Les experts invités de l'Ejicom, du CORED et de l'ambassade des États-Unis d'Amérique se sont préoccupés aussi des pertes de récoltes. "On enregistre des pertes de 20 à 40 % des productions locales", a signalé Dr Awa Ndiaye Dieng, chercheuse à l'Institut sénégalais des recherches agricoles.

Concernant les fruits et légumes, il arrive même que la moitié de la production se détériore, selon elle.

Mme Dieng propose d'améliorer le conditionnement et le stockage de la production pour réduire les pertes".

"Des producteurs dévastent des forêts pour mener des activités agricoles"

"Le produit doit atteindre sa maturité physiologique, l'entreposage doit respecter les normes d'hygiène et de sécurité, les conditions de transport aussi", a souligné la chercheuse de l'ISRA en réfléchissant à l'idée de réduire les pertes de récoltes.

Selon la lieutenant-colonel Ndèye Ngoné Samb, ingénieure des eaux et forêts, il existe des techniques culturales à même de faciliter la conservation des produits agricoles.

"Au Sénégal, la conservation de la production est le principal problème de notre agriculture. Le problème se pose surtout avec les fruits et légumes", a-t-elle relevé.

L'ingénieure des eaux et forêts s'inquiète par ailleurs de l'abattage "abusif" des arbres dans les zones d'agriculture. "Des producteurs dévastent des forêts pour mener des activités agricoles. C'est vraiment dommage", a déploré Ndèye Ngoné Samb, rappelant qu'il existe une complémentarité entre l'agriculture et les forêts.

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