Conakry avait une allure de ville fantôme le lundi 26 février 2024. Pas d'âme qui y vit notamment dans le quartier des affaires à Kaloum. Grilles de commerce baissées, routes désertes, écoles, banques et télécom fermés ainsi que dans l'administration publique où le service minimum a parfois été observé.
La capitale était paralysée pour cause de grève décrétée par les 13 centrales du pays pour protester contre la hausse des prix des produits de première nécessité mais aussi pour qu'on mette fin à la censure imposée aux médias. Elles ont reçu le soutien des principaux partis politiques et de la plupart des organisations de la société civile.
Il est vrai que remplir son panier était devenu de plus en plus difficile pour la ménagère guinéenne qui ne sait plus à quel saint se vouer. Tout ce ceci dans un contexte politique marqué par des tours de vis liberticides qui visent notamment les hommes politiques les responsables d'OSC et des journalistes.
Pour preuve, la condamnation du journaliste et leader syndical guinéen, Sékou Jamal Pendessa le vendredi 23 février à six mois d'emprisonnement dont trois ferme. Des revendications sociales avec pour lames de fonds des préoccupations d'ordre politique. Ce mouvement que le monde du travail veut illimité a valeur de test pour les militaires qui interdisent depuis leur prise de pouvoir toute manifestation et musèlent l'opposition.
Il est vrai que deux ans et demi après son arrivée au pouvoir le président Mamadi Doumbouya ne semble pas prêt à quitter le fauteuil présidentiel. Bien au contraire celui qui avait déclaré une fois qu'il ne passerait pas un jour de plus au palais à l'issue des 24 mois de Transition semble maintenant jouer des pieds et des mains pour une prolongation.
La Transition guinéenne est censée se terminer en fin 2024, mais d'ores et déjà des manoeuvres aux plans national et international ont court pour un glissement d'au moins une année à l'horizon 2025 et qui sait plus si les conditions s'y prêtent. C'est dans ce contexte qu'intervient le débrayage dont on se demande cependant quel effet il aurait sur celui qui s'est fait bombarder récemment général de corps d'arme.
La grève se passe en effet alors que le pays n'a pas de ministres, le gouvernement ayant été dissous le 19 février dernier pour des raisons encore obscures. Autant dire que les grévistes n'ont pas actuellement d'interlocuteurs pour discuter de leurs plateformes revendicatives si bien que les autorités morales, notamment les guides religieux sont obligés d'aller au charbon pour circonscrire ce départ de feu.
Une chose est sûre, c'est la première vraie épreuve de l'ancien patron des Forces spéciales guinéennes depuis qu'il a renversé le professeur Alpha Condé en septembre 2021. La première mais sans doute pas la dernière car si les choses ne changent pas de façon radicale sur les plans social et politique.
On a bien peur que la Guinée ne s'installe dans un cycle de manifestations quand on sait que régulièrement ces manifs ont toujours entraîné leur lot de morts et blessés qui se comptent par centaines à travers le pays.