Maroc: Contrevérités ministérielles

Les étudiants en médecine rejettent en bloc les justifications de Miraoui

Rien ne va plus entre les étudiants en médecine et Abdellatif Miraoui, ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l'Innovation. Ce dernier est accusé de « propager des idées fausses et des contrevérités ». En effet, les représentants du bureau des étudiants en médecine à Agadir estiment que la dernière conférence de presse, tenue conjointement jeudi dernier par le ministre de l'Enseignement et celui de la Santé et de la Protection sociale, était truffée de fausses informations et d'imprécisions.

Incorrect

Ainsi concernant la période allant de 2022 (date de l'annonce de la décision ministérielle concernant la réduction de 7 à 6 ans du nombre d'années d'études) jusqu'au début du boycott, le bureau des étudiants juge incorrects les propos du ministre indiquant que «la décision n'a aucunement été contestée et que cette vague de protestation récente est injustifiée et motivée par des courants extérieurs».

Pour les étudiants affiliés au bureau d'Agadir, dans une déclaration à Libé, la commission des étudiants en médecine avait déjà demandé des réunions avec les deux ministères de tutelle en vue d'obtenir des précisions sur cette réforme. D'autant que « cette décision a été annoncée de manière soudaine et sans clarification sur le nouveau cursus de 6 ans qui n'était pas (et n'est toujours pas) tracé», précise le bureau. Et de poursuivre : « Les demandes d'audience sont restées sans réponse et les quelques réunions tenues annonçaient des délais entre 4 et 5 mois pour révéler le nouveau cursus. Ces délais n'ont souvent pas été respectés et le ministère en annonçait d'autres. La décision du boycott des études a été prise en décembre et celle de boycotter les examens était devenue une évidence et un dernier recours après plusieurs manifestations et grèves locales et nationales sans impact. Suite à tout cela, ces mêmes étudiants ont voté par une majorité écrasante en faveur du boycott ».

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Absurde

Concernant les déclarations du ministre Miraoui affirmant qu'au cours du boycott, les représentants des étudiants ont fermé la porte du dialogue et que le ministère leur avait accordé 14 réunions depuis le début du boycott, le bureau des étudiants révèle qu'« en effet, le ministère a été plus réactif aux demandes d'audience depuis le début du boycott, tout en précisant que ses représentants ont assisté à 3 réunions d'une durée de 1 à 3 jours par session et non 14». Et d'ajouter que «les étudiants n'ont jamais refusé une invitation à une réunion. Les rares fois où l'on demandait un décalage de quelques jours de la tenue d'une réunion étaient motivées par la distance entre certaines villes et la capitale et le caractère improviste des réunions. A noter, cependant, que ces discussions ont buté sur plusieurs décisions considérées par le ministère comme points de non retour sans fournir l'effort d'une lecture globale et compréhensive des points de vue des étudiants».

Pour ces derniers, «l'idée de maintenir la durée des études à 7 ans est la conclusion logique après avoir constaté que les ministères de tutelle n'étaient pas en mesure de garantir les conditions nécessaires pour une formation de 6 ans». Selon eux, «il n'y a pas de vision créative et nouvelle adaptant le nouveau programme d'études à la nouvelle durée mais plutôt une condensation de l'ancien programme». «Actuellement, durant les 6 années d'études, l'étudiant n'est pas suffisamment confronté à la médecine générale communautaire et la médecine de famille lui permettant de traiter un patient en tant que médecin généraliste. Ce n'est que pendant sa septième année d'études qu'il est formé, dans un centre hospitalier périphérique à la médecine qu'il pratiquerait dans sa carrière après avoir touché à des généralités de chaque spécialité ».

« Pour accepter cette durée de 6 ans, il faut adapter les programmes et si cela est impossible, il faudra garder ce programme de 7 ans qui, malgré ses défauts, garantit au moins une formation utile. D'où le slogan de 7 ans avec conditions. Nous demandons maintenant le maintien de ces 7 ans avec l'investissement financier et humain nécessaire pour assurer la formation à un effectif massif en hausse sans adaptation des structures de formation aux nouveaux admis. A Agadir, à titre d'exemple, le nombre des étudiants a augmenté de 100 à 240 puis à 320 dans l'attente de l'ouverture du CHU qui jusqu'à présent est en cours de travaux et sans adaptation des centres de stages actuels (hôpital régional Hassan II et hôpital militaire), ce qui a créé des problèmes d'encombrement au sein des salles de cours à l'hôpital. Un problème que le ministre nie toujours en déclarant à l'opinion publique que les amphithéâtres sont vides », ajoute le bureau.

Incompréhension

Sur un autre registre, les étudiants affiliés au bureau d'Agadir soutiennent que le ministre fait preuve d'incompréhension et d'ignorance du dossier revendicatif en déclarant que la demande de maintenir le nombre d'années d'études à 7 ans n'est réclamée que dans l'intention de quitter le pays. «Il n'en a jamais été question, personne n'en a jamais parlé ni même pensé sauf monsieur le ministre et il est malheureux de voir nos intentions détournées ainsi. Cela prouve implicitement que ce diplôme de 6 ans sera moins convoité », déclarent-ils. Et de préciser que les déclarations du ministre affirmant que 45 des 50 points du dossier revendicatif ont été accordés, sont déroutantes puisque tous ces points étaient mis en discussion et en réévaluation sans réel engagement. « Les points essentiels de ce dossier qui touchaient aux conditions académiques, sociales et économiques sont confrontés à un refus frontal sans possibilité de discussion».

En conclusion, les étudiants estiment que leur dossier revendicatif est clair et vise à préserver la faculté publique et les conditions de formation des étudiants. « Les ministères de tutelle doivent faire preuve de bonne volonté en accordant une deuxième lecture à notre dossier revendicatif sans hypersensibilité et sans attitude hautaine dictatoriale avec des mesures injustes comme la décision d'accorder un zéro à tous les étudiants qui ne se présenteront aux examens. Ce qui ne fait qu'empirer la situation et compliquer davantage notre retour », concluent les étudiants du bureau d'Agadir.

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