Dar es Salam, Mwanza, Mbeya, et désormais Arusha. Depuis deux mois, ces grandes villes de Tanzanie sont secouées par des manifestations de l'opposition. Celle-ci demande des réformes électorales crédibles en vue des élections présidentielles de l'an prochain. Car jusqu'ici, les négociations avec le gouvernement n'ont livré que des « réformes cosmétiques », dénonce Chadema, le principal parti d'opposition.
Pour faire entendre leur voix, ces opposants n'hésitent pas à battre le pavé. Fait rare, ces manifestations ont vu affluer en masse des Tanzaniens lambdas, poussés par leurs propres griefs, comme c'était le cas, notamment hier à Arusha. Brandissant des pancartes et soufflant dans des sifflets, de centaines de partisans du Chadema ont défilé pacifiquement dans les rues d'Arusha, mardi 27 février sous haute protection policière. Leurs revendications : une commission électorale indépendante et une nouvelle Constitution.
Depuis le 24 janvier, d'autres griefs se sont agrégés à cette mobilisation : la vie chère, des délestages électriques, ou encore la pénurie de sucre. Godbless Lema, ancien député du parti d'opposition et organisateur de la manifestation à Arusha, se réjouit de la forte participation.
« Tout s'est bien passé. Personne n'a eu besoin de prendre des analgésiques, personne n'a perdu son portable, la foule était immense, nombreuse, plus de 30 000 personnes. Je n'ai jamais vu une telle foule se rassembler pour s'opposer à une situation de vie difficile et à la pauvreté, ça s'est bien terminé et c'était incroyable », dit-il.
« La présidente est de plus en plus sous pression »
Ce sont les plus grandes manifestations depuis que la présidente Samia Suluhu Hassan a levé en janvier 2023 l'interdiction des meetings politiques, et cette mobilisation met le gouvernement sous pression dans la perspective des élections de 2025. « La présidente est de plus en plus sous pression. Elle essaye de trouver un juste équilibre, elle ne doit pas donner l'impression de réprimer l'opposition, mais c'est clair qu'elle est inquiète. Cette forte participation va la pousser à revenir à la table de négociations », constate l'analyste politique Maria Sarungi Tsehai.
Les négociations entre Chadema et le parti au pouvoir, le CCM, autour de nouvelles réformes électorales ont été rompues en janvier, Chadema fustigeant de « propositions cosmétiques ». Les opposants qui veulent modifier la Constitution souhaitent diminuer le pouvoir de la présidente Samia Suluhu Hassan, notamment, en vue des prochaines élections. Devenue présidente en 2021 suite au décès de son prédécesseur, John Magufuli, Samia Suluhu Hassan, candidate, espère cette fois-ci être élue. Le parti d'opposition doit se réunir dans les prochains jours et a d'ores et déjà annoncé d'autres journées de mobilisation.