Sénégal: Leurres des lueurs du Dialogue National

29 Février 2024
analyse

Le Dialogue national initié par le Président en exercice du Sénégal, sans termes de référence connus des participants à pris fin ce mardi 27 février 2024, au centre international de conférence Abdou Diouf de Diamniadio. Les résultats produits n’ont pas à vrai dire produit un consensus fort tant attendu

Et pourtant l’initiative était à priori bonne, car le prétexte choisi par le Président Macky Sall était de s’entendre avec les acteurs du jeu électoral sur la suite à réserver à l’invite/ injonction du Conseil Constitutionnel d’organiser les élections « dans les meilleurs délais ».

C’était aussi une manière de dire à la communauté internationale voyez-vous je me hâte lentement pour aller vers la date butoir du 02 avril, donc ne vous préoccupez pas outre mesure.

Mais au finish, le format retenu, rencontre un rejet farouche de l’opposition significative composée notamment par les 19 candidats retenus sur la liste du conseil constitutionnel, et d’une frange importante de la société civile.

La raison est que la rencontre n’a été ni plus ni moins qu’un subterfuge dans lequel tout le monde était gagnant. En effet, Macky Sall a réuni un aréopage d’anciens dignitaires du régime de Abdoulaye Wade, des laudateurs, des gens qui n’avaient rien à faire lors de cette rencontre sinon que de remplir la salle, enfin, des ministres et des membres de son clan, dans et en dehors de l’administration qui n’avaient pas le choix. Tout cela maquillé par des figures qui par leur liberté de pensée ont lézardé le bel unanimisme recherché.

Le gros plan fait sur la salle présentait un décor tout à fait surréaliste. La moyenne d’âge dépassait 70 ans. Qui l’eût cru ? Les jeunes qui font aujourd’hui 75% de la population, selon le dernier recensement réalisé par l’agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), ont été les grands absents.

Sur les 19 candidats retenus par le constitutionnel, tous ont boycotté la rencontre sauf deux :  l’ancien premier Ministre et l’actuel, dont on dit qu’il est un candidat par défaut de Macky Sall.

Macky Sall a en fait voulu jouer sur deux tableaux.

Sur le premier, il veut présenter à l’opinion régionale, internationale et nationale qu’il y a un large consensus national derrière ce simulacre dont le scénario, par ses multiples couacs, est digne d’un film de série B. Ainsi, au regard de la Cedeao devenue subitement bienveillante, il pourra arguer de l’application des dispositions du protocole additionnel sur la gouvernance pour dire qu’il a eu un consensus large qui l’autorise à changer les règles du jeu 6 mois avant l’élection y compris, chose gravissime, en remettant en cause, tenez-vous bien, la décision du Conseil Constitutionnel insusceptible de recours, par le biais une délibération d’une assemblée informelle.

Sur le second, vis-à-vis de la communauté internationale et des médias internationaux, dont les prises de positions le rendent extrêmement irritable, il essaie de gagner du temps et de montrer qu’il est dans un processus, qui va le mener à l’élection, à laquelle il n’est pas candidat, dans la paix. C’est sans oublier que ceux-là qui naguère étaient présentés comme des amis fiables, sont aujourd’hui chargés de tous les péchés d’Israel.  On en oublie même qu’ils tous témoins des pratiques liberticides et anti démocratiques en violation flagrante des normes internationales sur les droits civils et politiques.

Mais au fond, ce qui choque aujourd’hui, et qui sonne comme un manque de respect notoire vis-à-vis du peuple sénégalais, c’est d’une part, l’attitude de défiance du Président sortant qu’on pourrait résumer dans ce dicton attribué à Louis XIV «  NEC PLURIBUS IMPAR ». En français n’est pas égal à plusieurs.

C’est terrible ! Pendant 6 tours d’horloge vous réunissez des gens et à la fin vous leur dite, vous avez fait de belles conclusions, mais c’est moi qui décide. Décidez donc seul alors Excellence !

Pour parler vulgairement on pourrait dire « Tout ça pour ça ».

En vérité, la lueur qui a éclairé les méandres de ces palabres, est que la fracture sociale est devenue béante ; les plus optimistes refusent de l’admettre en invoquant la prière des saints. On peut le leur concéder.

Mais en creusant plus loin, on s’aperçoit qu’il ya au grand jour une conspiration qui se met en place entre d’une part, ceux qui sont proches du camp du changement de cap radical et qui refusent qu’une fois la victoire acquise, qu’on reprenne les gens du système et qu’on reproduise les mêmes travers, sans reddition des comptes, et d’autre part, les partisans du Statu quo anté, pour parler vulgairement, l’establisment qui s’est retrouvé lors du dialogue national. C’est on ne peut plus clair maintenant et Macky Sall joue en faveur de ces derniers à coup de menace, de lois d’amnistie (malgré l’opposition de la société civile et certains politiques) pour les amener à faire bloc contre la jeune garde de l’opposition à savoir Sonko, Barthélémy, Abdourahmane Diouf, Bougane…. Que certains appellent les « souverainistes ».

La partie n’est pas encore terminée, et réserve encore des surprises en termes d’alliance contre nature, et pourquoi pas de retrouvaille dans la coalition de l’opposition Yewwi Askan Wi pour faire obstacle au projet de différer encore l’alternative au Sénégal au-delà de 2024.

D’ici là attendons la décision du Conseil Constitutionnel, dont on dit qu’il sera saisi par le Président Macky Sall le 04 Mars, dés réception du rapport des deux commissions du Dialogue national pour indiquer la voie à suivre y compris après le 02 Avril qui marque la fin du mandat de l’actuel président.

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