Afrique: L'exil des Camerounais face au manque de perspectives

Plus de 6.000 enseignants, médecins et infirmiers ont quitté leur emploi dans la fonction publique ces derniers mois au Cameroun pour émigrer.

Si l'Europe est depuis longtemps une destination pour la plupart des Camerounais, un nombre croissant de personnes trouvent désormais aussi des opportunités en Amérique du Nord, notamment au Canada, où les programmes d'immigration favorisent les jeunes migrants.

Au lycée Nyom, un message pour dissuader les jeunes de prendre le chemin de la migration est régulièrement diffusé.

Mais il semble ne pas avoir d'effet. Même les enseignantes comme Josian Minta, 37 ans, ne l'écoutent pas. Elle a déjà tenté de quitter le Cameroun une fois pour la Thaïlande, il y a deux ans. "Nous sommes allées au Nigeria, à Abuja. J'ai dû envoyer mon passeport au Kenya. Un agent m'a dit OK, tout est prêt, votre visa est prêt. Mais quand je suis allée en Thaïlande, à l'aéroport, les agents de l'immigration ont pris mon passeport et ils m'ont demandé comment j'avais obtenu le visa", explique-t-elle.

En dépit de cette mésaventure, Josian Minta avoue mettre actuellement des fonds de côté pour voyager légalement au Canada, où elle pense que de nombreuses opportunités et un meilleur salaire l'attendent.

Crises multiples

L'instabilité dans les régions anglophones séparatistes, le chômage, les mauvaises conditions de travail et les salaires bas sont autant de raisons qui poussent les jeunes Camerounais à partir.

Angeline Fua, 32 ans, travaille dans une pharmacie et son désir de quitter le Cameroun grandit chaque jour. Selon elle, "en tant que pharmacien, nous sommes payés 80.000 francs CFA, alors que dans d'autres pays, comme le Canada et les Etats-Unis, on entend parler de personnes qui reçoivent 500.000 francs ou plus. Par ailleurs, le coût de la vie au Cameroun a également augmenté. Je suis mère de famille, je dois m'occuper de moi. Je dois payer les frais de scolarité des enfants, j'ai mes projets, mais avec ce qu'on gagne au Cameroun, ce n'est vraiment pas possible."

Selon Tumenta Kennedy, consultant international en migration, basé au Cameroun, "faire face aux départs massifs implique des efforts pour s'attaquer aux causes profondes de la migration, telles que l'instabilité politique, les difficultés économiques, le manque d'opportunités d'emplois et, enfin et surtout, les problèmes de sécurité. Pour faire face aux mouvements de masse, il faut s'attaquer aux goulots d'étranglement et à la corruption qui entravent le développement des activités économiques."

Destination Amérique du Nord

Tumenta Kennedy rappelle qu'actuellement, les destinations européennes traditionnelles ont fermé leurs portes aux immigrants potentiels. Selon lui, de nombreux Camerounais préfèrent désormais se diriger vers l'Amérique du Nord.

Le Canada cherche par exemple des candidats pour travailler dans sa province francophone du Québec. Et en ce qui concerne les Etats-Unis, le Cameroun a déclaré qu'en 2023, le nombre de personnes postulant à la Loterie Visa ou Green Card Lottery, qui délivre des visas d'immigrant, a augmenté de 70 %.

Les transferts financiers de la diaspora africaine sont par ailleurs essentiels au développement du continent. Selon la Banque mondiale, les envois de fonds vers l'Afrique subsaharienne s'élevaient à 54 milliards de dollars en 2023.

 

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.