De deux choses l'une au sujet du film « Le carnet » présenté jeudi au Kudeta Anosy, suivre les pas de la réalisatrice Anjaramalala Rasoanaivo sur les sentiers du lissage institutionnel ou en apprécier la souplesse narrative. Autant choisir pour la deuxième option. Maintenir une telle tension tiraillée entre l'identité étonnamment fusionnelle, grâce à la magie du cinéma, de plusieurs jeunes lycéens et lycéennes amène à penser qu'il reste des réalisateurs et réalisatrices qui ont un talent digne de leur époque. Raconter la jeunesse et son mal-être, l'exercice d'Anjaramalala Rasoanaivo a l'intelligence de sortir du fatalisme rébarbatif tenu par le narratif habituel, hérité d'un fantasme biaisé et caricatural des soi-disant valeurs chrétiennes sur la jeunesse.
Le puritanisme à la malgache se retrouve donc scalpé dans « Le carnet ». Certes, il garde des aspects du film institutionnel - produit par Imaso Ivoho et la Scac - prouvé aussi par la fin un chouia série B et l'absence de quelques détails plus cinématiques. Cependant, le message passe si c'est l'objectif. Le film raconte trois trajectoires dans un lycée de la capitale, d'un garçon, fils d'un couple « hyper-sympa » répondant au nom de Georges, son nom lui crée déjà des ennuis, balloté entre deux filles. Une vraie peste et une fuyarde en avant déjà consommatrice d'héroïne.
Le cocktail de leur microcosme sous la bannière du harcèlement scolaire donne une suite inévitable vers l'école buissonnière, les mensonges en tout genre, l'alcool et ses conséquences, indubitablement la drogue dure. Un fléau actuellement. Une gifle de Georges sur la petite peste ouvre l'impasse de l'intrigue, tandis que la fuyarde en avant finit aux urgences avec ses seringues. « Le carnet », avec des cadrages parfois approximatifs possède une musique de film à couper le souffle. Naday a réalisé la bande originale, d'une puissance maladive, mais également Da Hopp, les parrains du rap malgache. Le produit va sillonner les établissements publics dans les semaines à venir.