Ile Maurice: Les problèmes «de base» pas réglés

Après une rencontre avec les Agaléens, les membres du gouvernement et ceux de l'opposition ont tous évoqué trois problèmes récurrents : l'éducation, la santé et le logement. Et que les infrastructures fraîchement inaugurées ne serviront pas à résoudre.

Promesses à la chaîne

Lors de son discours de jeudi, Pravind Jugnauth a promis la construction de 50 unités de logement à Agaléga, précisant que c'est un projet annoncé depuis longtemps. Cette annonce avait été faite pour la première fois pendant le discours budgétaire de 2018-2019. Pravind Jugnauth était alors Premier ministre et ministre des Finances. Dans le dernier exercice, Renganaden Padayachy avait annoncé à nouveau ce projet.

Mais la réalisation n'est pas simple. Vendredi, Pravind Jugnauth est revenu sur les contraintes quant à la construction des maisons sur l'île. «Tou bann materyel bizin sorti dé lexteryer. Tou bann lekipma bizin sorti de lexteryer. Sé bann gran defi (...) Bizin sarye tou ban materyel par bato, bato parfwa fer retar.» Ce qui fait que six ans après la première annonce, rien n'a été fait dans le domaine.

Les maisons des agaléens sont quasiment toutes de la même taille, et abritent parfois plus d'une dizaine de personnes.

Les nouvelles constructions ne sont destinées ni aux habitants ni aux touristes.

Pendant ce temps, l'île a vu d'autres constructions, dont une piste et une nouvelle jetée. Il y a aussi eu des guest houses, des hangars et des espaces de stockage, entre autres, en béton. Même la route principale, du port au Village 25, a été bétonnée. Ces projets ont été financés par l'Inde, avec des matériaux transportés par bateau. D'ailleurs, c'est dans le Budget 2015- 2016 que ces deux projets avaient été annoncés pour la première fois. Vishnu Lutchmeenaraidoo, alors ministre des Finances, avait déclaré que «with the assistance of the Indian Government, Rs750 million will be invested in the construction of a new airstrip and new jetty facilities».

Cela avait été répété dans le discours budgétaire de 2017- 2018. Dans le Budget 2019-2020, les avantages de ces infrastructures avaient été mis en avant. «Our compatriots in Agalega will benefit from a new runway and a new jetty that will substantially improve air and sea connectivity.» L'achèvement était alors prévu en février 2021. Mais le Covid-19 est passé par là. Donc, le Budget 2021-2022 avait encore une fois évoqué les travaux, qui avaient déjà débuté. «The improved air and sea connectivity will definitely boost up the socioeconomic development of the population of Agalega.»

L'état de la nouvelle partie de l'école primaire, construite en 2020 par Afcons. Les projets communautaires fraîchement inaugurés ont été construits avec la même matière, et les habitants se posent des questions quant à la durabilité et surtout, à l'entretien.

Plusieurs autres annonces, promettant monts et merveilles aux Agaléens, ont été faites au fil des années. L'annonce de la construction de la piste et de la jetée par l'Inde dans le discours de 2017-2018 avait été précédée par un plan de développement majeur. «My Government has taken a historic decision to come up with a major development program for this island», avait dit Pravind Jugnauth. Celui de 2018-2019 avait aussi été marqué par l'annonce de la mise en place d'un «fishing and seafood hub», un système de tout-à-l'égout, un nouveau dispensaire à La Fourche, et des équipements pour augmenter la production d'huile de coco et d'oignons.

En 2019-2020, encore des annonces : davantage d'assistance pour les patients nécessitant des traitements à l'étranger, une mediclinic moderne avec la possibilité de consultations à distance pour les cas complexes et une salle de gym, entre autres. Et l'année financière 2020-2021 devait voir la restructuration de l'Outer Islands Development Corporation et un nouveau plan pour le développement économique d'Agaléga.

L'hôpital tout neuf des Indiens et le dispensaire actuel.

Pas de vols commerciaux envisagés

Aujourd'hui, la jetée et la piste sont une réalité. Concernant le reste, il faudra attendre car ces infrastructures sont des «poumons de développement à venir», selon Pravind Jugnauth. C'est maintenant que le gouvernement va «kontanplé ki bann aktivité ekonomik potansyel ki kapav ena dan lavenir», même si l'annonce avait été faite en 2017. Même les vols commerciaux ne seront pas une réalité de sitôt. Pas de time frame disponible pour l'instant. Et malgré les annonces successives de connectivité aérienne, le Premier ministre a confirmé que ce type de vols n'est pas envisagé à ce stade. La raison est que les vols ont un coût, et ce n'est que maintenant que les autorités vont se pencher sur cette question et évaluer la logistique disponible.

Emmanuel Jasmin, l'Acting Resident Manager d'Agaléga, revient sur le même point. «Les vols directs de Maurice à Agaléga ne seront peutêtre pas cost-effective. Il y a tout cela à voir», a-t-il déclaré, ajoutant que la présence du chairman d'Air Mauritius, Marday Venkatasamy, dans la délégation était une bonne chose. Questionné sur les vols commerciaux, ce dernier se montre plus optimiste. «Ce n'est pas une question de si on va faire, mais de quand on va faire», répond-il. Mais les contraintes sont là. C'est maintenant que la compagnie aérienne va se pencher sur la question de la fréquence et de la disponibilité des avions de la flotte, entre autres. Mais les vols ne pourront pas se faire sans les infrastructures nécessaires, comme l'hébergement, précise-til. Ce problème, dit Emmanuel Jasmin, a été évoqué avec le Premier ministre et il a fait savoir qu'il a quelque chose en tête. Mais pas plus de détails sur ce point.

Face à tout cela, plusieurs questions restent en suspens. Neuf ans se sont écoulés depuis que la jetée et la piste ont été annoncées. Depuis, il y a eu plusieurs annonces qui n'ont jamais dépassé le stade de promesses concernant le développement économique à Agaléga. Quand est-ce qu'un plan de développement réel sera présenté ? Et surtout, à quoi vont servir la piste et la jetée sans plan concret en place ?

Logements : solutions modernes

Malgré les tonnes de béton et les aides de l'Inde sur Agaléga, le transport des matériaux pour la construction de logements pose problème. Cependant, des solutions simples existent. Un expert dans le domaine avance que pour contourner le problème de transport, la solution la plus logique et connue dans le domaine est les maisons en «flat kits». Ce sont des maisons de la taille d'un conteneur. La structure est montée avec les ouvertures, puis les murs sont rabattus pour les rendre plats, ce qui facilite le transport.

Une fois sur place, il suffit de tout remonter. La taille de ces modules est certes standard, mais il est possible d'en juxtaposer plusieurs pour créer davantage de surface. Concernant les installations, il est possible de commander des cuisines ou des salles de bains déjà montées et prêtes à être installées dans la maison. «C'est non seulement cost-effective, mais aussi très rapide à monter, facile à transporter et résistant aux intempéries», explique-t-on.

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