Algérie: Ichemoul (Batna) - Ghalia Mokhnache non voyante fait rayonner la science malgré l'handicap

BATNA — Ghalia Mokhnache, une non voyante résidant à Ichemoul, dans la wilaya de Batna, a su défier son handicap pour faire rayonner la science et la connaissance, tout en mémorisant le Saint Coran dont elle maîtrise les préceptes.

C'est en se consacrant corps et âme à ses études que cette frêle quarantenaire a pu vaincre sa déficience visuelle. Titulaire de trois baccalauréats (Sciences de la nature et de la vie, Lettres, Sciences islamiques), elle s'était classée, en 2007, au premier rang à l'échelle nationale dans la catégorie des personnes aux besoins spécifiques, et à la quatrième place en 2009. Ghalia est également détentrice d'une licence et d'un mastère de langue française, d'une licence et d'un mastère en sciences islamiques (première promotion 2007-2011) et se prépare à soutenir une thèse de doctorat dans cette discipline.

Cette habitante d'Ichemoul n'a jamais quitté les bancs de l'école malgré sa réussite au concours des "Mourchidate", suivi de son entrée dans le corps des affaires religieuses et des wakfs. Encore plus fort, Ghalia est actuellement étudiante en 2ème année de psychologie et se prépare, toujours avec la même détermination, à obtenir un quatrième baccalauréat.

Malgré une courte période consacrée à l'apprentissage de l'écriture en braille (cinq jours seulement) à l'école pour jeunes aveugles de Batna, Ghalia a appris à écrire couramment en français et en arabe en se servant de cette technique d'écriture tactile qu'elle a adoptée pour ses études universitaires, toujours en s'appliquant à élargir, avec une remarquable assiduité, sa connaissance des préceptes du Livre Sacré.

Une persévérance qui lui a permis de relever le défi qu'elle s'est imposée pour obtenir plusieurs "Ijaza" (permission d'enseigner les sciences de l'islam délivrée par un alim, ou maître ou encore savant, ndlr) qui l'ont qualifiée pour intégrer une commission du ministère des Affaires religieuses chargée de la correction et de la vérification du premier Coran en Braille, en Algérie, écrit selon la méthode de narration Warsh (une des principales méthodes de récitation du Livre Sacré de l'islam).

Sa participation à cette commission, et son classement au 4ème rang des femmes non voyantes ayant obtenu des "Ijaza" dans les "dix lectures" (ou récitations, prouvées et vérifiées des Imams "Qari" du Coran), l'a engagée à approfondir ses connaissances et à chercher à obtenir d'autres "Ijaza".

La vie de Ghalia Mokhnache se caractérise par une volonté et une vitalité à toute épreuve. C'est dans son village d'Ichemoul, au coeur du massif des Aurès, que cette femme courage a débuté en tant que bénévole, enseignant les méthodes de mémorisation du Coran, avant de rejoindre son poste de Mourchida (guide) à la mosquée de sa localité.

Elle n'hésita pas, de surcroît, à étendre ses activités aux actions caritatives, sociales et culturelles à travers l'Association Siraj El Mounir dont le rayonnement a atteint plusieurs localités voisines comme Arris et Inoughissen.

Toutes les habitantes d'Ichemoul la citent en exemple de courage, d'abnégation, de pugnacité et de volonté, comme le rappelle Houda Merad, une jeune fille ayant mémorisé le Coran grâce à son enseignement et à ses conseils éclairés. Houda, suivant l'exemple de Ghalia, est aujourd'hui étudiante en 5ème année à l'Ecole Supérieure de Commerce.

Ghalia Mokhnache, a raconté, au cours d'une rencontre chaleureuse et conviviale avec l'APS, son parcours passionnant mais qui débuta très difficilement lorsque sa mère découvrit, très tôt, sa maladie des yeux (un glaucome congénital) qui l'a contraint à subir, alors qu'elle était encore bébé, une délicate intervention chirurgicale. Elle a ajouté que son instituteur à l'école Mohamed-Cherif Benakcha (alors seul établissement d'enseignement du village) a eu un "impact déterminant" sur sa façon d'appréhender l'existence, elle qui était, au départ, malvoyante.

"Cet enseignant m'a fait aimer les études et la lecture, si bien que je suis rapidement devenue une élève plutôt brillante, aux résultats exceptionnels, grâce aussi je dois l'avouer, à mes parents également enseignants", dit-elle, les yeux éteints mais brillants de reconnaissance envers son instituteur et ses géniteurs.

Ce qui émane de Ghalia, c'est cette inébranlable confiance en elle-même. "Une confiance qui m'a énormément servie, surtout en juin 1999 lorsque je perdis la vision d'un oeil, juste avant le baccalauréat, un examen que j'ai réussi malgré les avertissements de mon médecin traitant", confie-t-elle.

Elle rejoint ensuite l'Université de Constantine, malgré la perte définitive de la vue à la suite d'une opération subie à l'extérieur du pays, en 2001, et c'est de cette université que commencera son parcours hors du commun.

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