Tunisie: Pouvoir législatif - Immunité ne veut pas dire impunité

L'on se rappelle que certains avaient pu obtenir un siège à l'hémicycle et un mandat de député juste pour bénéficier de cette fameuse immunité, tels certains contrebandiers ou autres prédicateurs radicalisés qui ont pu, grâce au soutien indéfectible de leurs collègues, échapper des années durant à la justice.

L'actualité nationale a été marquée, en début de semaine, par une information diffusée par l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) qui n'a pas manqué de défrayer la chronique. Lors d'une séance plénière, dite secrète, tenue le mardi 5 mars, les députés ont eu à examiner une demande de levée d'immunité parlementaire de sept élus membres.

Cette demande, émanant d'une autorité judiciaire, a été refusée à la suite du vote des parlementaires, la requête a essuyé un non irrévocable. La raison invoquée, notamment par le député Youssef Tarchoun, les délits ne requièrent pas, selon ses propos, la levée de l'immunité puisque ils sont liés à de «simples infractions électorales».

«Ce n'est pas une raison de réclamer la levée de l'immunité à tout bout de champ ou d'une manière collective, car cela risque de perturber l'action essentielle dévolue aux membres du Parlement», prévient-il. Pendant que d'autres voix estiment que la banalisation du recours à la demande de la levée de l'immunité ne rend service à personne, avant d'ajouter qu'un seul député a exprimé sa disposition à renoncer à son immunité, mais la majorité du groupe visé est resté intraitable.

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Une question qui revient à chaque nouvelle législature

Il est à noter que l'ARP n'a publié aucune réaction. La seule version quasi officielle est venue du député Ahmed Saïdani qui a confirmé que «la session plénière de l'Assemblée des représentants du peuple a refusé de lever son immunité par une majorité absolue», sachant que les sept députés concernés par la demande seraient impliqués principalement dans des affaires liées aux élections et aux conflits avec des responsables locaux, outre une affaire en lien avec la diffusion d'informations sur les réseaux sociaux.

En tout état de cause, cette question de levée de l'immunité revient de manière quasi régulière à chaque nouvelle législature.

Les parlementaires, le plus souvent, tiennent à leur immunité et font corps pour protéger leurs collègues lorsqu'ils se trouvent dans pareille situation. Corporatisme, sens de la solidarité...Il faudra reconnaître que rares sont les fois, et ce depuis la Constituante, où les députés ont voté favorablement pour la levée d'immunité d'un député.

Il faut dire aussi que malgré certains abus et dérives, les députés se «cachent» derrière l'immunité pour se mettre, parfois à tort, au-dessus des lois.

Le fossé se creuse

Entre ceux qui se prononcent pour l'application à outrance du droit à l'immunité afin de protéger l'élu au cours de l'exercice de son mandat et ceux qui appellent à une égalité parfaite des chances de tous les citoyens, le fossé semble se creuser davantage.

Bon à rappeler, l'on se rappelle, que certains ont pu obtenir un siège à l'hémicycle, juste pour bénéficier de cette fameuse immunité, tels certains contrebandiers ou autres prédicateurs radicalisés qui ont, grâce au soutien indéfectible de leurs collègues, pu échapper des années durant à la justice.

Autre anomalie, l'on a assisté, par le passé, à des cas où la solidarité corporatiste a joué, permettant à certains élus d'échapper à la justice et de ne pas être déférés devant le parquet, au grand dam des plaignants qui se sentaient floués par cette mesure qu'ils avaient jugée, peut-être à juste titre, injuste et partiale.

Or, l'immunité est un droit constitutionnel, certes, mais qui est censée protéger les élus contre toute poursuite judiciaire liée uniquement à leur mission de représentant du peuple. En conclusion, le débat reste ouvert au vu des divergences qui empêchant de trancher dans un sens ou dans l'autre, surtout lorsqu'on constate que certains députés confondent entre immunité et impunité. Et c'est là que ça devient grave.

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