Cote d'Ivoire: Désignation du candidat du PPA-CI à la présidentielle de 2025 - Gbagbo toujours droit dans ses bottes

C'est un Laurent Gbagbo toujours politiquement droit dans ses bottes qui a répondu « oui » à la proposition de son parti de l'investir comme candidat à la présidentielle de 2025, alors qu'on s'attendait, en raison de son âge avancé et de sa santé chancelante, à ce qu'il décline l'offre. Cette candidature est probablement à but apotropaïque, c'est-à-dire suscitée pour conjurer le sort qui s'est politiquement abattu sur l'ancien président ivoirien depuis sa condamnation par défaut à 20 ans de prison en 2018 dans l'affaire dite du « braquage » de la BCEAO, en 2011, et la déchéance ipso facto de ses droits civiques et politiques. L'hypothèse d'un deal entre son parti et celui au pouvoir pour l'amnistier et le rétablir dans tous ses droits afin de permettre au président Alassane Ouattara de briguer lui aussi un autre mandat, n'est pas saugrenue, d'autant que la candidature de Laurent Gbagbo induirait celle d'Alassane Ouattara, au nom d'un parallélisme des formes...politiques à l'ivoirienne. C'est Alassane Ouattara lui-même qui avait établi cette corrélation entre sa candidature et celles de Bédié et de Gbagbo, en 2020, et il est fort possible qu'en 2025 aussi, lui et ses inconditionnels justifient son entrée en lice par la présence de l'enfant terrible de Mama dans les starting-blocks.

Le PPA-CI de Laurent Gbagbo qui peine à ratisser large, a tout à gagner de l'omniprésence de sa figure tutélaire

Et pour cela, il faudrait au préalable effacer sa peine au moyen d'une amnistie ; ce qui serait un jeu d'enfant pour Ouattara qui a des "béni-oui-oui" à l'Assemblée nationale prêts à voter une telle loi. Il n'avait échappé à personne en 2018 que la concomitance du procès et de la condamnation de Gbagbo avec son acquittement par la Cour pénale internationale (CPI), avaient pour objectif de le rendre inéligible au cas où il rentrait en Côte d'Ivoire auréolé de sa victoire judiciaire obtenue à La Haye, alors que le dossier dans lequel il était poursuivi devant la Cour d'assises d'Abidjan, était quasiment vide. Le délit n'était pas véritablement constitué parce qu'il n'y a pas eu de braquage au sens stricto sensu du terme, et la victime présumée qu'est la BCEAO n'avait pas déposé plainte et avait même fait connaitre par écrit, avant le procès, qu'elle n'avait subi aucun préjudice.

De la même manière que le potentiel candidat alors redouté par la coalition au pouvoir, avait été foudroyé judiciairement sur fond de règlement de comptes politiques, de la même façon il pourrait être réhabilité, cette fois-ci encore, pour les besoins de la cause, en considérant sa condamnation comme nulle et de nul effet pour le rendre à nouveau présidentiable, et pour ouvrir du coup, le boulevard à Alassane Ouattara pour un éventuel quatrième mandat. Ce serait du "win-win" ou du "gagnant-gagnant" pour ces deux cadors de la politique ivoirienne qui n'ont pas désigné, à ce jour, de dauphins putatifs malgré leur santé fragile et le nombre impressionnant de cadres au sein de leurs partis respectifs.

On espère que cette candidature de l'ancien président, ne sera pas source de tensions politiques

Le Parti des peuples africains-Côte d'Ivoire (PPACI) de Laurent Gbagbo qui peine à ratisser large depuis sa création, a tout à gagner de l'omniprésence de sa figure tutélaire, parce que c'est grâce à ce "Wikipédia" de l'esbroufe, de la roublardise et de la manipulation, que le parti maintient son semblant de cohésion et rêve de jouer les premiers rôles dans les années électorales à venir. Le retrait volontaire ou forcé de Gbagbo de la vie politique, pourrait, en effet, signer la mort précoce de ce parti qui peine à ratisser large depuis sa création. Et pour permettre au chef et au parti lui-même de rester politiquement en vie, rien de mieux que de jeter un pavé dans la mare, comme ce qu'ont fait les membres du Comité central en annonçant la candidature du « Woody de Mama » à l'issue de leur réunion samedi dernier.

C'est un coup double, voire triple que Koné Katina et ses camarades tentent ainsi, puisque leur annonce remet en selle un homme considéré, par la plupart de ses compatriotes, comme un "has been", en espérant des dividendes politiques pour leur formation qui est, rappelons-le, dans un état comateux depuis qu'il a été porté sur les fonts baptismaux par Laurent Gbagbo dès son retour de La Haye. 2025, c'est pour bientôt, et on espère que cette candidature de l'ancien président, qu'elle soit validée ou rejetée, ne sera pas source de crispations ou de tensions politiques meurtrières dans ce pays qui en a connu des plus sanglantes ces vingt dernières années.

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