Pour faire face à cette forme émergente de violence sexiste, l'Etat a mis
en place un cadre législatif et institutionnel visant la lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles. A la loi 58-2017 s'ajoutent moult efforts qui convergent vers la sensibilisation du public quant à la gravité de cette forme de violence.
La violence cybernétique avance à pas de géant ! Chaque jour, chaque, heure, chaque minute et chaque seconde, des femmes et des adolescentes sont prises au piège par les détracteurs cybernétiques pour qui, un mot de passe dévoilé permet de mettre à nu toutes les données personnelles d'une personne et facilite ainsi la voie à la violence --voire au crime-- cybernétique.
Pour faire face à cette forme émergente de violence sexiste, l'Etat a mis en place un cadre législatif et institutionnel visant la lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles. A la loi 58-2017 s'ajoutent moult efforts qui convergent vers la sensibilisation du public quant à la gravité de cette forme de violence.
Aujourd'hui, un nouvel acquis en la matière vient étoffer cette panoplie de mesures et d'actions. En effet, le Centre de recherches, d'études, de documentation et d'information sur la femme (Credif) a lancé une plateforme numérique sur la sensibilisation sur la cyber-violence. Baptisée «Ne nourris pas le monstre», elle représente un outil accessible au public, lui permettant de prendre connaissance et de l'ampleur du phénomène et de sa gravité, et d'être orienté vers les mesures, à même de lui faire face pour une sécurité numérique que l'on veut optimale.
Il est à savoir que cette plateforme s'inscrit dans le cadre de toute une campagne de sensibilisation, menée, conjointement, par le Credif, le ministère de la Famille, de la Femme, de l'Enfance et des Séniors et le ministère de l'Education avec le précieux appui de l'ambassade du Canada en Tunisie.
Prise de conscience et de précautions
Le lancement de cette campagne et de la plateforme a eu lieu mercredi dernier au lycée sis rue de Russie à Tunis. Le choix du lieu n'est pas fortuit : il va de pair avec la célébration de la Journée mondiale de la femme et a pour finalité de rendre hommage à toutes les femmes leaders qui ont su marquer d'une pierre blanche le militantisme féminin pour la liberté et la dignité. L'assistance a été à dominante jeune. Ces élèves, qui ne sont autres que les citoyens de demain, ont bien assimilé le message. «La Tunisie compte grandement sur vous », ainsi s'adresse Mme Amel Belhaj Moussa, ministre de la Famille, de la Femme, de l'Enfance et des Séniors, au jeune public, insistant sur l'impératif de lutter ensemble contre la violence, en général, et celle dite cybernétique, en particulier.
Certes, l'Etat oeuvre pour venir à bout de ce fléau. Cependant, sans la prise de conscience des jeunes et des femmes, en particulier, «le monstre» a toutes les chances de se nourrir des données personnelles des internautes et de menacer leurs vies privées, leur intégrité et leur sérénité. «Pour naviguer en toute sécurité, il convient de prendre toutes les précautions. Le Credif vient d'instaurer une application à même de vous aider à mieux sécuriser vos comptes et vos vies privées», souligne la ministre. Un avis que partage M. Mohamed Ali Boughdiri, ministre de l'Education, qui saisit l'occasion, d'ailleurs, pour indiquer que le dossier éducatif figure au coeur des priorités de l'Etat.
La nouvelle application mise en place par le Credif s'aligne parmi tant d'autres actions et programmes nationaux, établis pour maximiser la sécurité des femmes, des filles et des jeunes contre la violence et les comportements à risques. «Je tiens à saluer le ministère de la Famille pour l'appui qu'il apporte aux familles tunisiennes via le programme du renforcement de l'autonomie économique des femmes ; un programme qui contribue à une meilleure qualité de la vie des familles et à lutter efficacement contre l'abandon scolaire et ses fâcheuses conséquences», indique-t-il.
Pour un Internet respectueux et équitable
Prenant la parole, Mme Lorraine Diguer, ambassadrice du Canada en Tunisie, rappelle les avantages du monde numérique lesquels ont été mis au pied du mur face à la violence qui gagne du terrain. «Personne n'est à l'abri de la cyber-violence, laquelle s'installe à froid et connaît plusieurs fins dont l'intimidation et le harcèlement. Il faut lutter contre ces pratiques afin de protéger la santé mentale et l'intégrité des personnes et s'engager ainsi pour la justice sociale », souligne-t-elle. Et d'ajouter que la Tunisie connaît des avancées considérables en matière d'égalité de genre. Elle lutte aussi contre la cyber-violence à l'égard des femmes pour construire un Internet respectueux et équitable.
Quatre femmes sur cinq sont victimes
Il faut dire que l'intérêt du Credif pour la violence cybernétique s'appuie sur des indicateurs alarmants. La pandémie du Covid avait été une occasion propice à la prolifération de la cyber-violence à l'égard des femmes. En 2021, le Credif avait réalisé une étude portant sur «la violence faite aux femmes dans les médias sociaux : le modèle de facebook». Ce travail avait montré que quatre femmes sur cinq subissent la cyber-violence en Tunisie. En 2022, une autre étude a été effectuée sur la violence à l'égard des femmes et des filles. Les résultats avaient montré que 51% des femmes sont victimes de violence verbale, 24% de harcèlement sexuel et 19% de harcèlement moral. «D'où la focalisation sur cette forme de violence que l'on assimile, d'ailleurs, à un monstre qui se nourrit des données personnelles des filles et des femmes pour grandir. La présente campagne de sensibilisation, explique Mme Thouraya Belkahia, directrice générale du Credif, comprend trois affiches, un site web ( www.nenourrispaslemonstre.tn ) qui documente des témoignages, des conseils pour mieux se protéger contre ce fléau ainsi qu'un numéro vert ( 1.809) pour signaler tout abus».
Une échelle de mesure spécial cyber-violence
Présentant brièvement la présente campagne, Mme Khadija Souissi indique que le site web s'articule autour de trois volets : la protection, la prévention et les mécanismes de signalement. Il met, également, à la disposition des internautes une échelle de mesure spécial violence cybernétique, afin de mieux cerner son degré de sécurité ou de vulnérabilité, et ce, indépendamment des précautions prises pour sécuriser son compte et ses données personnelles. «Il convient aussi de rappeler les mécanismes de protection de l'enfance mis par l'Etat, dont le portail de protection de l'enfance, la ligne verte 1809 ainsi que les liens relatifs à la protection de l'enfance», souligne-t-elle, en conclusion.