Libye: Six mois après la catastrophe de Derna, Amnesty appelle à une enquête sur la responsabilité du drame

La maison de Hani Elbah, photographiée ici le 24 septembre 2023, comme tant d’autres, a été emportée par les inondations du 11 septembre à Derna, en Libye, qui ont tué des milliers de personnes.

Il y a six mois jour pour jour, la ville de Derna, en Libye, était submergée par les eaux après la rupture de deux barrages provoquée par la tempête Daniel. Bilan : plus de 4 300 morts, des milliers de disparus et près de 45 000 déplacés. Ce lundi 11 mars 2024, Amnesty International publie un rapport sur cette catastrophe dans lequel elle dénonce le manque d'équité dans l'accès aux indemnisations et appelle à des enquêtes approfondies sur la responsabilité de puissants acteurs militaires et politiques.

C'est un véritable réquisitoire contre le gouvernement d'union nationale et les forces armées arabes libyennes que dresse l'ONG dans ce rapport. Amnesty dénonce d'abord l'insuffisance des mises en garde et les consignes contradictoires émises par les autorités avant le passage de la tempête Daniel.

« Certains officiers de haut rang, dont le directeur de la sécurité, ont demandé à la population de respecter totalement le protocole de précaution en vigueur dans la ville, tandis que dans d'autres régions, les autorités ont appelé la population à évacuer. Ainsi, les gens étaient vraiment perdus », explique Bassam al-Kantar, chercheur sur la Libye à Amnesty. Et d'ajouter : « Et ceux qui ont évacué les zones proches de la mer se sont déplacés vers des endroits qui ont été les plus touchés ».

Si 13 000 personnes touchées par la catastrophe ont été indemnisées, l'ONG pointe le manque d'équité dans l'accès au secours et aux indemnisations financières. Certaines familles de déplacées, des réfugiés et des migrants, en ont ainsi été exclus. « Ils n'ont jamais reçu aucune compensation », tance M. al-Kantar.

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« Le gouvernement de l'Est a déclaré qu'il avait mis sur pied un comité deux semaines après la catastrophe pour permettre une évaluation complète des étrangers qui ont été affectés par les flots. Mais 5 mois après la création de ce comité, rien n'a été fait », ajoute-t-il.

Impossible aujourd'hui, selon Amnesty, d'émettre la moindre critique sur la façon dont les autorités ont géré la crise. L'ONG dénonce en parallèle l'absence d'enquêtes sur les responsabilités des fonctionnaires, commandants de haut rang et membres de groupes armés puissants.

« Des blocs d'immeubles qui ont été complètement emportés »

Raif Wafa, directeur en Libye de l'ONG Super Novae, mobilisée pour venir en aide aux sinistrés, joint à Tripoli, s'insurge de même manière : « Il y a certaines personnes qui ne sont toujours pas capables de retourner chez elles. Ce sont des blocs d'immeubles - pas une maison ou deux - ce sont des blocs d'immeubles qui ont été complètement emportés. Et les infrastructures sont encore faibles, l'internet ne marche pas très bien, l'électricité se coupe encore. »

« En matière de soins, dit-il encore, il y a beaucoup d'ONG, les ONG internationales et locales ont répondu assez rapidement, donc il y a beaucoup de cliniques qui ont eu l'occasion de rouvrir, y compris la clinique dans laquelle nous opérons nous-mêmes ; ça a permis de limiter les dégâts humainement. »

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