Sénégal: Élection présidentielle, une équation à plusieurs inconnues

12 Mars 2024
analyse

Le coup d'envoi de la campagne électorale de l'élection présidentielle est finalement donné le Dimanche 10 mars, après que le président de la république ait pris le décret convoquant le corps électoral pour le scrutin du 24 Mars 2024.

Cette prérogative qui relève du titulaire du pouvoir réglementaire, ne laisse pas pour autant planer beaucoup de questionnements, au regard des péripéties qui l'entourent et qui n'ont pas livré tous leurs secrets.

Mise à part les nombreuses raisons socio religieuses, naguère invoquées par le Président de la République pour retenir la date de la présidentielle au 02 Juin 2024, et que le Conseil constitutionnel a purement et simplement rejeté, la forte implication partisane du président de la République pose véritablement problème.

Même si certains pensent que c'est le dialogue national qui a fait cette proposition de date, que le président Macky Sall a soumis au Conseil. Ce débat est définitivement clos aujourd'hui, car tout le monde s'accorde sur le fait que le dialogue national n'est qu'une instance Adhoc, qui ne peut en aucun cas se substituer au pouvoir régalien du Président, ni chambouler le calendrier électoral.

En revanche ce qui est inédit, c'est le recours en annulation introduit devant la Cour suprême pour excès de pouvoir, afin de demander l'annulation du décret présidentiel de convocation du corps électoral, au motif que la durée de la campagne électoral « fait moins de 21 jours ».

Au moment où tous les candidats sont en campagne, des candidats dits « spoliés », exigent la reprise du processus électoral pour des motifs aussi légers, au risque de pousser le pays vers un inconnu, à savoir la date de l'élection arrachée de haute lutte, avec un effet multiplicateur de 19.

Ainsi donc, les décisions du conseil constitutionnel insusceptibles de recours se verraient ainsi retoquées de fait, par la Cour suprême, de laquelle on attend une invalidation de sa décision portant publication de la liste des 19 candidats, et bien sûr celle portant sur la date du scrutin.

Les auteurs de ce recours eux-mêmes savent qu'il n'a aucune chance de prospérer en droit, pour les raisons évoquées. En revanche pour des raisons politiciennes, ils se sont persuadés que c'est bien la seule façon de « torpiller » le processus électoral au grand bonheur du PDS.

Si par extraordinaire ils réussissent, la grosse équation sera de savoir comment organiser une élection présidentielle sans le juge électoral. Il est impensable qu'un juge puisse accepter une telle humiliation en restant en place. C'est bien le but recherché n'est-ce pas ?

Si on poursuit la logique, un autre recours pourrait être intenté sur la date du scrutin, qui fatalement va changer. Alors on irait tout droit vers une « non élection » jusqu'en 2025, et au demeurant le mandat du Président aura expiré, le pays resterait sans président élu, ou alors Macky Sall restera en attendant son successeur. Et ainsi on reviendrait au schéma initialement retenu par les « dialogueurs » qui souhaitaient que Macky Sall reste au pouvoir jusqu'à l'élection de son successeur. Est-ce bien ce que les sénégalais et sénégalaises veulent ? Je n'en suis pas sûr. Tenter ce pari est très risqué.

Le Conseil constitutionnel j'en suis sûr, saura en revanche, user de ses prérogatives prétoriennes pour siffler la fin de la récréation et ramener le pays dans la trajectoire qu'il n'aurait jamais dû quitter.

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