Tata était assise devant la grande porte de sa demeure. Au-dessus d'elle, inscrites en grosses lettres rouges sur fond noir : « Le Sénégal a la gangrène ». Tata n'y allait pas du dos de la cuillère. Elle vociférait, beuglait que la corruption est le virus qui s'empare du pays. Elle en avait haut le coeur. Sa décision de guerroyer contre le mal était motivée par le fait que le marché public auquel elle avait fondé espoir pour remplumer ses affaires lui était passé sous le nez. Sa rivale, Khoudiandiaye, avait raflé la timbale. Tata soupçonnait une entourloupe. Son dossier de soumissionnaire était béton. Des mains expertes y avaient travaillé. A coup sûr, elle était le moins disant. Donc l'affaire lui revenait. Elle apprit que Khoudiandiaye, marraine d'un prétendant au trône, avait eu droit à la courte échelle. Tata se mit sur ses ergots. Elle regrette de ne n'avoir pas été candidate à la présidentielle pour un grand coup de balai.
Elle casserait le marché quitte à faire usage de la tronçonneuse. Casser pour casser, elle adressa une requête à la Cour de Cassation. Là, on lui indiqua que ce n'était pas la bonne porte. Tata décida de tenir siège. De guerre lasse, elle rechaussa ses sandales, direction Assemblée Nationale pour une commission d'enquête. Elle trouva porte close. Mégaphone en bandoulière, elle parcourut rues et avenues, boulevards et ruelles. Elle criait : « Corruption ! En bas ! Concupiscence ! En bas ! La patrie ou la mort, nous vaincrons ! Merci, camarades » Et quelqu'un derrière elle de rependre : « La poitrine ou l'amour nous vaincrons »