Madagascar: La question de l'interruption volontaire de grossesse avance peu

La semaine du 11 mars a été marquée par la visite à Madagascar de la directrice régionale pour l'Afrique australe et orientale du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA). L'occasion pour Lydia Zigomo d'aborder différents sujets liés aux droits des femmes et à leur autonomisation, à commencer par l'avortement, interdit sur l'île même pour raisons médicales. La proposition de loi en faveur de l'interruption thérapeutique de grossesse déposée en 2021 n'a jamais été mise à l'ordre du jour. Et cette année électorale n'est pas pour rassurer les associations qui se battent pour faire évoluer la loi.

« On influence les gouvernements à faire des lois. Mais on ne les faits pas nous-mêmes », rappelle en préambule Lydia Zigomo, la directrice régionale de l'UNFPA. Car des notes et des lois en lien avec les droits humains votées récemment, il y en a : la castration chirurgicale des violeurs d'enfants, la promotion de l'abstinence ou la disparition des cours d'éducation sexuelle complète à l'école... Autant de sujets qui ont divisé la société malgache.

« On est en discussion avec le gouvernement, sur les lois qui sont passées, pour s'assurer que la protection des droits humains est réellement respectée. Et concernant l'avortement, c'est la même chose. Nous, en tant qu'UNFPA, nous ne disons pas que l'avortement est un moyen de contraception. Toutefois, on sait que dans certaines circonstances, pour le droit des femmes, l'avortement devrait être proposé. Avec nos partenaires, nous fournissons les informations sur les meilleures pratiques dans la région pour que le gouvernement puisse faire les meilleures lois pour sa population », explique Lydia Zigomo.

« Dans beaucoup de pays, l'avortement thérapeutique est autorisé sous certaines conditions. Dans le cas du viol par exemple, ou quand la santé de la mère est en danger. Et je pense que c'est une question sur laquelle les femmes malgaches doivent être consultées, pour partager leur point de vue et leur volonté ce qui leur semble le mieux pour elles : ça, c'est une décision que le pays devrait prendre », poursuit-elle.

Cependant, l'avortement, même thérapeutique, reste totalement occulté des débats actuels, déplore la militante féministe Kemba Ranavela, cofondatrice du mouvement pro-choix Nifin'Akanga :

« On parle beaucoup de la condamnation des violeurs, donc on parle beaucoup des droits des femmes et des victimes, mais on ne parle plus du tout des victimes de viol qui peuvent tomber enceintes. On ne parle pas du tout de la façon dont on va les prendre en charge. Est-ce qu'elles ont le droit d'avorter ? La question n'est plus du tout abordée. Et avec les élections législatives qui arrivent en mai, je doute que cette proposition de loi d'interruption de grossesse pour raisons médicales et en cas de viol et d'inceste soit mise à l'ordre du jour des débats parlementaires. Aborder ce sujet pendant la campagne, pour beaucoup de candidats, c'est se saborder avant les élections, parce que c'est un sujet éminemment clivant. »

Or, les défenseurs de l'avortement thérapeutique rappellent qu'il n'y a pas de « bon moment » : c'est « toujours le moment, lorsqu'il s'agit de sauver la vie de femmes ».

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