L’éducation est le ciment de nos sociétés. Elle est un moteur de changement, de croissance et de progrès social sur le long terme. Ces dernières années, les systèmes éducatifs ont connu de véritables changements, souvent subis d’ailleurs. En temps de crise dans un pays, l’éducation est souvent durement et directement affectée. Les instabilités politiques, l’insécurité alimentaire ou encore les crise sanitaires fragilisent les systèmes éducatifs et pénalisent toute la société apprenante.
En juin 2021, alors que la crise de la COVID-19 se répand en Afrique, 297 millions d’apprenants sont concernés par les fermetures d’écoles et d’universités sur le continent [1]. Avant la période de pandémie, les progrès réalisés en matière d’accès à une éducation de qualité étaient insuffisants pour corriger les hétérogénéités territoriales. La crise sanitaire n’a fait qu’empirer ce bilan avec des conséquences lourdes dans de nombreux pays – sur 80% des 104 pays examinés par l’ONU, des pertes d’apprentissages ont été constatées. Si rien n’est fait ces prochaines années, on estime que d'ici à 2030, 84 millions d'enfants et de jeunes ne bénéficieront pas d'un accès à l'éducation, et environ 300 millions d'élèves ne développeront pas les compétences mathématiques et d’alphabétisation de base.[2]
Dans ce contexte, la transformation numérique ouvre le champ des possibles afin de provoquer un réel rattrapage, voire de changer la face des systèmes éducatifs en Afrique et leurs influences sur le reste du monde.
L’essor du e-learning en Afrique, un modèle de réussite et source de nombreuses opportunités
L’accès à une formation de qualité est un immense défi pour les générations actuelles et futures. Il s’agit d’un défi politique et sociétal qui contribue également à l’attractivité d’un pays et à sa croissance économique. Ainsi, lorsque les écoles sont fermées, c’est toute une économie qui est en berne. L’éducation est d’autant plus centrale sur le continent africain, où la jeunesse représente 77% de la population et sachant que, 60% des 15-17 ans ne sont pas scolarisés[3]. Pour freiner ce retard accumulé, l’UNESCO a renforcé ses projets avec ses partenaires de premier plan pour proposer des solutions rapides et efficaces. Le projet « Technology-enabled Open Schools for All » mis en place avec Huawei en Égypte par exemple, est un modèle de réussite d’école numérique devenue une référence pour les autorités locales. Déployé également en Éthiopie et au Ghana, ce programme consiste à tester des plateformes éducatives numériques, à former des enseignants et des élèves aux outils digitaux notamment. En Égypte, 300 enseignants ont déjà bénéficié d'une formation digitale grâce à ce projet et le nouveau centre d'apprentissage mis en œuvre s’adresse à pas moins de 950 000 éducateurs, de la maternelle au secondaire, pour renforcer les capacités en matière d'enseignement à distance et d'alphabétisation numérique.
L’avènement du e-learning dans les systèmes éducatifs est le premier signe d’intégration réussie des nouvelles technologies. Encore faut-il s’assurer que les infrastructures réseaux existent et fonctionnent en continu partout sur le territoire. L’Afrique a pris la mesure du e-learning bien avant la crise sanitaire. Mais post période de pandémie, le distanciel s’est invité et les outils se sont multipliés. En 2022, le marché du e-learning était estimé à 2,8 milliards de dollars. En 2028, il devrait presque doubler pour atteindre 5,2 milliards de dollars.[4] Les entrepreneurs également saisissent l’opportunité et développent des plateformes professionnelles parfois inédites. C’est le cas de la Senagriculture Academy, qui propose désormais une formation à distance pour parfaire les connaissances et le savoir-faire pour exercer, paradoxalement, un des métiers les plus manuels[5]. Le secteur agricole est stratégique pour le pays, contribuant à près de 17% du PIB et employant plus de 60% de la population[6].
S’il permet de connecter les élèves et étudiants du continent à une éducation de qualité partout où ils se trouvent, le digital learning est aussi perçu par les autorités comme une alternative à l’expatriation. En offrant la possibilité aux étudiants africains d’accéder aux cours des écoles internationales les plus réputées, il freinerait la fuite des cerveaux – toutefois, aucune étude ne peut confirmer ce phénomène à date. Le e-learning est incontestablement l’un des outils privilégiés afin de permettre un rééquilibrage du niveau d’éducation sur le territoire. Si la démarche offre une accessibilité accrue à des programmes éducatifs, il est toutefois nécessaire de mettre tout en œuvre pour garantir une expérience d'apprentissage de qualité et des interactions étudiants-enseignants.
Expatriation, fuite des cerveaux, il est in fine essentiel de construire un écosystème afin d’endiguer ces fléaux dont souffre le continent africain. Tel est en substance le message porté par Adnane Ben Halima, Vice-Président en charge des relations publiques de Huawei Northern Africa, lors d’un X Space organisé à Barcelone pendant le Mobile World Congress, sur la thématique « La formation numérique, moteur de la digitalisation du continent africain ». Par écosystème, le représentant de l’entreprise entend le développement des marchés, la mise en place d’un cadre réglementaire et l’adoption d’une stratégie nationale du numérique. Bénéfique pour les économies africaines, cet ensemble créera un champ d’opportunités en termes d’accès des jeunes au marché de l’emploi, tout en donnant la chance à des start-ups de croître à l’échelle nationale et de s’étendre à l’international.
L’adaptation des formations aux réalités du marché du travail du futur
Si les outils numériques révolutionnent les formats d’enseignement à tous les niveaux, l’enjeu de la formation préoccupe également les autorités. L’intégration des nouvelles technologies passe non seulement par les outils mais surtout par les connaissances. Les NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) s’installent progressivement dans l’ensemble des branches des économies africaines. Suivre ces évolutions, les comprendre, se les approprier pour en tirer profit – cela s’apprend.
Les NTIC façonnent les nouveaux métiers de demain, qui n’existent pas encore aujourd’hui et c’est la raison pour laquelle il est indispensable que les formations professionnelles s’adaptent aux réalités locales. Le déficit de techniciens et ingénieurs dans le domaine du numérique s’observe dans les quatre coins de monde. Désormais, l’Afrique dispose de tous les atouts nécessaires pour combler ce déficit en s’appuyant sur une population jeune, mais également en développant son attractivité sur la scène internationale. C’est tout un écosystème concerné par l’employabilité des jeunes qui est en mutation, et qui propose à la fois des nouveaux contenus éducatifs et de nouvelles façons d’apprendre et de contribuer à l’économie numérique, afin de former des jeunes cadres opérationnels le plus tôt possible et des entrepreneurs à succès.
Lors du MWC à Barcelone cette année, Huawei a présenté des initiatives innovantes pour répondre à ces défis à l’occasion du Huawei Talent Summit. Il a notamment été annoncé la mise en œuvre d’un projet en partenariat avec l’Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie (UIL) au Maroc, visant à former 10 000 jeunes, enseignants et professionnels de l’alphabétisation aux nouvelles technologies. Ces participants bénéficieront de formations approfondies dans le cadre du déploiement à l'échelle nationale prévu pour 2025.
L’adaptation des outils éducatifs et des contenus est essentielle pour réussir la mutation des systèmes d’apprentissage en Afrique. Les autorités du continent s’organisent déjà depuis plusieurs années pour mener à bien des projets éducatifs allant dans ce sens à travers des politiques publiques intégrées. Le Bénin par exemple, a entériné un chantier colossal baptisé « E-education » dans le cadre du Programme d’actions du gouvernement (PAG) 2021-2026 pour accélérer la digitalisation des programmes universitaires, l’amélioration de l’apprentissage et de la transmission du savoir via les outils numériques[7].
Il est donc urgent de prendre en considération les réalités socio-économiques et infrastructurelles pour réussir l’intégration complètes des NTIC dans les systèmes éducatifs, soutenue par la mobilisation de tout un écosystème en faveur d’une pédagogie innovante sur le continent.
[1] Les défis de l’éducation post Covid-19 : implications et innovations au niveau des curricula, La Tribune Afrique, janvier 2022.
[2] Objectif 4 : Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie,Nations Unies, ODD
[3] Huawei, acteur de la révolution numérique de l’éducation en Afrique, Afrik 21, décembre 2023.
[4] Forbes Afrique, Août-Septembre 2023.
[5] Agritech : Une startup Sénégalaise se lance dans la formation E-learning agricole, SocialNetlink, 2021.
[6] « Pourquoi le Sénégal n’a pas encore connu sa révolution agricole », Jeune Afrique, octobre 2023.
[7] Bénin : le gouvernement accélère la numérisation de son secteur éducatif, We Are Tech Africa, 27 janvier 2022