Burundi: Le pouvoir ne reconnaît plus Agathon Rwasa comme chef du principal parti d'opposition

L'opposant historique n'est plus officiellement à la tête du parti Congrès national pour la liberté (CNL), aux yeux du pouvoir burundais. Ce n'est pas la première fois qu'il est débarqué manu militari de la présidence de son parti.

Le ministre de l'Intérieur a pris acte dans une correspondance rendue publique lundi 18 mars, des décisions du congrès extraordinaire organisé par un groupe de dissidents du principal parti d'opposition le 10 mars dernier. Réunion qui s'était déroulée sous haute protection du pouvoir, malgré les protestations d'Agathon Rwasa qui dénonce un coup de force orchestré par le parti au pouvoir, à un an des législatives.

L'actuel ministre de l'Intérieur burundais, Martin Niteretse, reconnait officiellement comme nouveau président du parti CNL un certain Nestor Girukwishaka, élu lors dudit congrès du 10 mars. Tous les partisans d'Agathon Rwasa qui avaient tenté de s'approcher de la salle où était organisée cette réunion ont été refoulés ou arrêtés par la police, selon des témoins.

Aujourd'hui, plusieurs politologues dénoncent « une grave violation des statuts du parti CNL et des lois du pays ». Interdiction de toutes activités politiques depuis plus de dix mois, éviction de la tête de son parti CNL orchestré par le pouvoir, répression permanente de ses militants depuis des années ou encore, impossibilité de se présenter sous forme d'une coalition d'indépendants comme en 2015 : le principal opposant burundais ne dispose pratiquement plus d'aucune marge de manoeuvre pour les législatives de l'année prochaine, estiment plusieurs observateurs. « Si les choses devaient rester ainsi, les chances d'Agathon Rwasa de constituer un contre-poids, une force alternative au pouvoir du CNDD-FDD sont vraiment très minimes, pour ne pas dire réduites à zéro », résume Denis Banshimiyubusa, professeur de sciences politiques à l'Université du Burundi.

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« Vers un régime monopartisan »

Les partis politiques d'opposition et la société civile indépendante alertent sur ce qu'ils qualifient d'« un pas de plus vers un verrouillage total de l'espace politique au Burundi par le parti CNDD-FDD », au pouvoir depuis près de vingt ans. « On se dirige de facto vers un régime monopartisan et là, ce sera une situation très difficile à vivre pour les Burundais », analyse Denis Banshimiyubusa.

Ces partis politiques et la société civile indépendante dénoncent une communauté internationale qui a décidé de fermer les yeux selon eux sur « les crimes du pouvoir dictatorial du président Évariste Ndayishimiye ».

Dernier recours pour Agathon Rwasa, une plainte devant la cour administrative de la Cour suprême. Mais même le président burundais a accusé à plusieurs reprises les juges d'être « une honte » à l'origine de tous les maux du pays.

Ce n'est pas la première fois qu'Agathon Rwasa est débarqué manu militari de la présidence de son parti. Dans les mêmes conditions, Agathon Rwasa avait déjà perdu la tête de son parti en 2010, à l'époque les Forces nationales de libération (FNL), là aussi au cours d'un congrès organisé par un petit groupe de frondeurs sous la protection du pouvoir. Le gouvernement s'était empressé ensuite de reconnaître ces dissidents comme les dirigeants officiels du principal parti d'opposition de l'époque.

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