Tunisie: L'ordre des médecins du pays alarmé après la mort d'un psychiatre en prison

En Tunisie, la communauté médicale est toujours sous le choc après l'annonce de la mort de l'un des leurs en prison, la semaine dernière. Alors que plusieurs médecins et pharmaciens se trouvent actuellement en prison en Tunisie pour des accusations similaires, l'ordre des médecins avait convoqué une réunion ce mercredi 20 mars pour alerter sur la situation.

« Pourquoi on arrête les médecins ? Pourquoi on les garde en détention préventive ? Il ne représente pas un danger pour la société. » Un homme est mort, plongeant dans le choc toute une profession, réunie ce mercredi. Accusé d'avoir délivré des ordonnances dites de complaisance et donc de trafic de médicaments présumé, le Dr Mohamed Hajji, psychiatre, avait été placé en détention préventive. Il a succombé après quelques jours seulement derrière les barreaux.

Abusives ou pas, les prescriptions du Dr Hajji ? La justice le dira peut-être un jour. En attendant, lui n'est plus là pour se défendre, au grand désarroi de ses confrères, dont la docteure Rym Ghachem, qui s'exprime : « Nous avons un métier à risques ! Regardez, il y a sept psychiatres qui ont été emprisonnés cette année ! Sept ! » Applaudissements.

« Un précédent dangereux »

« Ce qui nous met en colère, poursuit-elle à notre micro, c'est ce contexte. Ce médecin qui est âgé de 63 ans et qui a travaillé pendant plus de trente ans dans une région où il n'y a pas beaucoup de psychiatres. Il a travaillé dans des conditions assez difficiles, la psychiatrie draine actuellement énormément de patients. On aurait voulu éviter cela. »

De santé fragile selon ses confrères, le Dr Hajji serait mort suite à des complications pulmonaires quelques jours après son arrivée en prison.

« Un médecin qui meurt en prison, c'est un précédent qui est très dangereux, insiste encore la docteure Rym Ghachem. Par exemple, au Kef, on a un psychiatre qui est en prison et il n'y a pas de psychiatre au Kef. Les malades sont obligés de dépenser 140 dinars [environ 41 euros, ndlr] - ce qui est à peu près le tiers du Smic - pour venir à Tunis se faire traiter et nous ne voulons pas de ces conditions pour nos malades. »

Face à des conditions d'exercice qui se détériorent, ce sont plus de 1300 médecins qui ont quitté la Tunisie l'an dernier. Soit davantage que le nombre de praticiens que le pays forme annuellement.

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