Dakar — A moins de quarante-huit heures de l'élection présidentielle, des étudiants de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) tentent de rallier leurs localités pour ne pas rater ce rendez-vous majeur dans la vie de la nation malgré un nombre de bus insuffisants. Des bonnes volontés et des partis politiques organisent des caravanes gratuites pour permettre à ces étudiants d'aller voter.
Toutefois, certains d'entre eux regrettent le fait que leurs municipalités d'origine n'aient pas débloqué les fonds nécessaires pour mettre à leur disposition un nombre suffisant de bus.
Sur l'avenue Cheikh Anta Diop, à côté d'une rangée de bus, des étudiants s'impatientent pour entendre l'appel de leur nom et monter à bord de ces véhicules. Dans cette ambiance particulière, Gertrude Bruna Badiane, taille moyenne de teint clair, attend son bus depuis trois heures. Pour cette étudiante en partance pour Oussouye, en Casamance, "les conditions ne sont pas réunies" pour voyager. "Les conditions d'accueil ne sont pas très bonnes puisqu'on nous avait donné rendez-vous à 11 heures mais à 13 heures on est toujours là " a-t-elle regretté tout en se disant ravie d'aller voter chez elle.
Sény Diop, étudiant au département de lettres modernes a déjà pris place dans un bus à destination de Diourbel. Pour ce jeune d'une vingtaine d'années, l'enjeu de l'élection est important. "L'élection présidentielle se tient tous les cinq ans. Cette année, on a remarqué de l'engouement chez les étudiants parce qu'ils sont très en colère contre les autorités universitaires qui ont fermé ce temple du savoir durant huit mois", dit-il. "On a besoin d'une transition intergénérationnelle puisque depuis 1960 presque les mêmes dirigeants nous gouvernent", renchérit Sény.
Des bonnes volontés à la rescousse
Trouvé devant un bus en train de discuter, Babacar Fall, de teint noir, la taille moyenne, se félicite de cette initiative permettant aux jeunes de regagner leurs villes gratuitement. "Je salue cette initiative qui permettra à chaque étudiant d'aller voter mais seulement on a des difficultés relatives à l'inscription. Pour la destination Dagana, le nombre de bus est insuffisant aujourd'hui ", se désole le Daganois.
Pour lui, l'arrêté du ministère de l'intérieur interdisant le transport interurbain le samedi à minuit est à l'origine du rush. "D'habitude, les caravanes prenaient départ la veille des événements comme la Tabaski. J'avais prévu de rentrer le samedi mais l'arrêté a tout chamboulé", ajoute le pensionnaire à l'Ucad.
Debout tout près de la porte du "couloir de la mort", Omar Diédhiou, étudiant en Infographie, se prépare à aller à Ziguinchor. Ce jeune homme juge le nombre de bus suffisant. "J'ai remarqué un rush chez des étudiants et j'imagine que chacun veut rentrer pour élire son candidat. Cette année, il y a de l'engouement chez les jeunes par rapport aux autres élections", souligne l'homme de taille moyenne qui assure que les caravanes sont prises en charge par les partis politiques.
Cette année, la plupart des étudiants ne sont pas au campus, c'est pourquoi tout le monde peut obtenir une place, assure affirme Pape Abdou Ndiaye, un étudiant portant un maillot vert blanc du Sénégal.
Pour le Kaffrinois, beaucoup de municipalités n'ont pas affrété de bus pour leurs étudiants. "On a passé plus de 3 heures ici à attendre le bus pour rentrer à Kaffrine", confie t-il.
Face à cette situation, de bonnes volonté sont venues à leur rescousse.
"Les caravanes sont nombreuses cette année. L'opposition a même offert des caravanes et cela montre que les choses évoluent mais également la présidentielle occupe une place importante. Les jeunes sont vraiment très ravis d'aller voter pour donner leur avis sur la situation du pays en choisissant le candidat qui leur convient avec son programme", déclare Ibrahima Mbaye, étudiant originaire de Matam et coordinateur d'une caravane initiée par une femme politique et opératrice économique.
En pleine discussion, bloc-notes entre ses mains, Moussa Diop, membre de Pastef-Ucad, supervise les caravanes mises à la disposition des étudiants par ce parti d'opposition.
"C'est le troisième jour que nous organisons des caravanes afin de permettre aux jeunes de rentrer chez eux. On a pris cette initiative pour permettre à chaque citoyen d'aller accomplir son devoir civique. Les caravanes vont aller dans toutes les régions et le parti prendra toutes les charges financières", assure la trentaine qui reconnaît que tous les militants d'obédience politique diverse peuvent emprunter ces bus gratuitement.