Maroc: La probabilité d'inactivité des femmes au Maroc atteint 73%

Le refus familial, un frein majeur à la participation des femmes au marché du travail

La probabilité d'inactivité des femmes au Maroc atteint un taux de 73%, bien plus élevée que celle des hommes, estimée à 7,5%, révèle le Haut-Commissariat au Plan (HCP) dans une étude intersectionnelle sur la participation des femmes au marché du travail marocain.

Cette disparité est d'autant plus marquée chez les femmes mariées, dont la probabilité d'être inactive atteint 81,9% (3,1% chez les hommes mariés), que chez les jeunes femmes âgées de 25 à 34 ans, avec une probabilité de 79,4% (3,3% pour les jeunes hommes), indique l'étude réalisée dans le cadre du Partenariat d'assistance technique - Mécanisme de déploiement d'experts (PAT-MDE).

Les résultats montrent également que l'implication des femmes et des hommes dans le marché du travail dépend de leur cycle de vie, soulignant des parcours et des défis distincts liés au genre. Pour les femmes, les probabilités d'inactivité prennent la forme d'une courbe en U, où elles tendent à baisser en passant d'une probabilité de 83% pour les plus jeunes (25-26 ans) pour atteindre une probabilité de 72% à l'âge de 43-44 ans, pour ensuite augmenter à 77,6%. Alors que pour les hommes, la probabilité d'inactivité augmente avec l'âge, passant de 5% pour les plus jeunes (25-26 ans) à 24% pour ceux âgés de 57 à 59 ans.

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En outre, l'éducation se distingue comme un facteur clé modulant l'inactivité des femmes. Les variations des probabilités entre les niveaux d'éducation sont plus prononcées chez les femmes que chez les hommes. Ainsi, les personnes n'ayant pas de diplôme ont les probabilités d'inactivité les plus élevées, avec des différences importantes entre les hommes (6,8%) et les femmes (80,8%). Cependant, à mesure que le niveau d'éducation augmente, les probabilités d'inactivité baissent significativement de 42 points de pourcentage pour les femmes ayant un diplôme supérieur pour atteindre 38,6%. Pour les hommes, et compte tenu de leur faible niveau, leur probabilité d'inactivité ne diminue que de 1,7 point de pourcentage.

Par ailleurs, l'examen des probabilités d'inactivité au niveau régional révèle l'impact significatif du contexte géographique et socio-économique sur la participation des femmes au marché du travail.

Contrairement aux hommes qui ont des probabilités d'inactivité ne dépassant pas 8% dans l'ensemble des régions, celles des femmes sont beaucoup plus dispersées. En effet, les femmes de la région de Laâyoune-Sakia El Hamra sont les plus exposées à l'inactivité avec une probabilité de 87%. Elle est suivie de près par la région de l'Oriental et Souss-Massa, où les probabilités d'inactivité atteignent respectivement 83% et 82%. À l'opposé, les régions de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Casablanca-Settat et Rabat-Salé-Kénitra présentent les probabilités les plus faibles parmi les régions, bien que toujours élevées, atteignant 68%, 70,8% et 74,9%, respectivement.

L'opposition familiale plus accentuée dans la région de l'Oriental qu'au niveau de Casablanca-Settat

Le "refus familial" constitue un frein majeur à la participation des femmes au marché du travail, ressort-il d'une étude intersectionnelle du Haut-Commissariat au Plan (HCP) sur la participation des femmes au marché du travail marocain.

"Malgré les compétences et les qualifications des femmes, elles se heurtent à cette opposition familiale", ont relevé les participantes à cette étude comparative entre les régions de Casablanca-Settat et de l'Oriental, réalisée dans le cadre du Partenariat d'assistance technique - Mécanisme de déploiement d'experts (PAT-MDE).

Cette barrière, souvent exprimée par le conjoint, subsiste dans les deux régions même en présence d'un besoin financier explicite, mais elle est plus particulièrement accentuée dans la région de l'Oriental qu'au niveau de Casablanca-Settat, soulignant ainsi la variabilité régionale des attitudes à l'égard de l'emploi féminin.

Les contraintes économiques peuvent détourner et transgresser même momentanément les normes sociales traditionnelles, relève l'étude, notant que, spécifiquement dans la région de Casablanca-Settat, les participantes à l'étude ont souligné qu'une difficulté financière du foyer peut amener à une réévaluation des attitudes vis-à-vis de leur travail. Dans de telles circonstances, le travail des femmes est souvent plus accepté car il devient un recours à une situation particulière.

La perception sociale du travail féminin varie également en fonction de la nature de l'emploi. Les postes au sein de la fonction publique jouissent d'une perception positive et d'une acceptation sociale élevée, favorisant ainsi l'intégration professionnelle des femmes qui y sont employées.

En revanche, les emplois dans des domaines traditionnellement dit "féminins" tels que l'esthétique, la coiffure ou la couture, font face à des jugements sociaux plus péjoratifs. Cette distinction est particulièrement prononcée dans la région de l'Oriental par rapport à Casablanca-Settat, où les préjugés peuvent varier mais restent présents.

La gestion inégale des responsabilités pèse dans la quête d'autonomie professionnelle

Les femmes participant aux focus groupes ont exprimé également la nécessité d'arbitrer entre leurs multiples rôles, y compris productif, reproductif, et domestique. Elles ont souligné que la gestion inégale des responsabilités domestiques ajoute une couche supplémentaire de difficultés, engendrant une charge mentale conséquente. Ce poids supplémentaire s'avère particulièrement pesant dans le contexte de leur quête d'autonomie professionnelle. Le défi de concilier les exigences du travail professionnel avec celles du foyer est fréquemment mis en avant, notamment par les participantes de Casablanca-Settat. Par contraste, dans l'Oriental, certaines femmes bénéficient d'un soutien familial plus substantiel, en raison notamment de la taille plus importante du ménage, leur permettant ainsi de déléguer ou partager une partie des tâches ménagères et de réduire leur charge mentale.

Cette étude a pour objectif d'identifier les profils multidimensionnels des femmes les plus susceptibles de ne pas participer au marché du travail, en mettant la lumière sur les interactions entre les contraintes individuelles, sociales et contextuelles auxquelles elles sont confrontées.

Elle met également en évidence la complexité des contraintes à la participation des femmes au marché du travail marocain à travers une approche intersectionnelle du genre, combinant des méthodologies de recherche quantitatives et qualitatives.

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