Comptable de formation, mariée et mère de trois enfants, Mariam Sourabié née Ouédraogo est fille ainée de son père, feu Naaba Koubri et d'une fratrie de 14 enfants. Elle a assuré la régence de la chefferie traditionnelle de Lintiba de la commune de Bassi dans le Zondoma, située à 42 km de Ouahigouya. Dans ce mois de la femme, Sidwaya fait un arrêt sur cette femme «Napoko » qui montre que la tradition a une hauteur de considération pour la femme.
Intronisée à 41 ans comme « Napoko » (cheffe traditionnelle en langue mooré), après le décès de son père, Mariam Sourabié née Ouédraogo a eu la responsabilité d'assurer la transition et la continuité de la chefferie coutumière du village de Lintiba, le temps qu'un successeur soit choisi, préparé et intronisé. Elle a assuré les affaires courantes du village de Lintiba pendant près d'un mois du 13 avril au 7 mai 2018.
Après le décès de son père, Mariam Sourabié, fille ainée du chef, a régné sur Lintiba. Le rôle d'une « Napoko » est de gérer la transition de la période située entre le décès de l'ancien chef jusqu'à la l'intronisation du successeur. Elle dirige ainsi la période transitoire de la chefferie traditionnelle. Elle a expliqué qu'au Yatenga, si le chef n'est pas là, c'est sa première fille qui transite, prend le trône avant qu'un autre chef ne prenne le pouvoir. Pendant cette période transitoire, la « Napoko » a le pouvoir absolu de gérer la destinée du village. Tout comme le chef, elle gère les affaires sociales, culturelles et politiques. Et ce, sous l'oeil critique des tantes, des soeurs du chef.
« En tant que Naaba, je n'étais pas femme. Je suis un homme. Je suis Naaba. J'ai porté le chapeau traditionnel. Je ne suis plus une femme. Je n'ai pas de boucles d'oreilles. J'ai porté les habits de mon papa, du début jusqu'à la fin. Tout ce qu'il y a de mon père, que ce soit les boubous, les chaussures et tout, la canne et tout. Cela veut dire que je suis homme », a-t-elle affirmé. En tant que « Napoko », Mariam Sourabié qui était le chef avait la charge de gérer tous les dossiers de tous ordres. Tout au long de son règne, elle a pu gérer ces affaires courantes avec l'accompagnement de ses conseillères que sont ses tantes, les sœurs du défunt chef.
« Ce sont mes tantes qui étaient autour de moi, avec d'autres garants de la tradition qui m'aidaient à traiter les sujets qui me parvenaient », a indiqué Mme Sourabié. Pendant son règne, elle a géré avec brio les fiançailles d'un jeune homme du village. Elle a aussi accompli les rites pour la préparation de la saison pluvieuse. Pendant son règne, elle avait droit aux honneurs et à la considération du chef. Elle a affirmé qu'elle ressentait du gène lorsque des ainés se prosternaient et rampaient devant elle pour l'honorer et la vénérer
. « Même les hommes reconnaissaient mon pouvoir et mon autorité et me respectaient tout comme mon défunt père », relate-t-elle. Et de préciser que comme toute autre personne, elle avait tout le respect dû à un chef, sinon même plus. « Mes ressentis en tant Napoko étaient la fierté, l'honneur et la satisfaction, car cela montre l'important capital que la femme occupe dans notre tradition. J'étais tellement fière et honorée de voir que l'on confie la gestion de tout un royaume à une femme. Donc, cela montre la hauteur de la considération que la tradition a pour la femme », a-t-elle confié.
Mme Sourabié qui était fonctionnaire avait d'autres responsabilités. C'est pourquoi après le décès de son père, elle a pris son congé annuel pour aller honorer son devoir traditionnel. A la fin, après l'intronisation, elle a organisé les funérailles de son défunt papa et préparé sa succession . « Après l'organisation, il y a tout un processus de coutume à faire. Dès que tout cela est fini, je me suis rendue auprès du roi du Yatenga, le Naaba Kiiba pour être libérée. Là aussi, il y a des coutumes à faire pour reprendre la vie normale. Après ma décharge, on intronise le nouveau chef », a-t-elle relaté. Son mari Sourabié retient un très bon souvenir du passage de sa femme sur le royaume de Lintiba. Selon lui, cette expérience a été un grand apport pour consolider leur foyer.
« En effet, n'étant pas moaga, au début c'était la peur de l'inconnu. Par la suite, cette fonction a permis à ma femme de sortir plus grande avec de la valeur ajoutée qui se ressent aujourd'hui dans la gestion familiale, d'où notre satisfaction. Après cette fonction de Naaba, j'ai constaté un changement positif et constructif chez mon épouse et non un comportement de suffisance », a-t-il souligné. Pour Mariam Sourabié, le 8-Mars, c'est une journée de la femme, une journée de conseils, d'éducation pour les jeunes sœurs, journée de félicitations de la femme pour son grand rôle dans la construction de la famille, de la société entière.