Ile Maurice: Une foule de raisons évoquées

La Financial Services Commission (FSC), qui a l'habitude d'émettre une douzaine de communiqués par mois, est restée silencieuse sur le départ de Vikash (Dhanesswurnath) Thakoor et sur ses raisons. Pourtant, cette mise à la porte a été brutale. Thakoor était absent du pays lorsque le conseil d'administration de la FSC a décidé de ne pas renouveler son contrat. Son accès au système informatique de l'institution aurait été bloqué sur-le-champ et il n'aurait pas été autorisé à y mettre les pieds, selon une source à la FSC.

La personne chargée de la communication à la FSC est restée elle aussi silencieuse, le ministre de tutelle, Sunil Bholah, également, tout comme le Prime Minister's Office. Cependant, officieusement, on nous sert différentes versions : tantôt, c'est parce que Thakoor avait refusé de fournir des informations sur un membre de l'opposition, tantôt, parce qu'il avait rencontré Navin Ramgoolam. Sinon, on nous dit que c'est parce qu'il tardait trop avec les réclamations des victimes du cyclone Belal. Ou que ce sont ses relations avec la gent féminine de la FSC qui l'ont perdu. Ce qui est certain, c'est qu'il y avait beaucoup de raisons pour le virer de la FSC, mais elles datent de plusieurs années.

Villas sans héritiers

L'une d'elles est, par exemple, la façon dont il a géré le dossier du Britannique David Franklin qui a perdu l'équivalent en livres sterling de Rs 200 millions chez une management company locale (voir encadré). Ou alors des licences suspendues et révoquées pour les fonds libyens et autres. La liste est longue, comprenant les plaintes de plusieurs management companies sur la lenteur de Thakoor. On dit qu'il est tout le temps en voyage. Il y a aussi eu ses relations avec le personnel de la FSC en général qui auraient été exécrables, et ses locations d'immeubles et de parkings. Pour tout cela aussi, jamais on n'a même pensé à lui demander des comptes.

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Il a fallu, nous dit-on, qu'il y ait eu une accusation concernant une affaire de projet de villas dans l'est du pays pour qu'il soit mis à la porte sur-le-champ. Vikash Thakoor aurait investi, avec un groupe, dans ce projet immobilier, un business qui rapporte gros en ce moment, aidé par l'ouverture aux étrangers. Ce groupe de personnes aurait mis sur pied une entité légale avec comme UBO (Ultimate Beneficiary Owner) une dame âgée qui n'a pas d'héritier. Et lorsque cette dernière ne sera plus de ce monde, le groupe deviendra propriétaire. Ce n'est pas très éthique mais il y aurait en plus eu des tractations illégales. On n'en sait pas plus pour l'instant si ce n'est que le promoteur est un ex-conseiller d'un autre ministre.

Interrogée, une source fiable nous confirme cette affaire de villas. Y aurait-il eu abus de faiblesse de la vieille dame ? On ne veut pas nous le dire. Cependant, nous explique cette source, Thakoor se serait défendu en expliquant qu'il est innocent, pour ensuite changer de version en affirmant que c'est lui serait la victime. L'ex-directeur de la FSC victime d'une entourloupe ? Une autre source nous fait justement comprendre qu'il sera difficile, voire impossible, de prouver légalement que Vikash Thakoor est ou sera le propriétaire ou le bénéficiaire du bien de la personne âgée et qui vaudrait des dizaines de millions de roupies. Pourquoi? «Comment démontrer le véritable bénéficiaire si ce dernier a utilisé un prête-nom, ou une compagnie ou société écran?» Il y a bien des lois qui obligent les notaires et les autres agents immobiliers à «dénoncer» les bénéficiaires cachés, n'est-ce pas ? Réponse accompagnée du rire de notre interlocuteur: «C'est la FSC elle-même qui est chargée de cette surveillance.» Un directeur d'une telle institution ne devrait il pas être comme la femme de César, c'est-à-dire au-dessus de tout soupçon? «Au contraire. Il est chargé de couvrir certaines personnes qui pratiquent ce genre de cachotteries. Il a décidé de faire comme ces personnalités, sans doute...»

Une autre version, mais ne provenant pas du gouvernement, voudrait que Thakoor n'ait pas accepté de partager des informations concernant «l'ennemi personnel numéro un de Lakwizinn», dont on cherche la tête depuis bientôt deux ans. En réponse à cela, l'on nous fait comprendre que l'ex-Chief Executive Officer (CEO) de la FSC n'a jamais refusé de donner des informations à Lakwizinn. Au final, on ne sait pas quelle a été la raison de son départ de la FSC ou s'il y a eu une accumulation de raisons.

Vikash Thakoor a déjà repris son poste le 26 mars à la Banque de Maurice, gardé au chaud durant son passage à la FSC. Ce ne serait que temporaire car il serait pressenti pour le poste de CEO du Mauritius Deposit Insurance Scheme. Serait-il donc ménagé ?

Pitié d'une victime

«L'express» a pu mettre la main sur un échange entre le Britannique David Franklin et Vikash Thakoor. Alors que celui-ci ne veut pas parler à la presse, il l'a toutefois fait, après son débarquement de la FSC, à David Franklin qui lui reprochait de n'avoir rien fait après la perte de ses 3,35 millions de livres sterling. En réponse, Vikash Thakoor a parlé de «gossips» de la presse, expliquant qu'il n'a pas été viré de la FSC mais qu'il est parti après un accord pour reprendre son poste à la Banque de Maurice. Voilà encore une autre raison de son départ de la FSC. Et concernant la perte de ses 3,3 millions de livres sterling, Thakoor a accusé le Britannique d'en être responsable. «I pity you as you are the source of all your problems.»

 

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