Ile Maurice: L'extradition de Franklin expose des failles

Alors que Jean Hubert Celerine, alias Franklin, a donné son consentement à être extradé vers La Réunion le 15 mars, la gestion de son dossier par le bureau de l'Attorney General de Maurice suscite des interrogations.

Deux semaines après l'annonce de son intention, soit hier, les charges provisoires de blanchiment d'argent ont été rayées devant le tribunal de Bambous. Son départ est imminent, toutefois l'absence de communication claire concernant la date prévue pour son extradition contraste fortement avec la rapidité et la publicité accordées au cas de son ami Nono, extradé en une semaine avec les charges qui pesaient sur lui rapidement levées. À ce jour, ses avocats n'ont reçu aucune communication sur son départ. Ce traitement différent souligne une possible opacité dans la gestion de l'affaire Franklin.

Le 18 août dernier, Nono a été extradé à La Réunion, une semaine après que son avocat a annoncé que son client ne contesterait pas la décision en faveur de son extradition. En une semaine, les accusations de blanchiment d'argent qui pesaient sur lui devant le tribunal de Mahébourg ont été abandonnées, et le bureau de l'Attorney General avait déjà entamé toutes les procédures nécessaires avec les autorités pour son transfert.

Franklin se trouve actuellement dans une position précaire car il ne sait pas quel sort l'attend une fois extradé. La grande question demeure : aura-t-il droit à un nouveau procès à Saint-Denis, ou sera-t-il contraint de purger la peine de sept ans déjà établie ? L'acceptation de l'extradition par Franklin aurait dû entraîner une accélération des démarches, respectant ainsi ses droits tout au long du processus. Pourtant, deux semaines après son accord, le flou demeure sur les modalités précises de son transfert.

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L'appel devant le Conseil privé toujours «on»

À ce jour, les avocats de Franklin sont toujours dans l'incertitude concernant la date de transfert de leur client, et encore plus sur les garanties obtenues par le bureau de l'Attorney General auprès des autorités réunionnaises une fois qu'il sera sur l'île soeur. Bien qu'ils ne puissent pas plaider devant ce tribunal, ils joueront un rôle important dans la préparation du dossier. Cette situation est préoccupante pour les avocats car, en acceptant l'extradition du Mauricien, le bureau de l'Attorney General s'était engagé à garantir le respect de tous les droits de Franklin durant ce processus.

La question de lever des charges devant un tribunal du pays pour extrader Franklin afin qu'il purge une peine pour un autre délit dans un pays étranger soulève également des problèmes par rapport à certains traités internationaux, qui stipulent qu'une personne faisant face à des accusations devant un tribunal de son pays doit voir son affaire résolue avant toute extradition. Cependant, la justice a jugé que les délits de blanchiment d'argent reprochés à Franklin, pour lesquels plus d'une dizaine de personnes ont été arrêtées et pour lesquels certaines auraient avoué, sont moins graves que l'affaire devant le tribunal de Saint-Denis.

Un autre élément intrigant est le fait que la demande du bureau de l'Attorney General pour contester une décision sur la caution de Franklin devant le Privy Council est toujours d'actualité et n'a pas été retirée. L'affaire est même fixée pour être entendue en mai. Cette demande semble dénuée de sens puisque Franklin a accepté son extradition, une démarche que ses avocats prévoient de contester, considérant qu'elle ne ferait que gaspiller des fonds publics dans un procès inutile devant le Privy Council.

Au niveau du Passport and Immigration Office, on ne sait pas plus, car toutes les communications se font exclusivement entre le bureau de l'Attorney General et les autorités réunionnaises. Pourtant, Franklin va voyager avec son passeport mauricien.

Alors que Franklin attend son transfert vers La Réunion, son cas continue de soulever des questions importantes sur l'équité et l'efficacité de la justice pénale dans un contexte international. La manière dont cette affaire sera résolue pourrait bien servir de précédent pour les futures procédures d'extradition entre ces deux juridictions, surtout que la France a ratifié la Convention d'extradition entre elle et Maurice, tout comme la Convention d'entraide judiciaire en matière pénale qui lie nos deux pays. Ces deux conventions prendront effet à partir du 1eᣴ mai.

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