Ile Maurice: La sensibilisation de plus en plus cruciale

Normes sociales, chômage et pauvreté, tabous sexuels, manque d'éducation sexuelle et taux élevés d'abandon scolaire précoce, entre autres. Ce sont autant de facteurs qui peuvent contribuer à l'exploitation sexuelle des mineurs, souligne Nansha Bholah, coach de vie à Elite EduAcademy, qui milite contre le cyberharcèlement et aide les victimes à reprendre confiance en elles.

Si la pandémie a permis aux jeunes d'atteindre leurs buts éducatifs en ayant recours à la technologie, elle les a rendus plus vulnérables à deux égards, explique Nansha Bholah. «Ce ne sont pas tous les enfants qui ont accès aux informations, outils et ressources nécessaires pour assurer leur sécurité en ligne. Ceux qui passent plus de temps sur les plateformes virtuelles peuvent être plus exposés à l'exploitation sexuelle et à la manipulation par des prédateurs qui sont à l'affût de victimes et qui dissimulent souvent leur identité par de faux profils.»

Par ailleurs, le matérialisme joue un rôle croissant dans l'exploitation sexuelle commerciale des mineurs, et des publicités et d'autres médias ont également contribué à perpétuer cette tendance. En conséquence, le risque que les mineurs eux-mêmes participent à ce comportement en ligne est accru car ils peuvent être convaincus d'échanger des contenus, tels que des photos sexualisées contre de l'argent et des objets de prestige, en raison de la pression exercée par leurs pairs pour s'intégrer et adhérer à l'importance que la société accorde aux biens coûteux et de marque. «Avec la nouvelle ère économique et la forte concurrence entre les entreprises, les parents qui sont obligés de travailler plus longtemps laissent leurs enfants sans surveillance. L'île Maurice étant l'un des lieux de voyage les plus populaires, elle pose aussi, en revanche, un risque d'exploitation sexuelle des jeunes par les touristes.»

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Un psychologue prévient que «la multiplication des interactions sur les réseaux sociaux nécessite une forte sensibilisation, y compris pour les parents qui affichent des photos et des vidéos de leurs enfants sans réaliser que cela expose leur famille au danger des prédateurs sexuels. Au cours de mon expérience professionnelle, j'ai rencontré des parents qui affichent souvent des photos de leurs enfants en maillot de bain, à la piscine ou à la plage. Pour la plupart des gens, ces images suscitent des émotions d'amour et d'admiration. Mais pour les pédophiles, c'est une motivation pour rechercher l'enfant qu'ils ne perçoivent que comme un outil sexuel»

Si les dispositions légales relatives à la pédopornographie sont strictes en termes de sanctions, notamment dans la Children's Act 2020, qui inclut toute représentation, par quelque moyen que ce soit, d'un enfant se livrant ou semblant se livrer à des activités sexuelles, ainsi que dans l'Information and Communication Technologies Act, elles n'ont cependant pas d'effet dissuasif sur ce type de délit. Nansha Bholah préconise une sensibilisation continuelle et une prise de conscience à tous les niveaux, des parents aux enfants, sur la manière d'identifier et de prévenir et, plus important encore, sur les dispositions légales et les législations à Maurice visant à protéger l'enfant.

Un mal qui s'amplifie

Plusieurs cas de pédopornographie ont été recensés au fil des ans. En avril 2021, la messagerie Telegram avait fait parler d'elle. La cause : des vidéos à caractère sexuel provenant de groupes publics et privés sur cette plateforme avaient été divulguées. Des vidéos de femmes et de jeunes filles nues ou en sous-vêtements ainsi que des photos de femmes et de filles mineures avec leur numéro de téléphone ont circulé. Pour beaucoup de ces victimes, il s'agissait également de revenge porn car les photos diffusées avaient été prises lors de moments d'intimité avec leur ex-partenaire.

Après que l'ampleur de cette affaire a été rendue publique, le ministère de l'Égalité des genres avait mis en place un comité technique et la police avait ouvert une enquête. Cependant, compte tenu de la complexité des plateformes de réseaux sociaux qui sont dynamiques, créées un jour et disparaissant le lendemain, et les utilisateurs passant d'un groupe à l'autre, les autorités se sentent souvent impuissantes. En 2023, de tels groupes étaient toujours actifs et un nouveau groupe au nom très explicite de «Mru 2023 nude» comptait 2 999 membres.

La même année, Rodrigues a été secouée après qu'un ancien caméraman de la Mauritius Broadcasting Corporation de l'île a porté plainte pour le vol de son téléphone portable. Il avait donné le nom d'une mineure qu'il soupçonnait du vol. La police avait retrouvé l'appareil en possession de la jeune fille. Interrogée, elle avait affirmé que le téléphone contenait des vidéos d'elle. Effectivement, lorsque la police avait analysé l'appareil, elle avait découvert des vidéos pédopornographiques ainsi que celles d'actes sexuels entre adultes, y compris des fonctionnaires, toutes filmées sur ce téléphone portable.

En mars 2022, une collégienne de 15 ans, elle, avait déposé plainte à la police après avoir été menacée de mort par un utilisateur de Snapchat. Ce dernier lui avait demandé de lui envoyer une vidéo d'elle nue. L'homme avait ensuite fait une capture d'écran de la vidéo et avait diffusé une photo indécente de l'adolescente sur les réseaux sociaux. En 2016, des images pornographiques d'une jeune étudiante avaient également circulé parmi plusieurs élèves, montrant la jeune fille en train d'avoir des relations sexuelles avec des garçons qui seraient également des élèves du secondaire.

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