Ile Maurice: Préservation des cachalots - Un trésor au large des côtes mauriciennes

Les cachalots attirent depuis une décennie l'attention des scientifiques et des passionnés le long des côtes mauriciennes. Maurice ainsi que les Açores offrent l'opportunité unique d'observer ces majestueux mammifères dans leur habitat naturel.

Chaque jour, des experts comme René Heuzey, accompagnés de volontaires et de spécialistes des mammifères marins, prend la mer pour étudier et partager cette passion avec les écotouristes. Présidée par René Heuzey, réalisateur de films sous-marins, l'équipe de scientifiques chercheurs de l'Indian Ocean Marine Life Foundation oeuvre dans la même lignée. Elle nous a conviés la semaine dernière à une expédition pour découvrir une famille de cachalots mauriciens.

René Heuzey, président de l'Indian Ocean Marine Life Foundation, souligne l'importance de permettre aux gens de s'engager à ces créatures, tout en respectant leur espace et en évitant toute perturbation excessive. Il plaide pour une approche équilibrée, permettant aux observateurs d'apprécier la beauté des cachalots tout en veillant à ne pas perturber leur comportement naturel.

Expérience inoubliable

La semaine dernière, l'équipe de l'express a participé à une expédition en haute mer à la recherche de la famille d'Irène Gueule Tordue, un cachalot étudié depuis plus de dix ans par René Heuzey et son équipe. Cette recherche a abouti à la création du premier arbre généalogique de cachalots au monde, une avancée majeure pour la compréhension et la protection de ces mammifères marins.

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L'expédition a débuté au Grand-Baie Yacht Club où on a embarqué à bord de l' Aquila avec l'équipe de l'Indian Ocean Marine Life Foundation à 7 h 30. Le temps était clément et la mer calme alors que l'équipage se préparait pour une journée d'observation des cachalots mauriciens, nés dans les eaux locales. Après les consignes de René Heuzey, on a commencé notre aventure.

L'équipe, dirigée par René Heuzey et Axel Preud'homme, plongeur naturaliste, a patiemment attendu l'apparition de la famille de cachalots. Utilisades jumelles et un hydrophone, Navin Boodhoonee, affectueusement appelé «Navin l'oreille d'or», a localisé les cachalots au large de Balaclava, à environ 5,5 kilomètres des côtes après deux heures de recherche. Le moteur a été éteint et les plongeurs ont commencé à se préparer. Ces animaux gris et luisants se sont approchés du bateau, en ont fait le tour et l'ont intégré dans leur paysage mouvant, sans problème. Une fois qu'ils ont eu le temps de sonder la coque et qu'ils ont accepté notre présence, le temps était venu de se mettre à l'eau.

Consignes : ne pas sauter dans l'eau, mais s'y glisser en douceur, palmer les bras le long du corps sans les agiter, ne pas couper la route d'un cachalot, ne pas arriver derrière lui. À travers le masque, se sont dessinées les parties immergées de ces gigantesques masses sombres qui évoluaient doucement avec toute l'assurance de leur puissance. Il a alors été possible d'assister à des scènes étonnantes, telles que l'allaitement, les comportements de maternage et de protection, les jeux et les mouvements.

Le spectacle qui a suivi, avec environ huit à dix cachalots émergeant de l'eau, était à couper le souffle. Malgré leur taille imposante, les cachalots ont accueilli l'équipe avec confiance et aucun incident n'a perturbé l'interaction. L'équipe a maintenu une distance respectueuse et a laissé les mammifères s'approcher à leur rythme, démontrant ainsi leur engagement envers l'observation et la protection de ces animaux majestueux.

L'équipe de la fondation a passé près d'une heure à observer les cachalots, confirmant notamment le sexe des deux nouveau-nés, qui sont des mâles. Axel Preud'homme a enregistré rapidement toutes les informations recueillies. Les membres de l'équipe étaient enchantés de cette expérience, avec des étoiles dans les yeux.

Le skipper du bateau Aquila, Jean-Michel Bardin, a qualifié l'expédition de journée exceptionnelle, soulignant la rare opportunité d'observer plusieurs cachalots en même temps. Krishna Coolen, membre de la Royal Life Saving Society de Maurice, a été émerveillé par cette expérience, soulignant l'importance de protéger les cachalots mauriciens et de ne pas les déranger. Il a également mis en avant la nécessité de réguler le secteur. «J'ai déjà nagé avec des cachalots, mais aujourd'hui, c'était spécial. On s'est retrouvés parmi eux. On a même vu un bébé téter sa maman ou sa nounou. C'est dans de tels moments que l'on se rend compte de la beauté de la nature. Il ne faut pas oublier que ce sont des cachalots citoyens mauriciens, et nous devons tout faire pour les protéger et surtout ne pas les déranger.»

Nouchine Schopfer, autre plongeur, a également partagé son enthousiasme, décrivant des moments incroyables lors des mises à l'eau, notamment en se retrouvant au milieu du clan avec plusieurs cachalots paisibles, ne montrant aucun signe de dérangement.

Des cartes d'identité sous-marines pour un suivi

Le catalogue rassemble les cartes d'identité précises de tout le clan d'Irène. Elles sont basées sur tous les détails morphologiques visibles en plongée : encoches sur les nageoires, taches blanches et autres marques visibles sur le ventre. Détail fondamental : il indique le sexe, immédiatement identifiable sous l'eau, alors qu'il est invisible pour l'observateur extérieur. Connaître le sexe des jeunes est capital pour le suivi de la population, car mâles et femelles cachalots n'auront pas le même devenir à l'âge adulte. Réactualisé régulièrement, le catalogue de départ a été nourri par les cartes de tous les petits qui sont nés au fil des années.

Axel Preud'homme (à g.) et René Heuzey (à dr.).

Questions à René Heuzey et Axel Preud'homme : «Beaucoup de skippers foncent sur le cachalot»

Quel est le bilan de la journée ?

René Heuzey : On est tombé sur le clan de Vanessa. On a découvert que les deux nouveau-nés sont des mâles. On a de fortes suspicions concernant les mamans, mais le problème, c'est qu'un bébé peut téter sur une maman, comme sur une nounou. Ce sont les autres vidéos qui vont confirmer cela.

Pourriez-vous nous en dire plus sur cette famille de cachalots que vous observez depuis tant d'années ?

Axel Preud'homme : Il y avait au départ un clan de cachalots, celui d'Irène Gueule Tordue, et au fur et à mesure, on a vu que le clan se scindait légèrement en deux petits groupes. Depuis l'année dernière, c'est devenu vraiment bien distinct. Il y a le sous-groupe d'Irène et le sous-groupe de Vanessa. C'est celui avec lequel on était aujourd'hui. Ils vivent généralement sur la côte ouest, mais séparément. Dans le sous-groupe de Vanessa, on a cinq femelles adultes, soit Vanessa, Caroline, Adélie, Emy et Delphine, et puis nous avons six immatures. On en avait sept, mais Eliot, qui est un mâle de 13 ans, a quitté le groupe. Les autres jeunes sont Chesna, Zoé, Andreas, Mégane et nos deux petits mâles.

Comment identifiez-vous les cachalots ?

René Heuzey : Nous utilisons des fiches d'identification similaires à des cartes d'identité avec des photos. Nous demandons aux gens de nous envoyer des photos et des vidéos pour cela. Les cachalots sont identifiés grâce aux marques distinctives qu'ils ont, comme les morsures. Il est important de noter que les principaux prédateurs des cachalots à Maurice sont les globicéphales, ou gros dauphins noirs, qui viennent dans la région lorsqu'ils détectent la présence de bébés cachalots. En plus de l'identification visuelle, nous utilisons la génétique. Nous récupérons des échantillons de peau que les cachalots perdent, appelés squames, sans perturber l'animal. Ces échantillons sont ensuite envoyés à un laboratoire en France pour une analyse génétique. C'est ainsi que nous avons créé le premier arbre généalogique de cachalots au monde, depuis notre point de départ en 2011.

Quelle est votre opinion des activités de «whale-watching» à Maurice ?

Axel Preud'homme : C'est malheureux, car beaucoup de skippers ne font pas attention. Ils foncent sur le cachalot et parfois, ils jettent les gens à l'eau sans encadrement, sans moniteur. Ils ne se rendent pas compte que c'est dangereux, car il n'y a pas que des cachalots, il peut y avoir des globicéphales, des requins, etc. Mis à part cela, c'est la façon de faire qui est non respectueuse et les gens nagent comme des fous vers le cachalot.

René Heuzey : Il y a aussi beaucoup d'animaux marqués. Nous avons vu un petit qui s'est pris une cale de bateau, laissant une marque importante. Parfois, il y a jusqu'à 30 personnes dans l'eau et tout le monde crie, ce qui est stressant pour les animaux. Nous formons les skippers et nous pensons qu'interdire n'est pas la solution, mais qu'il faut réguler et protéger adéquatement pour que tout le monde puisse profiter de ces rencontres de manière responsable.

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