La Fondation congolaise pour la recherche médicale (FCRM) a tenu, le 29 mars à Brazzaville, la première édition de la cérémonie de remise de bourse régionale « Femmes et sciences ».
Au total, quinze lauréates en provenance des pays de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (Cémac) et de la République démocratique du Congo (RDC) ont été bénéficiaires de cet appui financier visant à les soutenir dans leurs travaux de recherche.
Co-organisée par la FCRM et la Fondation Bayer en Allemagne, avec l'appui de plusieurs partenaires nationaux et internationaux, la bourse régionale « Femmes et sciences » est un programme qui vise à augmenter le nombre de femmes scientifiques en Afrique centrale en soutenant notamment les doctorantes inscrites dans une université de la sous-région.
Ce programme a été lancé au plan national depuis 2014 et s'est ouvert pour la toute première fois à d'autres pays de la sous-région. Cette première édition comptait trois catégories. La première, « Mères et scientifiques » a distingué trois femmes originaires du Cameroun, du Congo et de la RDC. Comme la survenue d'une grossesse au cours des études peut représenter le risque d'interruption voire d'abandon, les organisateurs ont souhaité encourager les femmes qui arrivent à surmonter ce handicap en leur offrant un appui financier qui leur permettra de poursuivre leurs projets de recherche dans un pays d'Afrique centrale.
La seconde catégorie, dénommée « PHD », a été décernée à onze lauréates en cycle doctoral dont une du Tchad, une de la Centrafrique, une du Gabon, trois du Congo, trois du Cameroun et deux de la RDC. Par ailleurs, une doctorante du Congo a remporté le Prix de la diaspora, fruit de l'appui des Congolais vivant à l'étranger. « Je suis très heureuse d'être parmi les lauréates.
En tant que chimiste organicienne, la plus grande difficulté c'est d'avoir des réactifs et le matériel nécessaire pour pouvoir nous permettre d'isoler les molécules qui sont actives. Cette bourse me permettra d'acquérir des réactifs qui me permettront de continuer la suite de mon travail qui porte sur l'essai de phytochimie et pharmacologie de deux plantes médicinales tchadiennes et formulation d'un phytomédicament », a confié Dij Mioingar Lafya Bodeboret, lauréate dans la catégorie PHD.
Cette année, un engouement considérable avait pu être observé lors des candidatures. « Nous avons reçu un total de 424 dossiers dont 358 PHD et 66 mères scientifiques. À l'issue de la conformité des dossiers, 64 candidatures, toutes catégories confondues, ont été retenues pour évaluation par le comité de sélection. 30 candidates dont 20 doctorantes et 10 mères scientifiques ont obtenu une note suffisante pour être invitées à une interview avec le comité de sélection », a expliqué Georges Missontsa, chef de projet pour le plan de l'appel de candidatures. À en croire ses propos, l'évaluation des candidates portait notamment sur l'expression orale, le dynamisme scientifique, la présentation du projet de recherche, la pertinence du sujet de recherche, la connaissance de l'environnement professionnel, l'utilisation de la bourse.
Il est à noter que le prochain appel à candidatures de la bourse régionale « Femmes et sciences 2024-2025 » aura lieu à la fin de cette année. Et celui-ci sera ouvert à toutes les femmes oeuvrant dans les domaines tels que la chimie, la physique, les filières technologiques et bien d'autres. Les pays concernés sont ceux de la Cémac ainsi que la RDC.
Nécessité de soutenir les femmes dans le domaine scientifique
C'est, en effet, le cri de coeur qu'a lancé le Pr Francine Ntoumi, présidente de la FCRM et membre du jury de la bourse régionale « Femmes et sciences 2023-2024». « Investir dans les femmes est non seulement une question de justice sociale, mais c'est aussi un investissement intelligent et stratégique qui profite à toute la société. La contribution naturelle de la femme est de porter la vie. Malheureusement, dans la vie professionnelle, au lieu que cela soit tout simplement un événement heureux, cela peut sonner le glas des ambitions professionnelles. La grossesse puis l'accouchement deviennent un handicap, un frein à l'évolution d'une carrière prometteuse », a-t-elle déploré.
Selon elle, dans les sciences, cela se traduit par un arrêt des publications, par le ralentissement des avancements et de la promotion et c'est ainsi que peu de femmes se retrouvent dans le sommet de la pyramide en ce qui concerne la hiérarchie académique et scientifique. « Si l'on veut l'égalité des sexes, nous devons nous mobiliser pour que les inégalités de genre cessent. Dans l'évaluation d'un agent, le fait de mettre au monde un enfant devrait donner droit à un échelon, un bonus en plus dans sa carrière, ou chez une doctorante que cela lui donne le droit à une année supplémentaire d'inscription au doctorat », estime-t-elle.
En cela, elle invite toutes les parties prenantes dans cette vision à réagir en vue d'avoir des textes de loi qui soutiennent non seulement les scientifiques mais toutes les femmes dans cette discrimination due à la nature même de la femme. « Je crois que là est notre prochain grand combat », a martelé le Pr Francine Ntoumi en présence de plusieurs hôtes dont les ambassadeurs et chefs de mission diplomatiques; la présidente du Conseil économique, social et environnemental; la conseillère spéciale du chef de l'État; le secrétaire permanent du Conseil consultatif de la société civile; la représentante du Conseil consultatif de la jeunesse; le maire de l'arrondissement 8, Madibou.