Ile Maurice: Paroles d'artistes sur fond de boycott et d'absences remarquées

Pratiquement une heure avant que le ministre des Finances ne reçoive des artistes, ce jeudi 4 avril, pour la traditionnelle consultation pré-budgétaire, c'est l'explosion de colère.

L'appel au boycott de cette consultation pré-budgétaire est lancé par les Professional Events Organisers (PEO) lors d'une conférence de presse à 10h, le jeudi 4 avril, au Café du Vieux Conseil à Port-Louis. Y prend la parole, Jimmy Veerapin, producteur, responsable de Culture Events. Il est aussi un membre du conseil d'administration de la Mauritius Society of Authors (MASA). Le producteur explique qu'il a été invité à s'exprimer devant le ministre des Finances, «il y a trois jours de cela. En trois jours comment mettre en place un stratégie ?» Jimmy Veerapin a donc décidé de ne pas répondre à cette invitation.

Le producteur précise : «ce n'est pas une question de boycott ou pas, c'est plus une question de colère contre le ministre Padayachy. Il est temps qu'il mette en place tout ce qui a déjà été proposé durant toutes ces années». Le producteur s'insurge : «Tou kou nek pou konsilte mem ? Kan pou gagn medikaman ? Kan nou pou geri ?». A ses côtés, les producteurs Stephan Rezannah et Bruno Raya, également membre de PEO approuvent. «Zot pa respekte nou, kifer nou bizin al ladan ? Zis pou MBC filme apre nanye pa fer ?» se demande Bruno Raya au sujet des consultations pré-budgétaires.

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Une heure plus tard, à 11h30, artistes triés sur le volet et des responsables de corps paraétatiques sous tutelle du ministère des Arts et du patrimoine culturel sont à la Lunch Room, en face du ministre des Finances, Renganaden Padayachy. Ce qui frappe dans l'assistance : le secteur musical - le plus gros segment des industries créatives à Maurice- est maigrement représenté. Pas de grosses pointures. On note la présence du vétéran Cyril Ramdoo.

Pas de chorégraphes sur place, pour représenter la danse. Pour les arts plastiques, Neermala Luckeenarain et Ismet Ganti sont au premier rang. Trois réalisateurs aussi sont là : Sada Rajiah, Varun Nunkoo et Vicky Ramdhun. Le responsable des Creatives Industries de l'Economic Development Board, Nanda Narrainen est présent. Les autres institutions représentées : le conservatoire de musique François-Mitterand et le centre Nelson Mandela pour la culture africaine.

Parmi les invités, il y en a une pour qui c'est sa première participation aux consultations pré-budgétaires. Il s'agit d'Astrid Dalais, invitée en tant que co-fondatrice de la House of Digital Arts (HoDA). «Je suis contente que les arts numériques aient été pris en compte dans cette discussion», souligne-t-elle.

Durant l'échange, elle a souligné que s'installer dans la capitale, pour un acteur culturel est un «exercice périlleux». A cause de la «réputation de Port-Louis, où après 17 heures, c'est très calme». Faire le choix de s'implanter à Port-Louis c'est contribuer à la «régénération de la ville». Pour soutenir cette contribution, Astrid Dalais a plaidé en faveur de l'exemption de la taxe à valeur ajoutée (tva) sur les billets d'entrée dans les lieux artistiques. «Cette exemption aidera les acteurs d'une part à s'implanter à Port-Louis et d'autre part à pérenniser leur projet». La co-fondatrice de HoDA souligne que «depuis le premier jour, nous vivons uniquement de la billetterie. Nous pensions que cette exemption allait se concrétiser. C'est un vrai défi pour les lieux culturels de couvrir leurs frais de fonctionnement. Il faut du temps pour la conquête des publics. Nous aimerions aussi avoir plus de subventions du secteur public, au-delà de ce que fait le National Arts Fund». Elle a également demandé un meilleur accès à Port-Louis. Notamment «que le métro opère jusqu'à 23h le weekend». Ce qui faciliterait le trajet du public pour assister aux séances nocturnes dans les lieux culturels.

Autre proposition : HoDA s'est porté candidat dans le cadre d'une étude d'impact des projets culturels à Port-Louis, financée par l'Unesco. Dans la foulée, Astrid Dalais a proposé qu'un parcours culturel réunissant les acteurs culturels et artistiques de la capitale soit réalisé.

Pour sa part, le comédien, metteur en scène et responsable de la Trup Sapsiway, Gaston Valayden a énuméré quatre propositions. La première : «la nécessité d'infrastructures» pour que le théâtre s'épanouisse aux quatre coins de l'île. La seconde : il a déploré que les conseils de districts répondent qu'ils n'ont pas de budget pour le théâtre. «Zot dir zot pa kapav pran responsabilite». Gaston Valayden a demandé au ministre des Finances qu'il accorde un budget dédié à la culture, aux collectivités locales.

Comme les troupes font face à des problèmes de transport, par exemple pour déplacer les décors, le metteur en scène a proposé que des facilités de duty free sur l'achat de véhicules leur soient accordées. Enfin, il a plaidé pour que les subventions du National Arts Fund, actuellement accordées après deux ans à un artiste qui en a déjà bénéficié, soit accessibles tous les ans.

Une heure avant la consultation pré-budgétaire, les Professional Events Organisers laissent exploser leur colère contre « l'inaction » du ministre des Finances et appellent au boycott de cette rencontre.

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