Ile Maurice: Les prix donnent un goût amer aux saveurs du ramadan et de l'Eid-ul-fitr

Les Mauriciens de foi musulmane entament les derniers jours de jeûne. Outre la discipline spirituelle et les prières, ce mois est également marqué par le partage et la fraternité en aidant les plus démunis et en se réunissant pour l'iftaar afin de rompre le jeûne. Cette période marque également la préparation de la fête de l'Eid-ul-fitr. Mais la hausse des prix affecte les traditions, les choix et les priorités pour beaucoup.

Zahida, 75 ans, raconte que «conformément à la tradition mauricienne, nous rompons le jeûne avec des dattes, de l'alouda et des gâteaux salés. On prépare du gato pima, des gâteaux de pomme de terre et de chou, des petits pains au fromage ou des côtelettes. Chaque année, depuis des décennies, nous faisons en sorte, dans un esprit de fraternité, d'envoyer une quarantaine de gâteaux à la mosquée de la localité où les hommes rompent le jeûne, ainsi qu'à nos voisins. Nous transmettons les mêmes valeurs aux jeunes.» Mais l'inflation apporte un goût amer au respect de cette tradition. «Les jeunes contribuent financièrement et pendant les week-ends, ils aident à la cuisine. Mais les salaires ne suffisent pas à couvrir toutes les dépenses.» Il faut notamment compter avec un légume comme le chou, qui peut coûter jusqu'à Rs 200 l'unité au marché cette année. Les prix de la pomme de terre, de la tomate, de la coriandre, du piment et de l'oignon ne sont pas sous contrôle. La farine pour préparer le farata pour le sehri s'élève à Rs 250.

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Pour les viandes, il faut prévoir un minimum de Rs 2 000 par mois. À cela s'ajoutent les bouteilles de sirop, le lait et l'huile. «Nous avons réduit le nombre de gâteaux que nous préparons pour l'iftaar, mais nous prévoyons un certain budget pour au moins partager la nourriture entre nous, même si c'est en plus petites quantités, afin de maintenir l'esprit du ramadan.»

Entre économies et traditions

Y. D. explique qu'il préfère manger des fruits pendant l'iftaar, mais que «les prix ont doublé et qu'il n'y a plus de variété en raison d'une pénurie. La plupart du temps, je dois manger des pommes, des poires et des oranges».

Cette période marque également la préparation de la fête de l'Eid-ul-fitr, qui sera célébrée mercredi ou jeudi, selon la visibilité de la lune. Ce jour-là, après les prières du matin, les familles se réuniront pour partager des repas. Au menu : gâteaux salés, sucreries, vermicelles et briyani. «Même si la société actuelle est plus individualiste et que beaucoup de couples préfèrent rester dans une maison séparée plutôt qu'avec la famille élargie, le jour de la fête, tout le monde se retrouve chez ses parents ou ses grands-parents», raconte M. Z. «Alors qu'auparavant, nous avions l'habitude de cuisiner nous-mêmes, aujourd'hui, beaucoup choisissent de commander du briyani et des gâteaux pour pouvoir profiter de la journée en toute liberté. Mais au cours de l'année écoulée, les prix ont grimpé. Celui du briyani de boeuf est passé de Rs 175 à Rs 260 la portion à emporter et de Rs 150 à Rs 175 pour celui au poulet. Une commande pour 30 personnes peut coûter environ Rs 6 000», explique-t-elle.

Par ailleurs, depuis la pandémie, les commandes en ligne ont permis aux pâtisseries et aux magasins de relancer leurs activités. Les choix sont infinis, mais les prix des ingrédients et les frais d'importation des marchandises ont fait exploser les coûts des produits. «Un napolitain coûte au minimum Rs 40 aujourd'hui, et nous pouvons dépenser Rs 200 pour des minipacks de gâteaux. Les génoises sont proposées à partir de Rs 2 000 ou Rs 2 500. Il y a tout un budget à prévoir étant donné que nous partageons ces gâteaux avec des collègues de travail et des amis,» explique N.R, âgée d'une vingtaine d'années. Elle ajoute : «Cette année, les tenues venant du Pakistan, de Turquie, de Dubaï et du Maroc sont à la mode. L'abaya peut coûter environ Rs 3 000. Il y a aussi la tradition d'appliquer le mehendi, dont le coût est aujourd'hui de Rs 800 pour une application simple. Auparavant, à ce prix, on pouvait se faire appliquer le mehendi pour un mariage ou des fiançailles. Pour les enfants, nous préférons offrir de l'argent plutôt que des jouets car ils sont trop coûteux.»

Néanmoins, poursuitelle, «cette période est l'une des plus importantes dans notre religion et de notre culture. Nous économisons en réduisant les dépenses des mois précédents. Par exemple, je n'achèterai pas de vêtements ou de chaussures au cours des mois précédents pour pouvoir m'offrir une belle tenue pour l'Eid-ul-fitr, que je pourrai porter à nouveau lors d'un mariage. D'un côté, nous essayons de simplifier les choses parce que les salaires ne suffisent pas, de l'autre, la joie de la fête ne peut être vécue sans ces dépenses parce qu'elles sont ancrées dans nos traditions. Cela peut être difficile à gérer».

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