Le dialogue inter-Maliens se veut une alternative 100% malienne à l'accord de paix de 2015, conclu avec les groupes armés du Nord sous l'égide d'une médiation internationale et aujourd'hui rompu. Censé ramener la paix dans le pays, il s'ouvre sur fond de contestation après la suspension, mercredi 13 avril, des activités des partis et des associations à caractère politique. Avant les phases régionale puis nationale, d'ici à la fin du mois, c'est à l'échelle communale que les travaux ont débuté ce samedi 13 avril dans la matinée.
Selon la télévision d'État ORTM, le débat inter-Maliens suscite l'« engouement ». Dans un reportage diffusé ce 13 avril à la mi-journée, on entend un participant expliquer l'importance de « se dire les vérités ». « Le Mali en avait besoin, c'est le moment opportun », poursuit une autre participante. Journalistes comme citoyens, dans la capitale Bamako ou à Taoudéni, dans l'extrême nord du pays, tous saluent unanimement la « belle initiative » des autorités de transition, jugée « capitale » ou « indispensable » pour résoudre les problèmes du Mali.
« Ceux avec qui on doit se réconcilier ne sont pas là »
Joint par RFI à Goundam, région de Tombouctou, un participant témoigne également de son implication et du sérieux des travaux, organisés en groupes de travail thématiques. « Mais l'affluence est faible », déplore cette source, qui l'explique, entre autres, par des difficultés liées au transport, à la fois sur le plan financier et sur le plan de la sécurité.
Ni les rebelles du CSP (Cadre stratégique permanent), signataires du défunt accord de paix de 2015, ni les jihadistes du Jnim (Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans) liés à Al-Qaïda, ou du groupe État islamique au Sahel, n'ont été invités, les autorités de transition les considérant tous, sans distinction, comme « terroristes ». « Ceux avec qui on doit se réconcilier ne sont pas là », déplore ce participant de Goundam, qui voit dans ces absences une limite à l'intérêt des discussions.
La ville de Ménaka, près de la frontière avec le Niger, accueille des milliers de déplacés, la région étant presque entièrement sous le contrôle de l'organisation État islamique au Sahel. « Nous étions entre déplacés dans une école, chaque commune avait une salle de classe, témoigne un participant, qui fait part de son optimisme. Nous vivons des choses tellement difficiles, nous mettons notre espoir dans tout ce qui est nouveau, nous avons besoin que ce soit constructif. »
« Ils diront que tout s'est bien passé partout »
Dans le Centre également, en raison de la présence des jihadistes du Jnim, de nombreuses communes tiennent leurs réunions dans des chefs-lieux parfois très éloignés. « Ils ont déplacé le dialogue à près de 100 kilomètres de ma commune, déplore un élu de la région de Mopti, il n'y aura personne. » Et de conclure, sans illusion : « Ils feront comme pour le référendum constitutionnel : ils diront que tout s'est bien passé partout, même là où rien n'a eu lieu. »
Enfin, la suspension des activités des partis et des associations à caractère politique, décidée le 10 avril par les autorités de transition, n'a pas non plus simplifié le travail du comité d'organisation de ce dialogue inter-Maliens. De très nombreuses personnes, qui avaient initialement prévues de prendre part au dialogue, expliquent à RFI avoir finalement décidé de le boycotter, conformément à la consigne de leur parti. Tous considèrent désormais l'événement comme un « simulacre de dialogue » au service d'autorités de transition jugées « illégitimes » et qui ne chercheraient qu'à « se maintenir au pouvoir ».